Choisir la biothérapie adéquate

Par
Publié le 26/05/2023
Article réservé aux abonnés
Les biothérapies ont révolutionné la prise en charge des patients atteints d’asthme sévère, ou de dermatite atopique modérée à sévère. L’offre s’étant élargie, la question du choix des molécules se pose.
Des études en vie réelle et au long cours sont nécessaires

Des études en vie réelle et au long cours sont nécessaires
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

L’arrivée des biothérapies a changé la donne pour les patients asthmatiques sévères, en permettant un contrôle efficace. Mais il s’agit d’une maladie complexe, hétérogène — dont le diagnostic n’est pas si simple, et nécessite de bien évaluer les comorbidités ainsi que les raisons du non-contrôle (mauvaise observance, difficultés d’administration des thérapies inhalées…).

Hétérogénéité de l’asthme sévère

Lors de la prescription initiale, les enjeux sont multiples : il faut diminuer ou, si possible, supprimer les exacerbations, stabiliser la fonction pulmonaire, améliorer le pronostic vital (l’asthme sévère serait responsable d’au moins 1 200 décès par an), limiter l’usage des corticoïdes oraux, améliorer la qualité de vie du patient et les symptômes au quotidien ainsi que les comorbidités (allergies, polypose nasosinusienne…).

Une fois le diagnostic d’asthme sévère posé, il convient de préciser les caractéristiques phénotypiques du patient (allergique, éosinophile, T2 ou non), préalable indispensable au traitement. Longtemps limitée aux pneumologues et dermatologues, la prescription des biothérapies est désormais ouverte des allergologues, des médecins internistes et, pour certaines molécules, aux médecins ORL et aux dermatologues. Cette ouverture est la continuité logique de la prise en charge multidisciplinaire d’une pathologie influencée par de nombreuses comorbidités.

L’éventail des biothérapies disponibles pour traiter l’asthme sévère s’est enrichi progressivement : omalizumab (anti-IgE), mépolizumab (anti-IL5), benralizumab (anti-IL5R), dupilumab (anti-IL4R) et, disponible très prochainement, le tezepelumab (anti-TSLP).

Celui-ci se fixe à la lymphopoïetine stromale thymique (TSLP), bloquant ainsi la réaction inflammatoire. Pour la première fois, cette biothérapie va s’adresser à tous les patients asthmatiques sévères, indépendamment de la présence d’une allergie ou du taux des éosinophiles dans le sang.

Arrivée des JAKi dans la DA

Côté dermatite atopique (DA), environ 10 à 15 % des patients souffrent de formes modérées à sévères. Des traitements systémiques, le plus souvent associés aux topiques, peuvent alors être proposés : immunosuppresseurs (ciclosporine, la seule à avoir une indication dans la DA) ou immunomodulateurs (méthotrexate). Des thérapies ciblées (biothérapies et inhibiteurs des janus kinases [JAKi]) ont été développées ; elles peuvent être prescrites en cas d’échec et/ou de contre-indication à la ciclosporine chez l’adulte.

Plusieurs voies immunologiques sont activées et/ou dérégulées au cours de la DA, en fonction de l’âge, de la phase aiguë ou chronique, mais aussi de la forme clinique de la maladie. Actuellement, deux biothérapies ciblant la voie Th2 ont une indication en France dans la DA : le dupilumab (chez l’adulte et l’enfant à partir de 6 ans) et le tralokinumab (anti-IL13), à partir de l’âge de 12 ans. Elles sont toutes deux administrées par voie injectable sous-cutanée toutes les deux ou quatre semaines.

Plusieurs autres molécules ciblant la voie Th2, sont en développement : le lebrizikumab (anti-IL13), le nemolizumab, le tezepelumab, le mepolizumab, etc. D’autres sont explorées : la voie Th22 (fezakinimab), la voie Th17 (secukinumab, bimekizumab), ou encore Th1 (ustekinumab).

Trois JAKi, administrés par voie orale quotidiennement, ont également obtenu l’indication dans le traitement de la DA de l’adulte modérée à sévère, en cas d’échec ou de contre-indication à la ciclosporine : le baricitinib, l’upadacitinib

(autorisé à partir de 12 ans, à demi-dose pour les enfants de moins de 30 kg), l’abrocitinib.

Par suite d’une réévaluation de l’EMA, les JAKi systémiques ne doivent être utilisés chez les patients suivants qu’en cas d’absence d’alternative thérapeutique : âgés de 65 ans ou plus, présentant un risque accru de problèmes cardiovasculaires majeurs, tabagiques et ayant un risque accru de cancers. Les JAKi doivent être maniés avec prudence chez les patients présentant des facteurs de risque thromboemboliques veineux, pour qui les doses doivent être réduites.

Actuellement, aucune recommandation ne positionne les biothérapies par rapport aux JAKi systémiques dans la DA. Des études en vie réelle et au long cours sont nécessaires, afin de permettre un positionnement de ces thérapies, actuelles et futures.

Exergue : Le tezepelumab s’adressera à tous, indépendamment de l’allergie et de l’éosinophilie

Communications de la Dr Clairelyne Dupin (Hôpital Bichat, AP-HP) et de la Pr Angèle Soria (Hôpital Tenon, AP-HP)

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin