Vous arrivez à la tête du Snemg dans une période de polémique autour de la maîtrise de stage. Est-ce votre dossier prioritaire aujourd’hui ?
Dr Philippe Serayet : Dans cette période préélectorale, nous allons surtout nous concentrer sur ce sujet de la maîtrise de stage. En plus du décret du 22 décembre, l’ANDPC a décidé, avec un zèle inadapté, d’appliquer la loi de manière autoritaire. Elle vient de retirer l’agrément de dix formations programmées en mars. Cela veut dire que 200 maîtres de stage ne pourront pas accueillir des étudiants en deuxième et troisième cycles à partir du mois de mai. Certains terrains de stage ne pourront donc pas être pourvus. Ces formations doivent normalement à partir du 28 février répondre aux nouvelles règles. Mais, en pratique, comme il faut trois mois pour faire ce nouveau parcours de validation de l’agrément, ce n’est pas possible.
L’ANDPC nous coupe l’herbe sous le pied de manière autoritaire, brutale et maltraitante.
Quelles conséquences aura cet arrêté sur la formation des MSU ?
Dr P. S. : L'arrêté dans son ensemble va impacter la qualité de la formation des MSU. Nous allons passer de six jours de formation à dix heures. Cela concerne tout le monde car si nous ne sommes pas en mesure de former les médecins de manière qualitative et sereine, cela va se répercuter sur la démographie médicale.
La maîtrise de stage est présentée comme un des leviers principaux pour lutter contre la désertification médicale. Les récentes mesures vont-elles à rebours de ce discours ?
Dr P. S. : Ce qui se passe actuellement est extrêmement grave. Depuis 20 ans, il n’y a eu aucune mesure aussi antidémographique pour les médecins. Cette politique contredit complètement les engagements du gouvernement et du président de la République sur la maîtrise de stage. Ils y sont favorables sur le principe mais leurs décisions sont antinomiques. La formation des maîtres de stage est et doit rester le nerf de la guerre pour lutter contre les déserts médicaux. Moi, je suis installé à Remoulins, près du pont du Gard, et, en quelques années, grâce à l’impulsion de la maîtrise de stage, en faisant venir les internes chez nous, nous avons pu monter une MSP, puis une CPTS. Maintenant, nous pouvons voir l’avenir de manière plus sereine. Les territoires denses en MSU sont repeuplés progressivement par les jeunes médecins.
Quels sont les chiffres des MSU actuellement ?
Dr P. S. : Nous déployons depuis longtemps énormément d’énergie pour relever ce défi démographique. En quelques années, nous sommes passés de 3 000 à près de 12 000 MSU. Nous avons cherché à relever la tête pour réparer les fautes politiques de ces 40 dernières années mais, aujourd’hui, nous ne supportons plus d’être maltraités de la sorte par les tutelles. Il faut nous soutenir plutôt que nous tirer dans les pattes. Le combat n’est pas fini pour la discipline mais surtout pour les Français car je n’en fais pas un enjeu corporatiste mais sociétal.
Au-delà de la dimension quantitative, l’objectif est aussi de faire évoluer la formation des MSU pour améliorer l’accueil des étudiants ?
Dr P. S. : Effectivement, notre souci est aussi d’améliorer l’accueil des étudiants et la charte des MSU récemment signée avec le syndicat des internes, l'Isnar-IMG, va dans ce sens. Dans ma faculté, à Montpellier-Nîmes, la doyenne a même décidé de prendre cette charte en exemple pour l’appliquer dans les services hospitaliers. Cela montre bien qu’il faut aller dans ce sens-là. Il faut protéger nos étudiants, il y a beaucoup trop de mal-être. Nous avons besoin de mettre des règles éthiques de bonnes pratiques chez tous les formateurs. Nous avons une responsabilité. Dans l’aspect positif de ce décret, on peut donc malgré tout souligner qu’il comporte des évolutions intéressantes en ce sens.
Le Dr Philippe Serayet, 55 ans, est installé dans une MSP de Remoulins (Gard) depuis 2000. Il est MSU depuis 2003 et maître de conférences associé au département universitaire de médecine générale de Montpellier-Nîmes depuis 2012.
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