Ce n'est pas une mince affaire mais elle prend forme.
Missionnés cet été par les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur, après le fiasco des ECNi 2017, le Pr Jean-Luc Dubois-Randé, président de la conférence des doyens de médecine, et Quentin Hennion-Imbault, ex-représentant de l'ANEMF (Association nationale des étudiants en médecine de France), s'apprêtent à proposer une évolution profonde du deuxième cycle et de l'accès au troisième cycle des études médicales. « On a une occasion unique de faire bouger les lignes », a annoncé le Pr Dubois-Randé, lors des journées de rentrée de l'ANEMF, à Marseille.
L'objectif affiché de cette mission est de « sortir du tout ECN », autrement dit d'en finir avec cette unique épreuve couperet ultra-stressante, et de permettre à chaque étudiant de faire mûrir son projet professionnel dès la deuxième année jusqu'à la sixième.
Déconstruire les clichés
Le constat est partagé par les étudiants et les doyens. Les carabins ingurgitent une masse de connaissances dont ils n'auront pas l'utilité au cours de leur carrière professionnelle. Ce bachotage systématique anxiogène – préparatoire aux ECN – nuit aux apprentissages en stage, souvent délaissés, et fait obstacle à des expériences individuelles enrichissantes (investissement associatif, recherche, mobilité, etc.).
De surcroît, le classement final aux ECN, très peu discriminant, reste source de frustration et brise certains projets professionnels. Pour le président de la conférence des doyens et l'ex-représentant des jeunes, ce système est à bout de souffle. « La perte de sens pendant les études revient souvent auprès des étudiants car ce qu'on fait lors de l'externat, ce n'est pas ce qu'on a imaginé », complète Quentin Hennion-Imbault.
Le pari de la réforme est de mieux accompagner la construction d'un projet professionnel. Dans leur esquisse, les deux experts prévoient de faire découvrir aux carabins, dès la deuxième année, l'ensemble des spécialités et des métiers liés à la santé afin de déconstruire tous les clichés. En troisième année, les jeunes effectueraient des stages en dehors de l'hôpital pour appréhender la diversité des modes d'exercice et des pratiques (libéral, recherche, management…). « Mieux connaître les terrains permettra de nourrir des idées chez les étudiants », résume le Pr Dubois-Randé.
Un système de classe inversée
L'acquisition des savoirs théoriques devrait être repensée, l'objectif étant de « réduire le référentiel de connaissances » pour apprendre les incontournables. « On ne veut plus de ce gros gâteau de connaissances qui sert uniquement à vous départager lors des ECN. Ça ne fonctionne pas », tranche le Pr Dubois-Randé.
Côté méthode, les deux experts suggèrent d'intégrer des MOOC au cursus (cours en ligne ouverts à tous) et de diminuer la part de cours magistraux. Avec ce modèle de classe inversée, les étudiants arriveraient en amphi pour échanger avec les professeurs sur ce qu'ils ont déjà appris chez eux.
L'acquisition des compétences cliniques au cours du second cycle se ferait au fil de l'eau, autour de plusieurs référentiels. Les évaluations en stage seraient systématiques. Pour mieux accompagner les enseignants et carabins, un portfolio serait requis pour suivre les choix de parcours de l'étudiant (double cursus par exemple) ainsi que les connaissances et compétences assimilées. La mission prévoit en parallèle des autoévaluations pour mieux orienter les élèves dans leur projet professionnel. La dernière année du second cycle serait consacrée à « des mises en situation pour asseoir son ou ses choix de spécialités », précise le président de la conférence des doyens.
Le « matching » à la place des ECN ?
C'est la plus grande nouveauté à l'étude et qui sera surtout la plus discutée : la suppression des ECN actuelles au profit d'un nouveau système de « matching » entre les étudiants et les postes d'internes. Ce schéma permettrait de mettre en rapport les profils personnalisés des carabins avec les postes proposés, précise Quentin Hennion-Imbault. Le score associé serait fondé sur plusieurs critères : connaissances, compétences mais aussi parcours personnel de l'étudiant (engagement humanitaire, initiatives, double cursus, vie associative, etc.). Il permettrait de vérifier si le profil de l'étudiant peut ainsi « coller » avec un groupe de spécialité de l'internat ou un poste dans une spécialité.
Rien n'est gravé dans le marbre. Les deux experts doivent rendre leur copie sur le second cycle courant décembre.
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