Première preuve d'efficacité vers un vaccin gonocoque

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Publié le 11/07/2017
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Vaccins

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Crédit photo : Phanie

La piste vaccinale pourrait aider à faire face à l'inquiétante augmentation des infections à gonocoque de plus en plus résistantes à l'échelle mondiale, comme s'en est de nouveau inquiété l'OMS très récemment.

C'est un pas dans cette direction qui vient d'être fait avec la première preuve d'efficacité d'un vaccin contre le gonocoque dans « The Lancet ». Il s'agit d'un vaccin existant dirigé contre le méningocoque B, le MenZB, et qui a été utilisé lors d'une campagne nationale de vaccination de masse (2004-2006) en Nouvelle-Zélande.

À partir des données de 11 centres de santé sexuelle néozélandais, des chercheurs de l'université d'Auckland ont mis en évidence une diminution significative du risque de l'infection sexuellement transmissible (IST) chez des sujets âgés de 15 à 30 ans ayant été vaccinés par rapport à des sujets non vaccinés (41 % versus 51 %). Cette étude rétrospective a exploité 14 730 cas d'IST enregistrés entre janvier 2004 et décembre 2016  : 1 241 cas de gonocoques, 12 487 cas de chlamydia et 1 002 cas de co-infection.

Une efficacité modeste mais intéressante

Si l'efficacité vaccinale reste modeste, estimée à 31 % après ajustement (sexe, ethnie, abstinence sexuelle, origine géographique), l'équipe dirigée par le Dr Helen Petousis-Harris est la première à obtenir une réponse vaccinale positive, après l'échec de quatre candidats vaccins au stade d'essai clinique.

Selon une modélisation prédictive, une efficacité de 30 % pourrait diminuer la prévalence du gonocoque de plus de 30 % en 15 ans si l'immunité se maintenait dans le temps. L'efficacité croisée est plausible sur le plan physiopathologique, dans la mesure où les souches Neisseria gonorrhoea et Neisseria meningitidis partagent 80-90 % de leur patrimoine génétique, rappellent les auteurs.

Des preuves à confirmer 

La protection était moindre chez les sujets co-infectés à chlamydia, ce que les auteurs expliquent en avançant : « La co-infection semble induire un environnement immunologique profondément différent de l'infection à gonocoque seule. » 

Si le vaccin utilisé en Nouvelle-Zélande, dit de type « OMV » (pour outer membrane vesicle), n'est plus commercialisé, le vaccin quadrivalent 4CMenB (Bexsero) inclut ces mêmes antigènes OMV. Néanmoins, les auteurs se veulent prudents et disent la nécessité d'attendre les données d'efficacité du Bexsero et d'autres vaccins anti-méningocoque B avant de le recommander en pratique, sans compter que l'efficacité vaccinale pourrait être variable selon les souches de gonocoques.  

Un champ de recherche indispensable

Le Pr Steven Black, de l'hôpital pédiatrique Cincinnati et co-auteur, reste optimiste : « Si le 4CMenB (Bexsero), actuellement disponible dans de nombreux pays, se révèle aussi efficace que le vaccin MenZB, on peut espérer un déclin des gonococcies avec la mise en place de programmes de vaccination chez les adolescents ».

Aujourd'hui, seul le Royaume-Uni a intégré le vaccin en routine, ailleurs et notamment en France, le Bexsero est indiqué « pour des populations cibles dans le cadre de situations spécifiques épidémique et d'hyperendémie », comme le précise Santé Publique France dans le calendrier vaccinal 2017.

Dans un éditorial, le Pr Kate Seib, de l'Institute of Glycomics à l'université Griffith (Australie), conclut : « Des études sur les antigènes et les mécanismes responsables de la protection médiée par le MenZB contre l'infection gonocoque apporteront des informations uniques pour guider le développement vaccinal à l'avenir. Compte tenu de l'importance de la maladie et de la menace de gonococcie non curable en raison de l'antibiorésistance, il devient impératif de revisiter les options vaccinales et redynamiser la recherche dans ce champ. »


Source : lequotidiendumedecin.fr
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