HISTOIRES COURTES : Les pieds d’Hélène

Le miel (2/6)

Publié le 05/06/2014
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Résumé de l’épisode 1 : Lambert et William sont tous deux médecins et enseignants. Ils entretiennent des rapports tendus. À la fin de son cours, Lambert est rejoint par Hélène, une de ses étudiantes et aussi la fille de William.

Hélène possède le même petit air supérieur que celui de son père, William. Son redoublement me rendait triste pour elle en même temps qu’il me faisait sourire car il atteignait William par ricochet. Les nuages au-dessus de sa tête sont pour moi autant de soleils.

Hélène est une jeune femme distinguée, toujours sobrement vêtue et affiche en toutes circonstances une élégance qui lui vient de ses longues années de danse classique. Son corps est harmonieux et ses pieds sont fantastiques. Son médio-pied légèrement bombé et doux comme un coussin est comme la lampe qu’Aladin frottait pour obtenir des vœux.

Hélène ouvre la porte de son studio.

Anna ? Tu es là ? demande-t-elle. En fin de compte, elle a dû partir. Viens Franck, viens m’ausculter, dit-elle avec son sourire de manipulatrice.

Hélène et moi avons des rapports complexes construits sur le respect, l’obéissance et le fantasme. Il s’agit de sensualité, sans véritable rapport, et à aucun moment le vulgaire et le commun ne viennent s’immiscer dans nos jeux. Je n’ai aucun désir classiquement sexuel avec elle, je les réserve à ma femme très traditionnelle, très bourgeoise et très prévisible. J’adore exécuter les ordres d’Hélène, je consens volontiers à n’être parfois qu’un objet manipulé.

Allongé bientôt sur le sol pendant qu’elle m’ordonne de mordiller ses phalanges, j’entends qu’elle se déshabille, vois ses vêtements qui tombent près de ma tête et je sais qu’elle est entièrement nue. Elle place son gros orteil dans ma bouche et se caresse sans que je puisse l’apercevoir. Ici c’est elle qui commande, qui décide du moment. Sa plante des pieds parcourt ma langue. Peu après la voilà debout sur mon torse, les jambes serrées. « Ouvre tes yeux, regarde, ausculte ». Quelques secondes plus tard elle s’agenouille et m’indique de me placer debout face à elle, et de me caresser. Elle joint ses mains. « Donnez-moi votre miel, mon roi ». C’est son dernier ordre.

Mon portable sonne. C’est Anna.

– Oui ma chérie ! Tu es où ?

– À la fac, je te cherche. J’ai croisé William qui m’a dit que tu devais être dans les parages. T’es où ?

– Je fais des recherches, j’arrive dans quelques minutes.

Je raccroche.

– C’est moi tes recherches ? me demande Hélène, rieuse.

– On se voit la semaine prochaine si tu veux.

Je pars en posant deux billets de cent euros. Hélène n’a jamais rien réclamé mais je lui laisse volontiers quelque chose, et puis bientôt c’est l’anniversaire de son père. L’année dernière il exhibait la montre offerte par sa fille et payée par moi. Je lui demande souvent l’heure qui me rappelle le temps passé avec Hélène.

J’arrive dans le hall.

– Enfin il est là ! me lance William qui se tient aux côtés d’Anna. Tu sais, nos deux filles devraient réviser ensemble, ça serait une équipe de choc. La mienne a l’expérience de la première année et la tienne est travailleuse, ça se voit, ça se sent, c’est dans ses gênes.

Puis il se lève et se place à mes côtés comme à son habitude pour prouver ses cinq centimètres supplémentaires. La compétition ne s’arrête jamais entre nous. Parfois j’aimerais qu’il sache pour sa fille et moi. Pour gagner un point.

– J’y vais, j’ai une myomectomie qui m’attend, dit-il en regardant sa montre.

– Tu étais où toi pendant mon cours, ma future pédiatre ?

– C’est ce que je racontais à William, me dit Anna, j’étais chez Hélène. J’y ai passé la nuit et je n’ai pas réussi à me réveiller, mais ce n’est pas grave, je rattraperai. Mais pas aujourd’hui parce qu’elle est malade.

– Ah ?

– Oui, des trucs de filles.

Prochain épisode dans notre édition du 12 juin

Avec la collaboration de   logo-fond-gris-2000_1.png

Par Sokrates Papavassiliou

Source : Le Quotidien du Médecin: 9332