Un diagnostic qui semble poser plus de questions qu’il n’apporte de réponse : malgré les progrès dans la compréhension de sa physiopathologie, le reflux pharyngolaryngé (RPL) reste nié en France, ce qui n’est pas le cas chez les Anglo-Saxons. On attribue même au RPL les extinctions de voix de Barack Obama ! Ses manifestations sont extra-œsophagiennes, liées à l’inflammation des voies aérodigestives supérieures provoquées par l’action – directe ou non – du reflux du contenu gastrique. La dysphonie, toux sèche, dysphagie, douleurs pharyngées sont souvent sous-estimées. On associe aussi généralement reflux et acidité, négligeant les reflux non acides, ou mixtes, dont la prévalence est pourtant importante.
Il est classique de proposer d’abord des traitements d’épreuve, dont l’efficacité serait certainement supérieure s’ils étaient bien conduits. Pour traiter le reflux en lui-même, il serait logique de prescrire des prokinétiques, mais de nombreuses molécules ont été supprimées ou font l’objet d’une grande vigilance du fait de leurs effets secondaires, à plus forte raison au long cours ; de plus elles n’ont pas vraiment bénéficié d’études randomisées dans cette indication.
Les antisécrétoires (IPP ou anti-H2) ont récemment fait l’objet de diverses alertes sur leur possible iatrogénie, qui serait cependant exceptionnelle. En l’absence de consensus, la durée du traitement d’épreuve est très variable – de 1 à 3 mois, avec une posologie allant d’une à deux fois par jour. « La prise est incorrecte pour plus de 60 % des patients, constate le Dr François Bobin (polyclinique de Poitiers). Ils devraient être pris une demi-heure avant les repas, idéalement le matin, au moment du pic de sécrétion d’HCl et pas à la demande ni après les repas ! » Il est aussi souhaitable d’éviter les génériques, en particulier ceux de l’oméprazol. Et n’oublions pas que les IPP ne traitent pas le reflux, mais uniquement la sécrétion acide.
Les antiacides sont intéressants de par leur effet surnageant formant un « radeau » au-dessus du liquide gastrique qui protège les muqueuses de celui-ci. On préfère les alginates aux associations contenant des sels d’aluminium, à ne pas utiliser au long cours, ou le sucralfate, qui s’oppose aussi au reflux biliaire, ou encore l’Esoxx One, à base d’acide hyaluronique, utile surtout pour les douleurs du bas œsophage.
Le Dr Bobin propose aussi de recourir à des lavages rhinopharyngés alcalinisants voire aux pastilles Vichy ! Et de bannir les aliments favorisant l’ouverture du cardia (le café, le chocolat, les épices, les agrumes, les boissons gazeuses, etc.). En cas d’échec d’un traitement d’épreuves bien conduit, on propose alors des examens complémentaires type impédancemétrie ou PEPtest (recherche de pepsine dans la salive).
Session « Diagnostic et prise en charge du reflux pharyngolaryngé. État des lieux en 2019 »
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