Premières « négos » sur les dépassements : la profession entre scepticisme et inquiétude

Publié le 25/07/2012
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Crédit photo : S. TOUBON

Ce mercredi s’est tenu au siège de la CNAM le tout premier round des négociations sur l’encadrement des dépassements d’honoraires, sous la houlette de Frédéric van Roekeghem, directeur de l’assurance-maladie. Cette réunion de près de trois heures, à laquelle ont participé les cinq syndicats représentatifs des médecins libéraux (CSMF, SML, MG France, FMF et Le BLOC), les complémentaires santé (réunis au sein de l’UNOCAM) et l’assurance-maladie, a permis de fixer le calendrier des trois prochains mois. Et d’entrevoir les premiers sujets de friction. Six délégations jeunes étaient conviées en tant qu’observateurs. Compte rendu des principales décisions.

• Que va-t-il se passer les trois prochains mois ?

Pas grand chose en août, mais la rentrée sera chargée ! Sept séances de « négos » (une par semaine) ont été réparties sur septembre et octobre. Le premier mois, un thème par séance (et par semaine) sera abordé : « Dépassements abusifs – définition et sanctions » (le 5 septembre); « Le contrat "d’accès aux soins" » (14 septembre) ; « Zones de difficultés d’accès aux soins au tarif opposable – Régulation du secteur II » (19 septembre); « Valorisation des tarifs opposables » (27 septembre).

Les deux premières semaines d’octobre seront consacrées à la « discussion des projets de texte » (3 et 11 octobre). La dernière rencontre, le 17 octobre, doit permettre de conclure les négociations et de rendre la copie finale. En tout, les participants ont près de 25 heures pour parvenir à un accord sur les modalités d’encadrement des dépassements d’honoraires.

• Que veut Frédéric van Roekeghem, le patron de la CNAM ?

Le directeur de l’assurance-maladie poursuit les deux objectifs fixés par la ministre de la Santé Marisol Touraine : « mettre un terme aux dépassements abusifs » et « améliorer l’accès aux soins », indique le (très long) document d’appui aux négociations présenté ce mercredi aux médecins et aux complémentaires santé.

Par quelle méthode ? Par la politique de la carotte et du bâton. La carotte tout d’abord, avec une « valorisation des tarifs opposables » (encore très floue mais néanmoins ouvertement évoquée dans le document et mise à l’ordre de jour) et la perspective d’un nouveau « contrat d’accès aux soins » conventionnel. Calqué sur feu le secteur optionnel, ce contrat, qui s’adresserait à tous les médecins de secteur II, devra limiter le taux de dépassement de manière à diminuer le reste à charge des patients. Il serait rendu attractif par « la prise en charge d’une partie des cotisations sociales sur la part d’activité réalisée aux tarifs opposables ». C’est ce que Frédéric van Roekeghem appelle aussi un « accord de modération tarifaire de secteur II ». Reste à préciser les conséquences pour les médecins de secteur II qui refuseraient ce contrat.

Le bâton ensuite, avec la mise en place d’une nouvelle procédure de sanction conventionnelle « efficace » à l’encontre des médecins de secteur II. En cas de dépassement abusif caractérisé, ces sanctions (dont l’échelle est à définir jusqu’au déconventionnement) ne seraient pas « conditionnées à un avis de l’Ordre » des médecins, indique le document de la CNAM.

• Comment ont réagi les médecins à l’issue de cette première séance de négociation ?

Plutôt mal. Le calendrier, très serré et contraint, en a agacé plus d’un, la méthode aussi.

Le Dr Claude Leicher, président de MG France, « reconnai[t] la technique d’épuisement qu’affectionne Frédéric van Roekeghem ». Le Dr Michel Chassang, président de la CSMF, n’a pas caché son scepticisme sur l’issue de ces négociations : « Le mieux à même de répondre à la problématique des dépassements, c’est le gouvernement. Lui seul détient les clés du système de santé français ». Les premières pistes passent mal. Le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, a dénoncé un « contrat d’accès aux soins, dont on peut imaginer qu’il sera, comme d’habitude, largement inspiré par les descendants de Kafka ». Le contenu de la séance a carrément refroidi certains leaders. Ainsi les spécialistes du BLOC n’ont pas caché leur « grande inquiétude ». Et le Dr Christian Jeambrun a prévenu : « Le SML ne s’engagera pas dans un accord qui ne serait pas gagnant pour les médecins ».

 ANNE BAYLE-INIGUEZ

Source : lequotidiendumedecin.fr
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