La dernière fois qu’ils étaient descendus dans la rue, c’était en 2015. À l’époque, les médecins libéraux avaient battu le pavé pour protester contre la loi Touraine et dénoncer l’absence de hausse de tarifs depuis 2011. Les généralistes avaient fini par obtenir, dans le cadre de la convention médicale 2016, une augmentation de la consultation de 2 euros, celle-ci passant de 23 à 25 euros à partir de mai 2017.
Aujourd’hui, les médecins manifestent de nouveau leur mécontentement pour réclamer une hausse du tarif de la consultation et de meilleures conditions d’exercice.
Un collectif asyndical à la tête d’un des mouvements
Figure de proue de ce mouvement de grève ? Le collectif asyndical et apolitique Médecins pour demain, dont les débuts ont commencé sur Facebook à la faveur d’un groupe créé fin septembre et destiné à faire pression sur le gouvernement à l’aube des négociations avec la Cnam. Et ce, en réclamant le doublement du tarif de la consultation.
Réunissant 6 500 membres à la mi-octobre, la communauté, animée par une vingtaine de médecins libéraux contestataires, s’est rapidement agrandie pour compter 16 000 membres aujourd’hui.
Fin novembre, le jeune collectif a lancé à l’ensemble de la profession un appel à la mobilisation les 1er et 2 décembre. Cette première mobilisation a pris la forme d’une grève impliquant des fermetures de cabinets ainsi que des manifestations un peu partout en France.
Bataille de chiffres
D’après Médecins pour demain et les syndicats qui ont rapidement rallié la cause du collectif (l’UFML-S, la FMF et le SML), le taux de grévistes s’était, sur ces deux jours, élevé à 70-80 %. La Cnam communiquant, elle, sur une baisse d’activité d’environ 30 % chez les généralistes et sur une absence de baisse chez les spécialistes.
Devant le « peu d’avancées obtenues » lors des premières séances de négociations avec la Cnam, le mouvement de grève a été reconduit une première fois pendant les fêtes – du 26 décembre au 2 janvier – puis une nouvelle fois jusqu’au 8 janvier.
Entre Noël et le Nouvel An, l’Assurance maladie a estimé entre 5 et 10 % la baisse d’activité des généralistes. De son côté, le collectif a affirmé, lundi 2 janvier, que la mobilisation des médecins avait avoisiné les 70 % de participation.
D’après notre sondage « Prévoyez-vous de faire grève cette fin d’année ? », publié le 13 décembre dernier, vous étiez 61 % à répondre « oui ». Cette même question posée à la mi-octobre pour les journées de grève des 1er et 2 décembre avait recueilli 68 % de réponses positives. La gronde ne semble donc pas faiblir.
Fin décembre, le collectif Médecins pour demain a d’ailleurs signé sa profession de foi devant la presse. Outre la revalorisation de la consultation de base (C) à hauteur de 50 euros – revendication que Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam, a dernièrement qualifiée d’« extravagante » –, les médecins contestataires ont d’autres revendications. Parmi elles, la possibilité de cumuler des actes, la suppression des forfaits ou encore la relégalisation de la médecine foraine pour « adapter l’offre de soins aux besoins de soins ».
Des revendications parfois divergeantes
Mais ces revendications ne sont pas partagées par l’ensemble des syndicats de médecins libéraux, à l’instar du syndicat MG France ou des Généralistes-CSMF, qui ne défendent pas l’idée d’une hausse du C à 50 euros. Les Généralistes-CSMF réclament, eux, une hiérarchisation des consultations avec un acte de base à 30 euros.
Pour faire part de son ras-le-bol face à la dégradation des conditions d’exercice, le syndicat MG France, dont la seule signature* serait suffisante pour adopter la convention médicale avec la Cnam, appelle à poursuivre « les vendredis de la colère ». Ce mouvement, initié fin octobre, a été créé par les syndicats de médecins libéraux seniors (MG France, CSMF, FMF, SML) et les syndicats d’internes et de jeunes médecins (ReAGJIR, Isnar-IMG et Anemf). Son objectif ? Faire front commun contre l’ajout d’une quatrième année au DES de médecine générale, mesure adoptée dans la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2023. Sa présentation a été le point de départ d’une vaste mobilisation étudiante qui s’est étendue depuis. L’accès direct à certaines professions paramédicales, prévu dans la LFSS 2023, figure aussi parmi les revendications communes du mouvement des « vendredis de la colère », qui s’est, depuis, un peu essoufflé.
De son côté, la branche généraliste de la CSMF, déçue de l’absence d’annonce concrète de la part de l’Assurance maladie depuis le début des négociations entamées en novembre, a lancé un appel à la fermeture des cabinets médicaux les samedis matin. En revanche, le syndicat n’a pas appelé à la fermeture totale des cabinets, contrairement au collectif Médecins pour demain.
Manifestation à Paris le jeudi 5 janvier
À l’heure où nous écrivons ces lignes, jeudi 5 janvier, une manifestation, organisée par le jeune collectif, est en cours à Paris, entre le Panthéon et Ségur. L’UFML-S, la FMF et le SML font partie du cortège. Après avoir appelé à rejoindre le mouvement de grève des 1er et 2 décembre, la CSMF ne s’est pas positionnée en faveur de la manifestation du 5 janvier, tout comme MG France. Les deux syndicats n’excluent pas pour autant de durcir le ton si aucune avancée n’est obtenue lors des prochaines négociations bilatérales avec la Cnam.
Après la manifestation parisienne, une délégation de médecins a été reçue par le cabinet du ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun.
* Ayant obtenu 37 % des suffrages dans le collège généraliste lors des élections professionnelles d’avril 2021, MG France peut, à lui seul, signer la convention médicale pour le collège généraliste. Pour pouvoir signer une convention, un syndicat doit justifier 30 % de la représentation syndicale.
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