Si la conduite à tenir dans la polypose naso-sinusienne (PNS) de l’adulte a longtemps été relativement consensuelle, l’arrivée des biothérapies en 2021 – et dans le même temps, la publication de nouvelles études – a fait émerger de nombreuses interrogations.
Dans ce contexte, la Société française d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie de la face et du cou (SFORL) a élaboré de premières guidelines françaises dédiées à la PNS, non sans mal. Faute de données suffisamment robustes sur nombre d’aspects, la méthode d’analyse de la littérature initialement choisie a en effet dû être abandonnée au profit d’un consensus d’expert par méthode Delphi.
L’évaluation pré-thérapeutique mieux codifiée
Le document ainsi obtenu balise l’évaluation pré-thérapeutique des cas de PNS, qui permet d’estimer la sévérité de la maladie et de guider le choix du traitement. Cliniquement, cette étape est fondée sur la recherche et l’évaluation de deux symptômes reconnus comme déterminants par les experts (avec un accord fort) : les troubles de l’odorat et l’obstruction nasale. L’évaluation de la qualité de vie – à l’aide de quatre échelles disponibles en français – entre aussi en ligne de compte, de même que l’estimation du retentissement de la PNS sur le sommeil.
Les experts plaident de surcroît pour le dépistage de certaines comorbidités susceptibles d’interférer avec la PNS. À savoir : l’asthme – indicateur de la sévérité et du contrôle de la maladie ainsi que du fardeau thérapeutique auquel est déjà soumis le patient - et les pathologies nasales type rhinite allergique ou anomalies d’architecture – à même de majorer les symptômes.
En termes d’examens complémentaires, si l’évaluation endoscopique avec le calcul du score endoscopique peut être pertinente, elle ne doit être interprétée qu’à la lumière du ressenti du patient. De même, les tests paracliniques radiologiques et le calcul d’un score d’opacité scanographique doivent être corrélés aux symptômes rapportés.
Chirurgie ou procédures instrumentales ?
Les recommandations reprécisent par ailleurs les principes et éléments de la prise en charge médicale. Celle-ci repose avant tout sur un traitement de fond comprenant un lavage du nez à grand volume et une corticothérapie nasale, dont l’efficacité et l’observance sont à réévaluer trois à six mois après l’introduction. En cas de non-contrôle de la maladie par ce traitement de fond bien conduit, c’est-à-dire en cas de persistance ou résurgence des symptômes, une corticothérapie orale peut être proposée en cure courte, pour une dose cumulée maximale d’un gramme par an d’équivalent prednisone – comprenant l’ensemble des corticoïdes oraux prescrits par chacun des professionnels intervenant auprès du patient.
En cas d’échec, les préconisations font la part belle aux procédures instrumentales ou chirurgicales, qu’elles distinguent : les polypectomies relèvent de procédures instrumentales, seules les ethmoïdectomies étant qualifiées de procédures véritablement chirurgicales. Quoi qu’il en soit, ces gestes doivent toujours s’accompagner d’un traitement médical de fond, et l’efficacité est à évaluer là encore sous trois à six mois. À noter que la situation d’un individu non contrôlé après une polypectomie ne constitue pas un échec chirurgical : seul un patient non contrôlé malgré une ethmoïdectomie antérieure et postérieure associée à un traitement médical bien conduit peut être considéré comme tel.
Les biothérapies en dernière ligne
Finalement, les biothérapies arrivent en dernière ligne, en cas d’échec médical et chirurgical en particulier précoce – survenant dans les deux ans suivant la procédure. Deux molécules sont autorisées et remboursées en France : le dupilumab et le mépolizumab. Si l’AMM européenne retient comme indication le non-contrôle de la PNS par une corticothérapie orale et/ou une chirurgie, le périmètre de remboursement français et les recommandations de la SFORL se révèlent plus sélectifs, limités aux PNS sévères, insuffisamment contrôlées par la corticothérapie orale et après échec de la chirurgie. Si les essais de phase 3 confirment l’intérêt des biothérapies dans cette indication, le choix de l’un ou l’autre de ces médicaments se révèle plus empirique, aucune étude n’ayant pour le moment comparé ces deux traitements. En outre, du fait de leur mode d’action, ces biothérapies s’avèrent particulièrement efficaces en cas d’inflammation de type 2 ; au contraire, en cas de sinusite œdémato-purulente, évoquant plutôt une inflammation de type 1, ces médicaments peuvent s’avérer moins efficaces.
D'après la session «Recommandation de la SFORL. Prise en charge de la polypose rhinosinusienne»
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