Au lendemain de l'adoption de la loi immigration, durcie par Les Républicains (LR) à la faveur de la commission mixte paritaire (CMP), la majorité présidentielle est désormais fracturée, jusqu'au sein du gouvernement. Le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a confirmé ce mercredi son intention de quitter le gouvernement.
La question du sort de l'aide médicale d'État (AME), qui permet une prise en charge sanitaire gratuite des étrangers en situation irrégulière, est un des sujets au cœur du bras de fer et de la crise politique qui se joue. Interrogée sur ce point sur France Inter ce mercredi matin, Élisabeth Borne a affirmé qu’il « n’est pas question de supprimer l’AME ». La Première ministre défend avoir « voulu poser les choses calmement, avec méthode », notamment avec le rapport Evin-Stefanini ayant conclu que c’est un « dispositif nécessaire » et utile médicalement. « Donc, nous allons garder l’AME », confirme-t-elle. « Nous avons supprimé du texte du Sénat la mesure qui faisait disparaître l’AME au profit d’un dispositif qui ne nous convient pas », s’est-elle encore félicitée.
Et pourtant, le sort de l'AME va bel et bien se jouer à nouveau dans quelques semaines. Dans une lettre adressée au président du Sénat avant la commission mixte paritaire, la Première ministre s’est engagée noir sur blanc à mener une « réforme » de l’AME… au premier trimestre de l’année 2024. Mais quelle en sera l'ampleur ? Élisabeth Borne a simplement indiqué à Gérard Larcher avoir « demandé aux ministres concernés de préparer les évolutions réglementaires ou législatives qui permettront d’engager une réforme de l'AME », écrit-elle dans son courrier du 18 décembre. « Comme vous l’avez souhaité, les parlementaires seront pleinement associés à ces travaux », précise-t-elle. Une façon de gagner un peu de temps avant de rouvrir dès l'an prochain ce débat inflammable.
Cavalier législatif
Dans ce même courrier à Gérard Larcher, la Première ministre déclare aussi que ce dispositif de santé publique, déjà réformé en 2021, « doit régulièrement être évalué pour vérifier sa pertinence et son efficacité ». Mais elle balaye sa présence dans la loi immigration – « le Conseil constitutionnel considérera à coup sûr qu’il s’agit d’un cavalier législatif », défend-elle.
En s’appuyant sur le rapport Evin-Stefanini remis début décembre, Élisabeth Borne réfute l’argumentaire habituel de la droite, selon lequel l’AME est un « facteur d’incitation » à l’immigration irrégulière en France. Mais les propositions avancées par les deux rapporteurs, soutient-elle en même temps, « doivent permettre de mieux contrôler la mise en œuvre du dispositif, tout en assurant l’objectif de protection de la santé publique ».
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