Quand les associations participent à l'amélioration de la prise en charge des jeunes patients

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Publié le 14/02/2019
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princesse margot

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« En lançant Princesse Margot suite au décès de ma fille, je voulais lui rendre hommage, mais aussi me servir de mon expérience dans cette épreuve pour améliorer le parcours des enfants atteints de cancer et de leurs familles », raconte Muriel Hattab, Présidente de Princesse Margot. Comme cette dernière, de nombreuses associations représentant les patients atteints de cancer et leurs familles, nées d’une histoire particulière et personnelle, poussent les portes des services d’oncologie pédiatrique et engagent le dialogue avec les professionnels de santé. Leur objectif ? Améliorer les pratiques au bénéfice d’un parcours de soins englobant tous les aspects de la prise en charge, de l’amélioration de la qualité de vie au quotidien au devenir des patients guéris.

Une démarche d'amélioration de la qualité de vie

« Les médecins n’ont pas le temps de réfléchir aux questions de la qualité de vie au quotidien, observe Muriel Hattab, présidente de l’association Princesse Margot. Nous cherchons à les alerter sur les améliorations possibles ». L’association qu’elle a fondée en 2012 s’est notamment investie dans l’amélioration de la qualité et de la présentation des repas servis aux jeunes hospitalisés, au sein de l’hôpital Saint-Louis à Paris, avec le chef cuisinier Grégory Cohen. « Nous avons eu le feu vert du chef de service tout de suite, mais ensuite il a fallu être patient pour la mise en œuvre, raconte Muriel Hattab. L’initiative s’est heurtée à quelques réticences. Certaines aides soignantes ont d’abord vécu l’introduction de vaisselle en remplacement des barquettes en plastique comme une contrainte supplémentaire dans leur planning chargé ».

Les associations s’engagent ainsi dans un dialogue permanent avec les services d’oncologie pédiatrique. L’ambition est de proposer des pistes de prise en compte de problématiques, qui ne sont pas toutes d’ordre médicales, mais participent à la qualité des soins. Au sein de l’Union Nationale des Associations de Parents d'Enfants atteints de Cancer ou Leucémie (UNAPECLE), un des axes de travail consiste à améliorer l’information délivrée aux patients et aux familles, dans sa forme (modalités des annonces), mais aussi dans son contenu. « Nous développons des supports de médiation de l’information pour permettre aux familles de comprendre les traitements et leurs enjeux. Dans le cas d’une inclusion dans un essai clinique, cela leur permet d’exprimer un consentement réellement éclairé », explique Catherine Vergely, présidente de l’UNAPECLE. L’Union fait collaborer l’INSERM, des parents et d’anciens patients, dans le cadre de comités de lecture, sur les protocoles de recherche clinique dans l’optique d’améliorer les informations délivrées dans les notices, voire de rendre les protocoles plus simples à suivre. « Si un protocole prévoit plusieurs examens douloureux par exemple, nous alertons sur la nécessité de les réduire », détaille Catherine Vergely.

Un dialogue au bénéfice du parcours de soins

Le dialogue entre associations et soignants porte parfois sur des questions sensibles. « Comment apprendre aux médecins à annoncer la maladie ou les soins palliatifs ?, interroge Muriel Hattab. C’est une question difficile à porter devant des médecins : la formation ne les prépare pas ou mal à affronter ces situations ». « Certaines associations font de la formation de parents qui incluent des étudiants en médecine pour apprendre le dialogue et l’écoute. Ce type d’initiatives permet aux futurs médecins d’adopter une nouvelle perspective et de changer de regard sur la relation de soins », complète Catherine Vergely.

Selon elle, la prise en charge s’améliore progressivement. Certaines pratiques évoluent en effet et démontrent une prise en considération des problématiques par les professionnels de santé. Ainsi, récemment, les spécialistes en oncologie pédiatrique de l’hôpital La Timone à Marseille ont noué un partenariat avec l’hôpital de la Miséricorde à Ajaccio pour éviter aux jeunes patients de longs déplacements dans la prise en charge du suivi de leur maladie. Les spécialistes marseillais se rendront désormais à Ajaccio pour réduire les déplacements « très pesants pour les enfants et leurs parents et coûteux pour la sécurité sociale », expliquait, en janvier dernier, à l’AFP, Nicole Spinosi du comité corse de la Ligue contre le cancer.

La prise en compte des effets sur le long terme est un autre cheval de bataille des associations de patients. Il s’agit de défendre le droit à l’oubli pour assurer les conditions d’une « guérison sociale », mais aussi d’élaborer un suivi adapté pour ces patients devenus adultes. « Un enfant qui a reçu des irradiations a un risque accru de développer un cancer de la thyroïde 20 ans plus tard, rappelle Catherine Vergely. La prévention devrait être une priorité, mais aucun financement n’est actuellement dédié à cet aspect ». Ainsi, si les pratiques évoluent, des marges de progrès existent.

Elsa Bellanger

Source : Le Quotidien du médecin: 9724