« Le recours à la pharmacologie pour les soins douloureux de l’enfant est encore rare, mais il devrait grandir aussi vite qu’à Trousseau, quand les professionnels ont été formés, dans des services d’urgences ou d’hémato-oncologie notamment, tant l’usage de la kétamine est "facile". Une manière plus "élégante" de soigner, sans contention majeure », souligne le Pr Daniel Annequin, unité Douleur de l’Hôpital Trousseau (Paris).
Il s’agit d’un produit ancien, un anesthésique « tout terrain » en raison de sa grande marge de sécurité (lorsque les moyens de ventilation sont inaccessibles), utilisé initialement en anesthésie générale à des doses 4 fois supérieures. Ici, la présence d’un médecin anesthésiste n’est pas nécessaire ; le médecin hospitalier qui l’administre doit par contre être spécifiquement formé à son usage. Idéalement, ce médecin a lui-même assisté à au moins une dizaine de gestes sous kétamine. Il connaît la pharmacologie du produit, sait identifier les contre-indications, ainsi que reconnaître et traiter les très rares effets indésirables sérieux (laryngospasme, apnée, « airway » obstructif, tirage laryngé, etc.). Enfin, il doit savoir pratiquer les manœuvres respiratoires élémentaires : luxation du maxillaire inférieur, ventilation au masque, etc.
Sans dépression respiratoire
À l’inverse des anesthésiques classiques, il stimule le cerveau, ce qui permet d’éviter dépression respiratoire et/ou cardiovasculaire. Son effet antalgique est dissociatif, s’exerce au niveau du thalamus où les influx douloureux (sensoriels et émotionnels) sont découplés. L’enfant garde souvent les yeux ouverts, il rêve ; les hallucinations (LSD-like) observées à doses plus élevées sont exceptionnelles. Les réflexes de protection laryngée sont maintenus, voire amplifiés, ce qui met l’enfant à l’abri de fausse route.
Les contre-indications absolues sont rares : l’âge, en dessous de 6 mois, un enfant psychotique, un geste intra-buccal ou l’absence de personnel formé. Les contre-indications relatives (le risque pouvant être supérieur au bénéfice) sont des voies aériennes instables ou potentiellement obstruées, infectées, une comitialité, un traumatisme crânien avec perte de connaissance, etc.
La kétamine peut être administrée à partir de 6 mois donc, à la dose de 0,5 mg/kg pour commencer, en intraveineuse directement. Après un délai d’action de 2 minutes, le temps d’action est bref (7 minutes environ) et autorise une ponction lombaire par exemple, un myélogramme ou un pansement de cathéter. Elle peut être associée au MEOPA (pour les enfants non phobiques du masque). En une heure après une injection unique, le produit est complètement métabolisé et n’oblige à aucune surveillance au-delà. « Les symptômes qui pourraient survenir après le soin, au domicile, n’auraient aucun lien avec le produit », rassure le Pr Annequin.
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