La douleur est relativement réfractaire à de nombreux analgésiques, soulignant l’importance d’identifier de nouveaux agents pharmacologiques. Ainsi, la modulation du système cannabinoïde constitue une voie thérapeutique innovante. Sur le plan clinique, les cannabinoïdes font l’objet de nombreuses études récentes dans divers syndromes douloureux avec des résultats globalement assez positifs. Néanmoins, la place du cannabis et de ses dérivés en thérapeutique n’est pas encore établie.
Les connaissances pharmacologiques du système cannabinoïde ont explosé avec l’identification de deux types de récepteurs cannabinoïdes, d’un système cannabinoïde endogène et de la mise en évidence du rôle essentiel de ce système dans la modulation neuronale.
Le cannabis existe sous plusieurs formes : la marijuana, une plante séchée ; la résine de cannabis ou haschich et l'huile de cannabis. Dans certains pays comme le Canada, l’utilisation de marijuana est autorisée à des fins médicales, les plants étant produits et délivrés par Santé Canada. Il existe également dans certains pays des cannabinoïdes synthétiques, dont les principaux sont le delta-9-THC ou un de ces dérivés synthétiques.
La recherche sur les propriétés du cannabis dans le traitement de la douleur chez l’homme en est encore à son début malgré son utilisation depuis des millénaires et les progrès récents dans la pharmacologie de ces substances. Une des difficultés sera de privilégier, ou non, des extraits complets de la plante ou un des nombreux principes actifs (principalement le delta-9-THC) contenus dans le cannabis. Les problèmes qui seront rencontrés dans ces essais cliniques sont ceux d’une formulation galénique et d’une voie d’administration adaptées. Il faudra également tenter de dissocier les effets analgésiques potentiels du cannabis de ses effets secondaires. Les résultats des diverses études en cours de par le monde sont très attendus et seront importants pour élucider la place que prendront les cannabinoïdes dans l’arsenal thérapeutique contre la douleur.
Un registre pour encadrer l'utilisation
Actuellement, au Canada, l’usage du cannabis séché à des fins médicales n’est pas un traitement reconnu. L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill et le Consortium canadien pour l’investigation des cannabinoïdes ont mis en place un registre pour les utilisateurs de cannabis à usage médical au Québec, afin de mieux gérer son utilisation et d’assurer la sécurité des patients. Le registre a été créé suite à l’appel du Collège des médecins du Québec, qui souhaitait encadrer l’utilisation du cannabis médical conformément à la nouvelle réglementation gouvernementale. Le cannabis est ainsi prescrit dans un « cadre de recherche » uniquement.
La prescription de cannabis n’est pas appropriée pour les moins de 25 ans, les patients qui ont des risques ou un historique de dépendance, des antécédents familiaux de psychose, de maladie cardiovasculaire ou respiratoire, ni chez les femmes enceintes ou allaitantes. D’autres options thérapeutiques doivent avoir été considérées, notamment d’autres formes de cannabinoïdes (nabiximols, nabilone).
Une prescription bien spécifique
Au moment de prescrire du cannabis, le médecin doit préciser sur l’ordonnance le type de produit, la quantité et la fréquence d’utilisation. Il doit faire au patient les recommandations d’usage, transmettre directement l’ordonnance au producteur, prévoir et assurer le suivi du patient et ajuster l’ordonnance en conséquence, si besoin.
Au Canada, le cannabis n’est pas encore considéré comme un traitement. Ses indications thérapeutiques sont rares et il n’est pas prescrit en première ligne. Les effets indésirables sont fréquents et les patients doivent être suivis régulièrement. Enfin, des études cliniques sont nécessaires afin d’en préciser les indications thérapeutiques.
D'après la communication du Dr Pierre Beaulieu de l'Université de Montréal.
Allan GM et al. Can Fam Physician 2018;64:e64-e75.
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