Asthme « sévère » : une prise en charge personnalisée

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Publié le 17/09/2021
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Le diagnostic d’asthme sévère est complexe chez l’enfant. Souvent, il s’agit plutôt d’un asthme « difficile à traiter », à cause d’une mauvaise observance. La stratégie Smart peut alors être utile. Dans d’autres cas, après phénotypage, une biothérapie adaptée pourra être proposée.
Pour plusieurs traitements, les données probantes font encore défaut chez les moins de 11 ans

Pour plusieurs traitements, les données probantes font encore défaut chez les moins de 11 ans
Crédit photo : phanie

« Les enfants âgés de 6 à 16 ans avec un diagnostic confirmé d’asthme qui présentent des symptômes persistants (≥ 3 jours/semaine) et/ou des exacerbations répétées malgré un traitement de fond à doses fortes bien suivi, ont un asthme sévère problématique », a expliqué la Pr Sejal Saglani (Royaume-Uni). Une évaluation approfondie est alors nécessaire. Dans près de 80 % des cas, ce sont des facteurs modifiables (adhésion au traitement, observance thérapeutique ou facteurs psychosociaux) qui sont en cause dans l’échec de contrôle de l’asthme. Dans 48 % des cas, il existe un problème dans le choix du médicament et dans 60 % des cas, il s’agit d’un problème de manque d’investigations (1).

L’asthme sévère chez l’enfant est moins fréquent que l’asthme difficile à traiter. Avant d’envisager de débuter une biothérapie, il est donc nécessaire d’éliminer les diagnostics différentiels.

Les approches favorisant l’observance

« Plusieurs approches récentes permettent d’aider à améliorer l’observance. Parmi elles, l’association fluticasone furoate/vilantérol, qui s’administre une fois par jour, recommandée par le Gina (Global initiative for asthma) comme option de traitement au palier 3 et autorisée en Europe pour les enfants de plus de 12 ans », a rappelé la Pr Saglani. Une étude récente a montré un bénéfice, en termes de fréquentation des services d’urgence et d’utilisation des corticoïdes oraux (2).

Une autre option de traitement est la stratégie Smart (single maintenance and relief therapy) par budésonide-formotérol, par exemple, associant un corticoïde inhalé et un bêta 2-agoniste à action prolongée et rapide. Cela permet d’utiliser le même inhalateur en prise quotidienne pour traiter l’inflammation des voies respiratoires et soulager les symptômes intermittents. Cette stratégie offre ainsi à la fois la possibilité d’un traitement de fond et d’un traitement de secours dès la survenue ou l’intensification des symptômes. Cette option de traitement est recommandée pour les enfants de 6 à 11ans aux stades Gina 3 et 4. Une analyse post-hoc des études Sygma 1 et 2, chez des patients âgés de 12 ans ou plus souffrant d’asthme léger, a montré l’efficacité de cette association pour réduire le risque d’exacerbations (3). « Il existe de solides arguments en faveur de l’utilisation de la stratégie Smart chez les enfants et adolescents ayant un mauvais contrôle de l’asthme et des problèmes d’observance. Cependant, les études incluant des enfants de 6 à 11 ans manquent et sont nécessaires de toute urgence », a souligné la Pr Saglani.

Biothérapies : pas d’extrapolation hâtive

Grâce à une meilleure compréhension du rôle de l’inflammation de type 2 dans l’asthme allergique, des biothérapies ciblées ont été développées chez l’adulte et sont aujourd’hui disponibles chez l’enfant présentant un asthme sévère. L’omalizumab (anti-Ig E) est recommandé chez les enfants à partir de l’âge de 6 ans (environ 60 % d’entre eux sont éligibles à ce traitement). « Mais peut-on extrapoler les biomarqueurs, utilisés chez les adultes, aux enfants ? », s’est interrogée la Pr Saglani. L’omalizumab entraînerait une réduction de 52 % des exacerbations. Le mépolizumab (anti-IL5) est également autorisé chez les enfants à partir de l’âge de 6 ans, avec seulement des données sur l’innocuité.

Les éléments de preuves d’efficacité chez les enfants restent pauvres. « Les études d’efficacité ont été menées sur un petit nombre d’enfants/adolescents d’âge supérieur à 12 ans. Il existe un besoin urgent non satisfait d’études chez les petits enfants », insiste la pneumologue.

Le dupilumab (anti-IL4R) est actuellement autorisé chez les enfants à partir de 12 ans. Dernièrement (ATS 2021, Bacharier LB et al.), les résultats de l’étude de phase III Voyage chez l’enfant (6-11 ans) ayant un asthme modéré à sévère non contrôlé ont été présentés. Les données d’efficacité et de tolérance sont comparables à celles des études réalisées chez l’adulte et l’adolescent. Le dupilumab a permis une diminution significative des exacerbations ainsi qu’une amélioration de la fonction pulmonaire et du contrôle de l’asthme.

Communication de la Pr Sejal Saglani : « Personalized treatments for severe asthma »

(1)  Cook J et al. J Asthma Allergy 2017 ;10 :123-30

(2)  Langley RJ et al. J Asthma 2021 ; 58(4) :512-3

(3)  Redder H et al. JACI Pract 2021; Apr 6

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin