L'erreur médicamenteuse est le fait au cours du processus de soins impliquant un médicament, d'omettre ou de réaliser non intentionnellement un acte qui peut être à l'origine d'un risque ou d'un évènement indésirable pour le patient. « On parle d'erreur et non pas de faute, a souligné François Lacoin, responsable du Pôle médicament du Collège de la médecine générale. Il n'y a là aucune notion de culpabilité mais cela ne doit pas empêcher de faire le signalement de l'erreur auprès de l'ANSM pour éviter qu'elle ne se reproduise ». La déclaration peut, depuis 2017, se faire sur le portail www.signalement-sante.gouv.fr. On distingue trois types d'erreurs médicamenteuses : l'erreur avérée (administration au patient d'un médicament erroné, d'une dose incorrecte, selon une mauvaise voie…), l'erreur potentielle (interception avant l'administration) et l'erreur latente (risque d'erreur, conditionnement ou dénominations similaires de médicaments…).
Les personnes âgées et les enfants les plus touchés
De 2013 à 2017, près de 15 000 déclarations d'erreurs médicamenteuses ont été reçues à l'ANSM (dont 2 234 en 2017) : 80 % d'erreurs avérées, 9 % d'erreurs potentielles et 11 % de risques d'erreurs. La moitié était commise en ville : 8 % lors de la prescription, 12 % lors de la délivrance et 78 % lors de l'administration. Les populations touchées étaient majoritairement les enfants (35 %) et les personnes âgées (29 %). Chez les enfants, 60 % des erreurs ont entraîné un effet indésirable dont 40 % considérés comme graves. Les personnes âgées sont encore plus sensibles : 80 % des erreurs ont entraîné des effets indésirables dont la moitié considérée comme graves.
« L'Agence évalue, analyse, chaque signalement et peut mettre en place des mesures correctives : modification du conditionnement du médicament, correction de la notice, alertes auprès des professionnels et/ou du grand public… » a expliqué le Dr Patrick Maison (Direction générale, ANSM).
Il existe des périodes critiques où le risque d'erreurs est plus important, notamment celle de la sortie hospitalière. « Il faudrait renforcer l'accompagnement du patient à sa sortie de l'hôpital et que le prescripteur indique clairement, par exemple, le changement de dosage au cours de l'hospitalisation ou l'arrêt du traitement… » a déclaré Gilles Bonnefond, président de l'Union des Syndicats des Pharmaciens d'Officine.
Un exemple de gestion en ambulatoire
Une expérimentation a été menée par la Dr Laure Pourrain et le Dr Michel Serin, au sein de la maison de santé pluriprofessionnelle de Saint-Amand-en-Puisaye (Nièvre).
Pendant trois mois, 4 712 consultations médicales ont été effectuées et 64 erreurs médicamenteuses ont été recueillies, soit 13,6 erreurs/1 000 consultations. Elles concernaient surtout les patients âgés (âge médian 79 ans) et survenaient au domicile du patient dans 42 % des cas, à la maison de santé (24 %) et à la pharmacie (16 %). Les erreurs ont conduit à une atteinte clinique grave dans 11 cas : 8 au domicile, 2 à la maison de santé et 1 à la pharmacie. Dans plus de la moitié des cas, la prescription était l'étape initiale de survenue de l'erreur. Les erreurs les plus fréquentes étaient l'erreur de médicament qui ne correspondait pas à celui qu'aurait dû recevoir le patient (36 %), la mauvaise observance (18 %), le retard à la prise (10 %) et l'erreur de dose (7 %).
Les causes systémiques mises en évidence étaient : un défaut dans le processus de soins (coordination ou procédure), le contexte d'action du soignant (lieu de prise en charge, exécution d'un acte non planifié, ou surcharge de travail), et les facteurs humains (état du patient et du soignant).
Les erreurs médicamenteuses en ambulatoire sont donc spécifiques de l'organisation du circuit de soins avec des points de fragilité tels que les interfaces entre établissements et domicile, la coordination des soins et l'implication du patient lui-même dans sa prise en charge.
L'adhésion des personnels de santé à l'étude a été excellente, avec mise en œuvre d'actions correctives (amélioration de la communication entre les professionnels, éducation thérapeutique des patients…).
Session « Errare humanum est, perseverare diabolicum, un focus sur le médicament » co-organisée avec l’ANSM.
Article précédent
Le défi de l'évaluation du risque environnemental
Article suivant
Le généraliste et les armées
Plus d'information sur les vaccins
Le microbiote, une nouvelle raison de résister
De nouvelles pratiques intégrées dans les cabinets
Des pistes pour un meilleur suivi
Le travail c'est aussi la santé
Le défi de l'évaluation du risque environnemental
Les points chauds de l'erreur
Le généraliste et les armées
Des patients favorables aux tests génétiques
Violences intrafamiliales : la formation paye
Mélange des genres ou logique médicale ?
Repérer le mal-être des adolescents
Faciliter l'abord de la sexualité
Accompagner la fin de vie
Plus de médicament mais toujours du soin
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?