L’hormonothérapie est désormais utilisée à toutes les étapes de la prise en charge du cancer de la prostate, dès le stade initial, en tant que thérapie supra-additive dans les tumeurs à risque intermédiaire ou à haut risque jusqu’au traitement de deuxième ligne du cancer de prostate métastatique. L’objectif du traitement est d’obtenir une testostéronémie la plus basse possible, car le nadir de la testostéronémie au cours de la première année de l'hormonothérapie est corrélé à la survie spécifique et à la durée de réponse au traitement hormonal.
La diversité des actions de la testostérone dans l'organisme explique l'importance des effets secondaires induits par l'hormonothérapie, effets qui doivent être bien connus car ils ont leur morbidité propre.
Les bouffées de chaleur concernent de 60 à 80 % des patients et sont responsables d’une altération de la qualité de vie. Leur impact peut être réduit notamment par le recours à des anti-androgènes non stéroïdiens et aux hormonothérapies intermittentes, comme le spécifient les recommandations européennes de 2016.
Les troubles de la sexualité sont également très fréquents, à type de baisse de la libido et de troubles de l’érection et ont un retentissement sur le couple, pas toujours exprimé. « Ils doivent être évalués par des questionnaires et il ne faut pas hésiter à faire appel aux sexologues », a insisté le Pr Michel Soulié, qui a rappelé que de nombreuses structures comportent une unité de sexologie. Les médicaments de la dysfonction érectile sont plus ou moins efficaces, et les pauses thérapeutiques sont utiles.
Consultation d'un cardiologue au moindre doute
La suppression androgénique a un retentissement métabolique très marqué, avec un risque accru de syndrome métabolique et de diabète de type 2. Une méta-analyse de 2015 (1) a mis en évidence une augmentation de 50 % des événements cardiovasculaires non fatals. Il est donc essentiel de surveiller les paramètres du syndrome métabolique et d’orienter le patient vers un cardiologue au moindre doute. « L'analyse poolée de 6 essais randomisés suggère que chez les hommes ayant des antécédents cardiovasculaires, le risque d'événement cardiovasculaire serait moindre avec les antagonistes du GnRH. Mais cette donnée reste débattue », a souligné le Pr Soulié.
Le risque thrombo-embolique est majoré par la déprivation hormonale et augmente avec sa durée. Il varie selon les différents types de traitement, et il faut donc tenir compte des antécédents lors du choix thérapeutique.
L'anémie normochrome normocytaire est fréquente, secondaire à la diminution de l'érythropoïèse. Il est donc recommandé de doser l'hémoglobine en début de traitement puis tous les 6 mois. Les fonctions hépatiques et rénales sont également à surveiller
Supplémentation en calcium et vitamine D
Les effets de l'hormonothérapie sur l'os sont bien connus et la National comprehensive cancer network (NCCN) comme la Société française de rhumatologie (SFR) préconisent la réalisation d'une ostéodensitométrie et de dosages (calcémie, phosphorémie, électrophorèse des protéines et vitamine D3) en début de traitement. Une supplémentation en calcium et vitamine D est conseillée et un traitement par bisphosphonates peut être envisagé, après avis rhumatologique, en cas d'ostéoporose préalable.
Enfin, des données récentes soulignent l'impact de l'hormonothérapie sur les fonctions cognitives et mnésiques et un surrisque potentiel de maladie d'Alzheimer. Une activité intellectuelle régulière est ainsi recommandée.
« La qualité de vie sous hormonothérapie peut être améliorée en parlant de la maladie avec le patient, en le sensibilisant sur les effets secondaires du traitement et en lui conseillent de manger sainement et de faire de l'exercice physique », a conclu le Pr Michel Soulié.
D'après la communication du Pr Michel Soulié, CHU Toulouse
(1) Bosco C et al. Eur Urol 2015;68(3):386-96
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