Faudrait-il que chaque municipalité passe par les conseils d’experts ruralistes avant de se lancer dans l’accueil de médecins généralistes ? Faudrait-il qu’internes et remplaçants se laissent entraîner dans un jeu de séduction et qu’ils cèdent aux propositions de territoires en quête absolue de médecins de famille ? Il s’agit en tout cas de cerner les motivations et les conditions d’une installation réussie…
Une ouverture d’esprit territoriale
Afin de faciliter l’accès aux soins primaires de leur population, les collectivités territoriales doivent intégrer « les notions de disponibilité, d’accessibilité, de commodité, mais aussi de capacité financière et d’acceptabilité, » explique Joy Raynaud, docteur en géographie et aménagement du territoire, spécialiste de l’accès aux soins. Elle cite ainsi un ensemble de paramètres qui crée cet espace des possibles pour cette médecine de proximité et en assurer la continuité d’accès.
Certaines territorialités sont prêtes à payer, d’autres proposent des locaux dédiés, clé en main répondant aux nouvelles normes d'accès ; on voit encore des municipalités aménager « des appartements de fonction » ou offrir des primes supplémentaires à l’installation… Mais l’intéressé ne répond pas forcément à ces appels. Les investissements sont parfois inutiles et des espaces médicaux restent vides.
En fait il s’agit de ne pas mettre la charrue avant les bœufs ! Les mentalités doivent changer et les élus doivent intégrer des facteurs nouveaux : accepter de travailler sur des bassins de population intercommunaux. Défendre les territoires et faciliter toutes les formes de déplacement pour faciliter la mobilisation des praticiens. Inclure l’idée d’équipe médicale et éviter l’isolement du généraliste. Développer les CPTS et autres intermédiaires ville/hôpital pour un meilleur maillage territorial. Cerner la mentalité et les motivations des jeunes futurs médecins et les aider à construire un assemblage qui leur convienne, du libéral, du salariat, du mixte, de l’interprofessionnel, de l’exercice partagé, de l’indépendance... Et enfin trouver comment accrocher les candidats.
Une réflexion collégiale
À travers l’exemple réussi de certains départements, on observe que leurs propositions peuvent être attractives. Ainsi le Gers ou la Vendée ont fait preuve d’initiatives innovantes. Isabelle Rivière, maire d’une commune de 3 500 habitants et vice-présidente du Conseil départemental de Vendée indique travailler « en partenariat technique avec l’ARS, l’Ordre, l’URML et un engagement politique avec les maires et intercommunalités » en vue des projets d'installation de médecins.
Elle liste ainsi des propositions concrètes initiées au niveau départemental et partagées dans différents territoires avec des élus locaux qui soutiennent les projets d’installation.
Les lycéens sont sensibilisés au métier de médecin généraliste en partenariat avec l’URML dès le lycée pour faciliter l’intégration future dans le cursus d’études de santé. Une classe préparatoire de terminale doit ouvrir à Fontenay-le-Comte. Des soirées ou week-ends d’accueil auprès d’étudiants en médecine sont organisés pour faire connaître des petits territoires. Une bourse pour l’hébergement des stagiaires de médecine générale peut être attribuée et un internat pour héberger les stagiaires est à l'étude à La Roche-sur-Yon. Par ailleurs, l’accès à la formation de maître de stage universitaire (MSU) est encouragé avec le dédommagement des frais kilométriques pour faciliter l’assiduité à ces formations. Les remplaçants sont accompagnés pour faciliter leur intégration. Les propositions de soutien logistique, financier et de mise en réseau sont quant à elles concertées au sein d’intercommunalités. Enfin, un centre départemental de santé devant accueillir dans ses locaux 3 médecins libéraux, 2 salariés et 1 vacataire doit voir le jour à Sainte-Hermine.
Soutien financier mais pas que…
Tous ces dispositifs réfléchis en concertation souvent à l’échelon départemental viennent compléter d'autres mesures comme l'aide à l'installation et au maintien des praticiens dans les zones rurales, élargies comme dans l’Essonne, où « une subvention directe aux travaux d'aménagement et besoins en équipements des locaux professionnels ».
Dans l’Aveyron cet accompagnement se poursuit au moment de l’installation « grâce à une cellule d’accueil qui facilite les contacts entre les jeunes confrères et qui développe un ensemble de relations professionnelles pour permettre aux compagnes et compagnons des médecins de trouver du travail ». Idem, le département du Gers propose également des aides spécifiques pour le conjoint dans sa recherche d'emploi.
Certaines collectivités territoriales sont prêtes à accueillir un médecin généraliste. Mais l’idée n’est pas de le faire à n’importe quel prix et surtout pas celui de la surenchère. D’ailleurs la motivation financière est rarement la préoccupation première du candidat et ce dernier souhaite pouvoir acquérir une vision à moyen terme fondée sur des valeurs d’ancrage dans un territoire et d’association à un projet médical.
A.C.
« Pour la coupe du monde, un ami a proposé quatre fois le prix » : le petit business de la revente de gardes
Temps de travail des internes : le gouvernement rappelle à l’ordre les CHU
Les doyens veulent créer un « service médical à la Nation » pour les jeunes médecins, les juniors tiquent
Banderole sexiste à l'université de Tours : ouverture d'une enquête pénale