Par une décision du 29 décembre, le Conseil d’État a donné en partie raison au collectif PASS L.AS 21 qui pointait le caractère illégal des modalités de sélection d’accès en deuxième année d’étude de médecine (et notamment les épreuves orales). Emmanuel d’Astorg, président de ce collectif de parents d’élèves, se félicite de cette victoire mais regrette que l’ensemble de la réforme créant les nouvelles filières PASS et L.AS n’ait pas été abrogée. Il presse le gouvernement de revoir sa copie le plus vite possible et à uniformiser sur tout le territoire ce système de sélection qu’il juge complètement opaque.
LE QUOTIDIEN : Par une décision du 29 décembre, le Conseil d’État vous donne raison et reconnaît que les modalités d’accès à la deuxième année d’études de médecine sont illégales. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?
Nous sommes évidemment très heureux ! C’est une victoire importante. Cette décision permet d’attester l’évidence selon laquelle cette réforme est allée trop vite, qu’elle a été mal menée et qu’elle est en conséquence mal comprise par les étudiants et par les facultés en raison de son opacité. Mais c’est une victoire amère car cette décision intervient beaucoup trop tard. Cela fait trois ans que nous alertons le gouvernement et les ministres de l’Enseignement supérieur successifs, notamment Frédérique Vidal, sur le caractère illégal de cette réforme.
Nous avons reçu beaucoup de mépris de la part des pouvoirs publics quand nous contestions les modalités d’accès à la deuxième année. Aujourd’hui, le Conseil d’État nous donne enfin raison. Toutefois, nous aurons gagné seulement lorsqu’un texte cohérent sera appliqué de manière homogène sur l’ensemble du territoire. Il est indispensable que les critères de sélection et de classement soient connus de tous les étudiants afin qu’ils puissent comprendre pourquoi ils ont échoué, le cas échéant.
Sur quels points avez-vous obtenu gain de cause ?
Le Conseil d’État s’est prononcé seulement sur une partie de la réforme. Il nous a donné gain de cause sur la partie la plus visible du texte c’est-à-dire l’admission à partir du second groupe d’épreuves, autrement dit les oraux. Actuellement, ces épreuves ne sont pas encadrées par des règles et des critères précis et la notation diffère selon les facultés et mêmes selon les jurys.
Le Conseil d’État a donc considéré que le gouvernement s’était extrait de ses responsabilités d’établir des règles claires. En revanche, notre demande de procéder à une abrogation complète de la réforme du 1er cycle n’a pas été retenue et nous persistons à penser que de nombreux éléments ne vont pas dans cette réforme. Nous sommes contre les oraux, qui sont, selon nous, trop subjectifs et opaques, et nous plaidons pour que l’exécutif reparte sur une page blanche.
À combien estimez-vous le nombre d’étudiants lésés par cette réforme ?
Ce sont au total trois générations de jeunes qui ont été sacrifiées ! Nous ne parlons donc pas de 10 ou 20 étudiants mais de plusieurs centaines de jeunes qui ont été exclus de leurs études sans comprendre vraiment pourquoi. Ils peuvent aujourd’hui se dire que le Conseil d’État reconnaît cette injustice mais cette consolation reste maigre.
Regrettez-vous l’ancien système de la PACES ?
Nous ne souhaitons pas nous focaliser sur le passé mais ce système – bien qu’imparfait et très exigeant – avait le mérite d’être clair. Les étudiants qui échouaient étaient déçus mais ils savaient pourquoi et pouvaient travailler sur leurs points faibles. Avec cette réforme, ce n’est plus le cas. Permettre à des étudiants de suivre deux cursus sous prétexte qu’ils disposeront d’un plan B en cas d’échec est un vœu pieux. On ne demande pas à un étudiant en droit ou en lettres de faire de la médecine alors pourquoi demander l’inverse aux étudiants en médecine ?
Désormais, qu’attendez-vous du gouvernement ?
Il est impératif que le gouvernement revoit sa copie le plus rapidement possible. Nous commençons à entendre la petite musique d’Agnès Firmin Le Bodo qui assure que des ajustements et des améliorations seront mis en place à la rentrée 2024 ou 2025… Les étudiants ont besoin de connaître les nouvelles modalités dès cette année. De notre côté, nous commençons déjà à avoir des messages d’étudiants et de parents qui souhaitent être fixés. « Est-ce que les oraux vont être aménagés dès cette année ? Vont-ils être retirés ? » Nous ne savons pas quoi leur répondre ! C’est le devoir du gouvernement de le faire, ils le doivent à ces jeunes et nous y serons vigilants. Pour résumer, nous appelons le gouvernement à ce qu’il retrouve du bon sens et de la clarté dans les études de médecine.
Le mal n’est-il pas déjà fait ?
Si, et ce mal est profond pour trois générations de jeunes et pour le système de santé français. Cela a accentué les départs des étudiants vers l’étranger – en Belgique en Espagne et en Roumanie pour les études médicales — et au Portugal pour le dentaire. Face au manque de médecins, cela n’est vraiment pas une bonne nouvelle.
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