Dans les nouvelles classifications moléculaires, les cancers du sein qui ont spontanément le plus mauvais pronostic – à haut risque métastatique – sont ceux qui surexpriment l’oncoprotéine HER2, ceux qui sont « triple négatifs » et, quel que soit leur statut moléculaire, les cancers inflammatoires. Les cancers qui surexpriment HER2 et les cancers triple-négatifs représentent chacun 15 à 20 % de l’ensemble des cancers du sein, le cancer inflammatoire 5 %.
Aujourd’hui, grâce au trastuzumab, les cancers qui surexpriment HER2 ont le même pronostic que ceux qui ne surexpriment pas ce récepteur. Cet anti-HER2 se fixe sur les récepteurs HER2, inhibe sa dimérisation et donc inactive sa voie de signalisation. Il s’ensuit une lyse des cellules tumorales sur lesquelles l’anticorps s’est fixé. Actuellement, dans le cancer du sein surexprimant HER2 non métastatique, on propose une chimiothérapie néoadjuvante de 4 à 6 mois, avec généralement un taxane et du trastuzumab, puis une intervention chirurgicale, puis un traitement d’un an par le trastuzumab. Les anthracyclines ne peuvent pas être administrées avec les thérapeutiques ciblées; si elles doivent être utilisées, elles font partie d’autres protocoles. « Depuis 2 à 3 ans, souligne le Pr Marc Espié (Paris), on associe dans le traitement néo-adjuvant deux anti-HER2, afin de vaincre d’éventuels phénomènes de résistance à l’un ou l’autre produit. Des essais ont montré les réels bénéfices de cette association ».
Association efficace de deux anti-HER2.
Ainsi, les résultats de l’étude NEOSPHERE (1) ont montré que l’association du pertuzumab au trastuzumab plus doxacetel s’accompagne d’une augmentation du taux de réponses complètes, comparativement au trastuzumab plus doxacetel chez les femmes porteuses d’un cancer du sein au stade précoce surexprimant HER2. Autre exemple, dans l’essai NeoALTTO : l’association trastuzumab au lapatinib (inhibiteur des kinases HER1 et HER2) plus paclitaxel est plus efficace, en termes de réponses complètes, que le trastuzumab plus paclitaxel ou que le lapatinib plus paclitaxel, dans le traitement néo-adjuvant dans les tumeurs du sein exprimant HER2, non métastatiques, supérieures à 2 cm (2). L’essai de phase 3 GeparQuinto (3) a, quant à lui, conclu que le taux de réponses complètes était plus important avec trastuzumab et chimiothérapie (épirubicine, cyclophosphamide puis docetaxel) qu’avec lapatinib et chimiothérapie. Les auteurs recommandent donc d’associer les deux anti-HER2 à la chimiothérapie néoadjuvante.
Chimiothérapie dose-dense.
« Les cancers du sein triple négatif ne bénéficient malheureusement pas encore de thérapies ciblées efficaces, souligne le Pr Espié. La chimiothérapie est proposée de façon systématique, très précocement et reste la plupart du temps conventionnelle. À Saint-Louis, nous traitons les patientes porteuses d’un cancer du sein triple négatif par une chimiothérapie néoadjuvante "dose dense" associant du cyclophosphamide et de la 4-epidoxorubicine tous les 15 jours sur six cures. Cette chimiothérapie permet un taux de réponse histologique complète de 48 %, alors qu’avec une chimiothérapie séquentielle de type AC-T (anthracycline et cyclophosphamide) suivis d’un taxane, nous n’avons observé que 24 % de réponse complète » (4). Dans les cancers inflammatoires, une chimiothérapie première est indiquée pendant environ 6 mois avant l’intervention.
Entretien avec le Pr Marc Espié, directeur du Centre des maladies du sein, hôpital Saint-Louis, Paris.
(1) Gianni L. et al, Lancet Oncol, 2012 Jan;13(1):25-32.
(2)Baselga J. et al. Lancet 2012 Feb 18;379(9816):633-40.
(3) Untch M et al. Lancet Oncology, 2012 Febr; 13(2): 135-144.
(4) Giaccheti S et al. BR J Cancer Mar 18;110(6):1413-9.
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