La campagne pour les élections européennes s’achève dans quelques jours, avant le scrutin du 9 juin 2024. S’il n’a été que très peu question de santé – même si cette thématique est l’une des préoccupations majeures des Français– plusieurs initiatives de libéraux ont surgi pour pousser des mesures relatives à l’indépendance, les rémunérations ou les modes d’exercice.
L’Union régionale des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux Île-de-France a organisé en ce sens une conférence de presse fin mai, avec le Dr Ludovic Toro, généraliste et président de la commission santé à la métropole du grand Paris (UDI), conseiller régional francilien en charge de la désertification médicale, et en présence également du député (LR) de Seine-et-Marne Jean-Louis Thiériot, qui porte une proposition de loi pour expérimenter l’ouverture… du secteur 2 à tous les médecins s’installant dans les zones déficitaires de la région.
Garder les étudiants en France
L’occasion pour la présidente de l’URPS ML francilienne, la Dr Valérie Briole, de souligner d’abord que la France demeure le parent pauvre de la rémunération des médecins libéraux en Europe, ce qui commande un choc d’attractivité. Le Dr Ludovic Toro, qui a mené l’enquête dans quatre autres pays « européens » (Allemagne, Belgique, Grèce et Angleterre) a observé que le défi RH est similaire sur le continent avec des praticiens généralement trop peu nombreux et vieillissants.
Face à cette situation, ces pays en situation de pénurie médicale vont chercher volontiers des praticiens ailleurs, en Malaisie et en Inde pour l’Angleterre, dans les pays de l’Est pour l’Allemagne, quitte à les former directement chez eux avant de les rapatrier. « Ce qui leur permet de résoudre la problématique du niveau médical », glisse-t-il. En France, le Dr Ludovic Toro mentionne l’initiative du maire d’Orléans, Serge Grouard, lui aussi confronté au départ à l’étranger d’étudiants en échec, qui ne revenaient pas toujours s’installer sur son territoire. Pour contrer cette fuite, il a signé un partenariat avec la faculté de Zagreb (Croatie) qui forme les étudiants en six ans, à moitié là-bas et à moitié dans la cité johannique. Le coût de la formation est en partie financé par la mairie, contre un engagement à s’installer cinq ans sur ce territoire, lequel peut être complété par une aide du département.
Le secteur 2 pour tous ?
Mais le revenu moyen des généralistes libéraux dans l’Hexagone demeure un frein face à la concurrence européenne, martèle-t-il, évoquant une consultation de référence qui avoisine les « 50 euros » dans plusieurs pays comparables – même s’il ne tient pas compte dans ce calcul des aides et forfaits versés par l’Assurance-maladie (un argument précisément avancé par la Cnam pour expliquer que l’Hexagone n’est pas à la traîne en matière de revenus moyens des généralistes).
L’élu francilien affirme de son côté qu’un infirmier anglais « touche 6 000 euros brut à l’hôpital ». Bref, selon l’URPS ML il faut à la fois valoriser l’activité mixte, plébiscitée par les nouvelles générations, et permettre à l’ensemble des médecins libéraux – y compris les généralistes – d’avoir accès à un espace de liberté tarifaire, à défaut de valoriser suffisamment les tarifs opposables. Le député LR Jean-Louis Thiériot porte précisément une PPL d’expérimentation d’ouverture du secteur 2 aux généralistes franciliens « sans coût supplémentaire pour la Sécurité sociale ».
Prévention, diplômes, financiarisation : les LDS vigilants
De son côté, l’intersyndicale les Libéraux de santé (LDS), formule une série de propositions dans le cadre des européennes. Appelant à davantage de coopération entre les États membres, les LDS suggèrent de construire des politiques communes de prévention et de lutte contre les pandémies à l’échelle de l’UE. Même ambition en matière de recherche et d’innovation, en recentrant le programme-cadre sur les nouvelles thérapies et le cancer. Une politique de souveraineté industrielle du médicament au niveau continental est également prônée par les Libéraux de santé.
Souhaitant surtout assurer « des soins de haute qualité » dans toute l’Union, l’intersyndicale veut encourager la mise à jour (et à niveau) des formations médicales initiales dans tous les pays et la relance de « cadres communs de formation », afin de mettre en place un système partagé d’évaluation régulière et indépendante dans tous les États. Dans la même veine, les LDS veulent garantir que la reconnaissance des qualifications obtenues en dehors de l’UE se fasse dans chaque État membre « selon les mêmes critères ».
Enfin, l’intersyndicale se saisit de la problématique croissante de la financiarisation de la santé pour sanctuariser l’indépendance des soignants, parfois menacée, y compris en France. Pour les LDS, préserver l’indépendance des structures de soins et des officines passe par la limitation aux « seuls praticiens de la création et la gestion des entités juridiques de droit privé autorisées à pratiquer une profession de santé » et l’obligation pour les professionnels de santé actionnaires de telles sociétés d’y exercer effectivement leur profession.
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