Recommandations ADA-EASD

Les pathologies cardiaques et rénales sur la sellette

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Publié le 05/11/2018
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Crédit photo : PHANIE

Les résultats d’études montrant les bénéfices de certains antidiabétiques dans la réduction de la mortalité, de l’insuffisance cardiaque ou de la progression de l’insuffisance rénale les ont rendus incontournables pour certains groupes de patients. La notion d’une atteinte cardiovasculaire (CV) ou rénale doit être envisagée très précocement dans le choix thérapeutique, ainsi que la question du surpoids ou de l’obésité, du risque d’hypoglycémie, sans négliger bien sûr le coût de ces médicaments. C’est le sens du nouveau consensus d’experts des sociétés américaine et européenne du diabète sur la prise en charge du diabète de type 2, déjà partiellement dévoilé en juin lors du congrès de l’American Diabetes Association (ADA). « Ce consensus ADA-EASD ne se fonde pas sur le niveau glycémique à atteindre ou sur la démarche à suivre pour définir des cibles individualisées, mais plutôt sur la manière d’atteindre un objectif glycémique en tenant compte des caractéristiques du patient et du nombre, de plus en plus grand, de thérapeutiques à notre disposition », a souligné d’emblée la Pr Melanie J. Davies (Royaume-Uni) lors de la présentation de ces recommandations au congrès (1).

La metformine : oui mais

Même si certains experts remettent en cause sa place, la metformine n’a pas dit son dernier mot : « Elle reste le traitement de première ligne recommandé chez pratiquement tous les DT2, sauf si elle est contre-indiquée ou mal tolérée, à condition de surveiller régulièrement la fonction rénale afin d’ajuster la dose voire de l’arrêter, et d’y associer une bonne hygiène de vie incluant la perte pondérale et l’activité physique », rappelle le Pr Peter Rossing (Danemark). C’est essentiellement dès qu’on envisage une association que les pathologies cardiovasculaires ou rénales nuancent le choix thérapeutique.

Lorsqu’il existe une pathologie athéromateuse avérée, il est recommandé de recourir aux inhibiteurs du SGLT2 (iSGLT2), si la fonction rénale le permet, ou aux agonistes du récepteur du GLP1 (arGLP1). Parmi ces derniers, le liraglutide et le sémaglutide ont fait la preuve sur ce terrain de leur bénéfice au plan CV, le premier réduisant de 13 % le critère MACE (événements CV majeurs) et de 15 % la mortalité de toute cause, le second de 26 % les MACE. L’exénatide ou le lixisenatide se sont révélés plutôt « neutres » sur ce terrain. Pour ce qui est des iSGLT2, l’empagliflozine a diminué de 38 % les décès CV et de 32 % la mortalité de toute cause. Quant à la canagliflozine, elle réduit les MACE de 14 %.

Si la cible n’est pas atteinte, on peut envisager l’association iSGLT2 et arGLP1, ou de l’un des deux avec des molécules ayant fait la preuve de leur sécurité CV : un iDPP4 (mais non associé à un arGLP1), une insuline basale, une thiazolidinedione (TZD) – les glitazones n’étant plus commercialisées en France – ou un sulfamide (SU, pour sulfonylurée).

Les iSGLT2 et arGLP1 dès la deuxième ligne

Lorsqu’il existe une insuffisance cardiaque (IC), les iSGLT2 réduisent significativement les hospitalisations pour IC (de 35 % pour l’empagliflozine, de 33 % pour la canagliflozine). En revanche, les arGLP1 n’ont pas montré de bénéfice, de même que la sitagliptine, un autre iDPP4, la saxagliptine, étant plutôt défavorable sur le risque d’IC ou d’hospitalisation. En cas d’IC, les iSGLT2 ont donc la préférence, et s’ils sont mal tolérés ou contre-indiqués on optera pour un arGLP1.

S’il faut intensifier le traitement, les TZD sont contre-indiquées, et on utilisera des molécules ayant montré leur tolérance cardiaque, comme les iDPP4 (sauf la saxagliptine, et non associés à un aGLP1), l’insuline basale ou un sulfamide.

La stratégie est identique en cas d’insuffisance rénale, iSGLT2 et arGLP1 ayant prouvé leur impact sur la survenue ou la progression de la maladie rénale. Les iDPP4 sont bien tolérés sur le plan rénal, avec une diminution modeste de l’albuminurie.

Les experts insistent aussi sur le fait que lorsqu’un patient requiert un traitement injectable pour un contrôle glycémique plus strict il vaut mieux utiliser un arGLP1 que l’insuline.

Limiter les hypoglycémies et la prise de poids

Chez une personne à risque d’hypoglycémie, on préfère prescrire un iDPP4, un arGLP1, un iSGLT2 ou une TZD, qui peuvent être associés entre eux en bi- ou trithérapie, pour atteindre la cible. En cas d’échec, on peut envisager une SU de dernière génération ou une insuline basale générant le moins d’hypoglycémie.

Pour limiter la prise de poids ou en favoriser la perte, il est conseillé de prescrire un aGLP1, efficace dans la réduction pondérale, ou un iSGLT2, voire leur association. Mais, si l’un des deux est mal toléré ou contre-indiqué, ou encore dans le cadre d’une trithérapie, on peut soit associer un iDPP4, neutre sur le plan pondéral, au SGLT2, soit associer avec prudence une SU, une TZD ou une insuline basale à l’arGLP1.

Session « Management of hyperglycaemia in type 2 diabetes: ADA-EASD Consensus Report 2018 » 

(1) Davies MJ et al. Management of hyperglycemia in type 2 diabetes, 2018. A consensus report by the American Diabetes Association (ADA) and the European Association for the Study of Diabetes (EASD). Diabetes Care. 2018 Oct 4. DOI : 10.2337/dci18-0033

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin: 9699