Depuis les dernières recommandations de 2012 dans la migraine, de nouveaux traitements de fond ont émergé.
Le traitement médicamenteux est guidé par la caractérisation du type de crises (avec ou sans aura) et de migraine (épisodique ou chronique), le dépistage d’une forme sévère (score HIT-6 à 60 ou plus), l’existence de comorbidités (notamment anxiodépressives) et d’un éventuel abus médicamenteux (1). Le risque de céphalée par abus médicamenteux est d'ailleurs plus élevé avec les opiacés et antalgiques combinés.
Une stratégie thérapeutique individualisée
L’agenda de la migraine est essentiel pour le suivi des patients : la fréquence des céphalées et des prises de traitements de crise est notée. « Il convient de proposer une stratégie thérapeutique individualisée combinant un traitement de crise optimisé, des améliorations de l’hygiène de vie, une prise en charge des facteurs de risque modifiables de chronicisation de la migraine et un traitement de fond pour les patients éligibles », explique la Pr Anne Ducros (CHU de Montpellier).
Le traitement de crise a pour objectif la disparition de la céphalée à deux heures et sans récurrence. La prise du médicament de crise doit être précoce et la galénique adaptée aux troubles digestifs. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont recommandés pour une céphalée faible et les triptans si elle est modérée à sévère. En cas de nausées sévères ou de vomissements, il convient de prescrire du métoclopramide (oral ou parentéral). La prise du traitement de crise ne devrait pas dépasser huit jours par mois, pour éviter le risque de céphalée par abus médicamenteux.
Les anti-CGRP en cas d'échec
Le traitement de fond a pour objectif de diminuer la fréquence des crises d’au moins 50 % dans la migraine épisodique et 30 % dans les formes chroniques.
Dans la migraine épisodique, les traitements de première intention sont le propranolol ou le métoprolol et, lorsqu’un bêtabloquant n’est pas approprié, l’amitriptyline, le candésartan ou le topiramate.
Dans la migraine chronique, le traitement de première intention est le topiramate. En cas de migraine chronique avec abus médicamenteux, un traitement prophylactique de première ligne est recommandé avec un sevrage du médicament surconsommé. Après échec du premier traitement de fond à trois mois, un second est proposé. Dans la migraine épisodique avec plus de huit jours de crise par mois et après échec de deux traitements de fond oraux classiques, la SFEMC recommande la prescription d’un anticorps ciblant la voie du calcitonin gene related peptide (CGRP), tels que l'erenumab, le frémanezumab ou le galcanézumab. Dans la migraine chronique, après échec de deux traitements de fond, un anticorps ciblant la voie du CGRP ou la toxine botulinique de type A sont préconisés. « Pourtant très efficaces chez certains patients, les anti-CGRP ne sont malheureusement pas remboursés en France, ce qui crée des inégalités… », souligne la Pr Ducros.
Des thérapies alternatives
La SFEMC a également émis des recommandations concernant les prises en charge alternatives (2). La pratique régulière d’une activité physique aérobie doit être encouragée chez tout patient migraineux, comme alternative ou en supplément à un traitement médicamenteux. « Chez un patient souffrant de migraine épisodique qui souhaite des traitements avec peu ou pas d’effets secondaires, la prescription de coenzyme Q10 (300 mg), de riboflavine à forte dose (400 mg) ou encore de mélatonine devrait être envisagée. Par contre, l’utilisation de produits à base de plantes n’est pas recommandée : la grande camomille n’a pas fait la preuve de son efficacité et la pétasite est potentiellement hépatotoxique », précise le Dr Jérôme Mawet (Paris).
Chez un patient souffrant de migraine épisodique, souhaitant une thérapie non médicamenteuse ou n’obtenant pas d'amélioration significative avec un traitement pharmacologique, des alternatives existent. En effet, l’acupuncture ou la neuromodulation non invasive doivent être proposées, avec notamment une préférence pour la technique Remote Electrical Neuromodulation (REN) en traitement de crise et pour la stimulation supra-orbitaire par Transcutaneous Electrical Nerve Stimulation (TENS) en prophylaxie de la migraine.
Chez un patient souffrant d’une migraine épisodique ou chronique associée à un stress ou une anxiété, les thérapies comportementales (relaxation, biofeedback, thérapie cognitivo-comportementale) ou les techniques de méditation de pleine conscience peuvent être utilisées en complément.
D’après la session « Prise en charge de la migraine : nouvelles recommandations de la SFEMC » du congrès 2021 de la SFETD
(1) Ducros A et al. Revised guidelines of the French headache society for the diagnosis and management of migraine in adults. Part 2: Pharmacological treatment. Rev Neurol (Paris) 2021 Sep;177(7):734-52.
(2) Demaquay G et al. Revised guidelines of the French Headache Society for the diagnosis and management of migraine in adults. Part 3: Non-pharmacological treatment. Rev Neurol (Paris) 2021 Sep;177(7):753-9.
Article précédent
Les SMS du congrès de la SFETD
Article suivant
Mésusage des gabapentinoïdes
Juguler les effets du Covid-19
Algies pelviennes chez l'adolescente
Les SMS du congrès de la SFETD
Des recommandations actualisées dans la migraine
Mésusage des gabapentinoïdes
Attention au paracétamol chez le sujet âgé
Gérer la douleur aux urgences
Lombalgie : stop à la démédicalisation !
Opioïdes faibles : anges ou démons ?
Comment bien évaluer les douleurs chroniques chez l’enfant ?
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?