La situation de la démographie médicale est « inadmissible » pour le sénateur LR de l’Allier, Bruno Rojouan, qui a déposé fin juin une proposition de loi afin de tenter d'améliorer l’égalité d’accès au soin. Le parlementaire qui, au travers d'une trentaine de mesures, manie la carotte et le bâton ne fait pas cavalier seul puisque cette proposition met en musique des recommandations unanimes de l'influente commission de l'aménagement du territoire parues en mars dernier. Ainsi, partisan de davantage de coercition, le sénateur républicain a rédigé trente articles afin d'inciter les médecins à s’installer en zones sous-denses, parmi lesquels l’augmentation du C à 30 euros. La proposition de loi relève ainsi « les honoraires de consultation d'un médecin généraliste de secteur 1 à 30 euros, sans augmentation du reste à charge pour les patients, d'ici 2025 », lorsqu’il est installé dans un désert médical.
Dans ces « zones franches médicales » - dont les contours restent encore à définir -, Bruno Rojouan propose également des exonérations de cotisations sociales et une défiscalisation de la permanence de soins. La proposition de loi sénatoriale imagine également une exonération de cotisations retraites pour « les médecins pensionnés qui poursuivent l'exercice libéral de la médecine, dans l'objectif de rendre plus avantageux le cumul emploi-retraite ». Le tout financé par l’introduction d’une taxe additionnelle sur le tabac.
Six mois obligatoires en désert
En face des mesures incitatives, le parlementaire de l’Allier met en balance de la coercition. S’il ne souhaite pas officiellement remettre en cause « le principe cardinal de la liberté d’installation des médecins », Bruno Rojouan n’accepte pas qu’elle porte atteinte à l’égalité d’accès au soin pour tous, « une promesse républicaine ». Aussi, la proposition de loi introduit un conventionnement sélectif dans les « zones caractérisées par une offre de soins abondante », sur le principe d’un départ pour une arrivée. Une mesure qui figure d'ailleurs dans le programme d'Emmanuel Macron.
Autre contrainte supplémentaire : pour obtenir un premier conventionnement partout en France, les jeunes confrères devront avoir exercé au moins six mois dans un désert, en remplacement ou en salariat.
Délégation de tâches
Alors qu’une « décennie noire » s’annonce en termes de densité médicale - et que les « injections massives d'argent public » pour inciter les médecins à s’installer n’ont « pas produit les effets escomptés » - la proposition de loi mise aussi sur la délégation de tâches. Au-delà de renforcer le rôle des assistants médicaux, le texte propose d'apporter de nouvelles missions aux infirmières en pratiques avancées (IPA), « afin qu'elles puissent comporter des prescriptions soumises à prescription médicale et des prestations à prescription médicale obligatoire ». S'agissant des pharmaciens, la proposition de loi envisage que ceux situés en zones sous-denses puissent renouveler des ordonnances renouvelables périmées jusqu’à trois mois, contre un mois actuellement. Et pour les ordonnances non renouvelables, « l'article instaure une expérimentation d'une durée de trois ans pour permettre aux pharmaciens de dispenser des médicaments prescrits, quand la date de validité de celle-ci est expirée ».
« 3 900 médecins juniors dans les territoires »
Sans surprise, la proposition de loi reprend l'arlésienne de la quatrième année d’internat en médecine générale, qui crispe depuis plusieurs mois les jeunes, Une année supplémentaire pour les carabins « qui permettrait l'envoi annuel d'environ 3 900 médecins juniors dans les territoires, prioritairement dans les zones sous-denses », imagine Bruno Rojouan, à l'instar du chef de l'État. En parallèle, pour repeupler le territoire en généralistes, il propose de passer de 40 % à 50 % le minimum de places dédiées à la médecine générale à l’issue des Épreuves nationales classantes (ECN).
En contrepartie, le texte offre tout de même aux juniors une revalorisation de leurs indemnités de transport et une bourse dédiée aux lycéens issues des zones sous-denses qui souhaiteraient entamer des études de médecine. Deux propositions déjà formulées par les syndicats de jeunes. Le texte provisoire introduit également une majoration des honoraires pédagogiques des praticiens maîtres de stages, lorsqu’ils exercent en zones sous-dotées.
Déposée le 21 juin dernier, la proposition de loi n'a fait l'objet, pour l'heure, d'aucune date de travaux en commission. Mais alors que le gouvernement ne dispose que d'une majorité relative à l'Assemblée nationale, les propositions venues de la droite pourraient bénéficier d'un intérêt accru de la part de l'exécutif dans les prochains mois, a fortiori quand elles rejoignent une partie des promesses exprimées par le président de la République.
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