« Penser les prochaines réformes des études de santé et le contenu des formations en évaluant leur impact sur la qualité de vie des étudiants en santé, expliquer clairement dès le lycée les parcours universitaires des métiers de la santé pour éviter les déceptions et les abandons. » Telle est la première recommandation, significative, du rapport sur la qualité de vie des étudiants en santé (QVES), que l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (Igésr) viennent de publier. Une façon de souligner que la qualité de vie des étudiants a sans doute été trop négligée dans le tourbillon des réformes récentes qui ont bousculé les études de santé à tous les cycles…
Violences sexuelles, RPS, précarité
La QVES est devenue un sujet majeur de préoccupation ces dernières années, aussi bien dans les universités et les instituts de formation que sur les terrains de stage, en particulier les établissements de santé.
Certains chiffres sont édifiants. Sur le seul volet des violences sexistes et sexuelles, selon une enquête des étudiants en médecine (Anemf) publiée en mars 2021 et citée par les inspecteurs, 32 % des carabins disaient avoir été victimes de harcèlement sexuel dans le cadre universitaire, surtout de la part d’autres étudiants. Plus de 15 % déclaraient avoir subi des agressions sexuelles dans leur vie universitaire. Et 2,7 % des répondants rapportaient avoir été violés. Des chiffres similaires sont constatés en milieu hospitalier (39 % des étudiants ayant signalé des remarques sexistes, 30 % avoir été victimes de harcèlement sexuel).
D'autres données documentent la prévalence et la croissance des risques psychosociaux (RPS) chez les étudiants en santé. La précarité financière, aggravée par la crise, les conditions de travail en stage et les addictions sont trois autres facteurs du mal-être de ces étudiants en santé.
Des chefs de service mieux formés ?
Dans ce contexte, les inspecteurs préconisent d'abord de s’appuyer sur le Centre national d’appui à la qualité de vie des étudiants en santé (CNA), plateforme nationale d’orientation et d’écoute qui dispose désormais de référents territoriaux – psychologues et assistantes sociales – spécialement formés. L’Igas et l’Igesr proposent de rendre obligatoire « la désignation d’au moins un référent CNAES local par université et par CHU » pour les filières sélectives (MMOP, médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie) et au moins un référent par filière paramédicale. L’objectif est de se doter d’outils permettant d'harmoniser les dispositifs et procédures d’écoute, accessibles aux étudiants en santé, et d'en faire une publicité importante auprès de ces derniers.
Sur le front des bonnes pratiques, il est recommandé de « rendre obligatoire » une formation à la QVES et au management des étudiants pour les chefs de service encadrants et les maîtres de stage. Ces engagements pourraient être inscrits dans une charte enseignants/étudiants/encadrants, annexée aux conventions de stage. La mise en place de procédures de repérage et d’accompagnement des étudiants en difficulté est préconisée.
Toujours pour faciliter l'accueil, la mission recommande d'instaurer systématiquement la tenue d'« une journée d'accueil par an » pour tous les étudiants et stagiaires, la fourniture d'un guide (vademecum du carabin, contacts, ressources, etc.), sans oublier des « temps de convivialité et de partage inter filières » dans les universités et les hôpitaux.
Respect des horaires et de la séniorisation des gardes
La mission insiste ensuite sur la nécessité de veiller au respect des obligations réglementaires « en matière d'horaires et de séniorisation des gardes » – de nombreuses études ayant montré les dérives récurrentes dans ce domaine subies par les internes. Un référentiel commun pourrait permettre de valoriser et partager les bonnes pratiques des services.
Au chapitre de la prévention, les inspecteurs suggèrent l’adoption d’un plan impactant structuré contre les addictions (Pisa), spécifiquement destiné aux étudiants en santé. Ces derniers devraient être incités à « désigner un médecin traitant dans la localité de leur résidence d’études ».
Beaucoup de chemin reste à parcourir. Malgré la mobilisation croissante du monde universitaire et hospitalier, « étudiants, encadrants ou enseignants n’ont souvent pas connaissance des interlocuteurs pouvant les aider, les accompagner et leur proposer des solutions », déplore la mission. D'où la nécessité, selon elle, d’agir simultanément sur la qualité de vie des étudiants en santé, l'attractivité des métiers de santé et la qualité de vie au travail à l’hôpital, afin d’engager une « dynamique vertueuse ».
L’arsenal de mesures adoptées pourrait faire l’objet, au moins une fois par an, d’un bilan national autour d'« indicateurs simples et signifiants ». Quitte à les réviser en fonction des résultats et des évolutions de terrain.
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