PIERRE-YVES Gallard fait partie d’une espèce en voie de disparition : le chirurgien général. Un spécialiste tel qu’on en rencontrait en province ou en banlieue, à qui les médecins locaux adressent leurs patients de confiance, même s’il n’est pas hyperspécialisé. Probablement parce que, comme il l’exprime : « Je ne fais que ce que je sais faire. Je n’ai jamais hésité à passer la main. »
L’internat de Paris en poche en 1968, « je n’avais de vocation hospitalière, je me voyais plutôt opérant des patients en province, aidant les gens. La seule distinction entre les formations était le " dur " ou le " mou ". » Ses choix de stages le dirigent donc dans des services de chirurgie générale, ainsi qu’il s’en rencontrait dans les années 1970. Mais aussi vers le thoracique, le digestif ou la gynécologie. « Dans tous les services nous assurions les urgences : accidents de la route, occlusions, ulcères perforés… Mais aussi les fausses couches ou les fractures du col du fémur… »
Son clinicat achevé, Pierre-Yves Gallard tente donc, comme il l’avait décidé, une installation en province. « L’idée de la chirurgie spécialisée, au début des années 1970, commençait à poindre et je n’ai pu m’installer. " Si vous voulez faire du digestif, c’est parfait, mais vous ne ferez rien d’autre " me disait-on. » Et c’est ainsi que, par hasard, il entame sa carrière dans une clinique à Bondy, en banlieue parisienne. « J’y ai fait un remplacement… Et j’y suis resté 20 ans. J’y ai pratiqué la chirurgie que je souhaitais faire, de la gynécologie, du digestif, de l’urologie et de l’orthopédie (réductions de fractures, plâtres). » Si l’équipe n’était pas hyperpointue comme celles qui existent maintenant, la sienne fondée sur la bonne entente, la cohésion, la qualité, le professionnalisme a toujours obtenu des résultats très satisfaisants. « Notre possibilité d’éclectisme renforçait, à mon avis, la sécurité des patients, par l’habitude que nous avions de la technique des diverses interventions. »
Quand on l’interroge sur la montée progressive de la surspécialisation, il confirme l’avoir ressentie, ne serait-ce que par l’arrivée de la lithotripsie ou de la cliochirurgie, à laquelle il s’est formé. « Mais le souci de se limiter à un champ assez restreint d’activité me paraît plus récent. »
La chirurgie générale de toute façon ne pouvait que disparaître au moins pour trois raisons, à ses yeux. Tout d’abord, avec l’arrivée de nouveaux instruments (endoscopie, cliochirurgie, laser…), il ne sera plus possible d’être performant partout. Sans négliger l’éclatement de l’activité interventionnelle avec certains actes qui relèvent de plusieurs disciplines, comme la vertébroplastie que pourraient réaliser des neurochirurgiens, des orthopédistes ou des radiologues interventionnels. Ensuite, les établissements de soins y ont un intérêt financer. En recrutant des experts, des hyperspécialistes, ils attirent les patients. Lesquels patients, et c’est le troisième point, y voient aussi leur intérêt en demandant le service le plus compétent pour la pathologie dont ils souffrent.
« Malheureusement les chirurgiens seront de plus en plus formés à une technique et de moins en moins à la clinique. Que feront les spécialistes de la chirurgie du canal carpien si un traitement non invasif vraiment efficace arrive ? ».
Le Dr Pierre-Yves Gallard a cessé son activité voici quelques mois. Il est également président du « Sou Médical » et de l’association la « Prévention Médicale »
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