Se définissant par un taux de polynucléaires neutrophiles inférieur à 1,5 g/l, les neutropénies chroniques sévères sont en pratique rarement explorées au-delà de 1 g/l. Par contre, un bilan avant trois mois est nécessaire en cas de complications infectieuses, d’autres anomalies de l’hémogramme ou de comorbidités. En France, environ un million de personnes présentent une neutropénie chronique, dont seulement 1000 à 2000 peuvent entraîner des complications.
Une découverte fortuite
« Certaines classifications séparent les neutropénies chroniques auto-immunes primitives et les idiopathiques chroniques de l’adulte, mais il semble préférable de les regrouper sous le terme de neutropénies immunologiques. Elles se présentent de la même façon sur le plan épidémiologique et clinique, aucune donnée objective ne peut les différencier et leur prise en charge thérapeutique est identique », explique la Dr Flore Sicre de Fontbrune, hôpital Saint-Louis (Paris). La majorité de ces neutropénies sont diagnostiquées fortuitement, très rarement à l’occasion d’infections sévères. La neutropénie chronique auto-immune est essentiellement une maladie de la femme jeune. Selon une étude danoise, la prévalence de cette pathologie rare est de 0,06 %.
Un diagnostic d’élimination
Aucun examen ne permet réellement d’affirmer le diagnostic. La mise en évidence des anticorps anti-granuleux est techniquement difficile et de nombreux négatifs et faux positifs existent : l’absence d’anticorps n’élimine pas la neutropénie auto-immune, et inversement, ils peuvent être retrouvés dans des neutropénies d’autre origine. Il s’agit donc d’un diagnostic d’élimination. Il faut d’abord exclure une neutropénie ethnique, les formes constitutionnelles, puis les secondaires d’origines très diverses.
La neutropénie ethnique est la plus fréquente des formes chroniques, avec une prévalence importante en Afrique ou au Moyen-Orient. Elle est évoquée devant une origine ethnique compatible, l’ancienneté de la symptomatologie et le caractère généralement asymptomatique. Certaines formes peuvent être très sévères. Toutefois, en l'absence de test diagnostique fiable, il ne faut pas trop rapidement écarter une autre cause de neutropénie. Quant aux formes constitutionnelles héréditaires, elles sont plus facilement diagnostiquées sur la clinique, l’anamnèse et quelques tests génétiques.
Une fois les formes ethniques et congénitales écartées, il est essentiel d’éliminer les neutropénies chroniques secondaires : médicamenteuses, associées aux hémopathies lymphoïdes, aux maladies systémiques, aux pathologies virales chroniques ou aux thyroïdites auto-immunes. Si quelques neutropénies peuvent être liées aux anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA), celles associées à des déficits immunitaires sont très rares. Le principal diagnostic différentiel reste celui des leucémies à grands lymphocytes granuleux, rares mais plus fréquentes que les neutropénies immunologiques. Elles doivent être systématiquement recherchées.
En dehors des neutropénies ethniques, le bilan comprend un frottis sanguin, un myélogramme et un caryotype (en cas de formes sévères, d’infections ou d’autres anomalies), une NFS, une électrophorèse des protéines plasmatiques, les sérologies virales (VIH, hépatite C et B), les anticorps antinucléaires, ANCA, antiantigènes nucléaires solubles (anti-SSA et anti-SSB), le facteur rhumatoïde et une biopsie de moelle osseuse si la neutropénie est profonde.
Article précédent
Myocardite : un diagnostic complexe
Article suivant
Au cœur du lupus
Pathologies du complément
Les SMS du congrès de la SNFMI
Comment repérer un syndrome démentiel ?
Identifier un phénomène de Raynaud
Myocardite : un diagnostic complexe
Distinguer les neutropénies chroniques sévères
Au cœur du lupus
Drépanocytose : les espoirs thérapeutiques d’une maladie délaissée
Reconnaître les neuropathies des petites fibres
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?