Entre 2010 et 2022, 626 gynécologues médicaux ont arrêté d’exercer, selon l’Ordre des médecins. Et la pyramide des âges reste très préoccupante, alors que 60 % des praticiens de cette spécialité ont plus de 60 ans. En 2021, plus de 150 gynécologues médicaux ont cessé leur activité. Dans ce contexte, les 87 postes proposés chaque année à l'internat ne suffiront pas à combler ces départs, alerte la Dr Isabelle Héron, gynécologue à Rouen et présidente de la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM).
LE QUOTIDIEN : Pourquoi alerter à nouveau aujourd'hui sur la baisse des effectifs en gynécologie médicale et l'urgence d'assurer la relève ?
Dr ISABELLE HÉRON : Il faut absolument augmenter le nombre de postes d’internes en gynécologie médicale car, aujourd’hui, il n’est pas suffisant pour répondre aux besoins de santé des femmes. La majorité des gynécologues ont plus de 60 ans, beaucoup partent à la retraite… Il faudrait former au moins 120 internes par an pour couvrir ces besoins.
J’avais déjà écrit un premier courrier à Olivier Véran lorsqu'il était ministre, resté sans réponse. Désormais, j’interpelle François Braun sur les problématiques démographiques de notre spécialité. Depuis 2003 et la création du DES de gynécologie médicale, nous avons dû militer pour défendre la gynécologie et alerter les gouvernements sur la pénurie à venir.
Êtes-vous inquiète pour la qualité des soins ?
Oui, ça nous inquiète beaucoup. La gynécologie médicale se situe à la frontière de nombreuses problématiques qui touchent la femme, à tout âge de la vie. Le dépistage peut être fait par les sages-femmes mais si, ensuite, il n’y a pas suffisamment de médecins pour prendre en charge les pathologies – ou si les délais de rendez-vous sont trop longs – je crains qu’il y ait des retards de diagnostic ou de prise en charge. Nous ne sommes pas assez nombreuses pour prendre en charge les urgences. Et l’accès aux gynécologues est parfois très difficile dans certains territoires.
Pourtant, la gynécologie médicale est une spécialité très attractive pour les jeunes. Il faut que nous arrivions à trouver davantage de terrains de stage en ville car les internes sont très demandeurs d’exercer dans les cabinets libéraux. Ça se fait déjà depuis plusieurs années à Bordeaux, à Rouen ou Nancy.
Comment expliquez-vous l'absence de réponses de l’exécutif ?
Ça fait 20 ans qu’on sonne l’alarme sur le fait qu’il n’y a pas assez de gynécologues ! Actuellement, ce qui préoccupe le gouvernement, c’est le manque de généralistes. Mais c’est assez paradoxal, car on parle très souvent de la santé de la femme. Peut-être qu’avec les sages-femmes, le gouvernement se dit que les patientes sont correctement suivies mais c’est une erreur, car les sages-femmes ont besoin d’orienter les patientes pour les prises en charge pathologiques.
Désormais, il y a des femmes avec des cancers du sein qui n’arrivent à trouver ni un gynécologue, ni un généraliste. C’est une forme de maltraitance pour les femmes. Nous nous battons pour que toutes les femmes, quel que soit leur niveau socio-économique ou leur situation géographique, puissent bénéficier d’un suivi gynécologique régulier et de qualité.
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