Sept mois tout juste après son lancement au Mans le 3 octobre, le Conseil national de la refondation (CNR) en santé se réunissait à nouveau en plénière ce 3 mai pour présenter le bilan de cette première phase.
Avec un peu plus de 250 réunions territoriales et plus de 10 000 participants dans toute la France, l’objectif était de voir comment s’y prendre pour faire vivre le CNR et surtout sa méthode dans la durée.
Car les ministres en sont persuadés : l’esprit et la méthode du CNR santé sont les bons. Comme l’a rappelé Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé dans son discours, les scepticismes étaient pourtant nombreux au lancement du CNR.
La démarche du CNR « est née de la volonté du Président de la République de sortir de ces travers que nous connaissons : l’hypercentralisation, l’uniformité parfois excessive de nos politiques publiques, la verticalité et, au final, le ressenti d’une déconnexion entre les décideurs et la réalité du terrain », a de son côté souligné le ministre de la Santé et de la Prévention François Braun.
« Tous les témoignages entendus cet après-midi me font dire que ce pari nous avons eu raison de le faire, parce que ça marche », s’est ensuite félicité le ministre.
Les 30 millions pérennisés
Il a donc confirmé ce qui avait été annoncé dans une instruction ministérielle diffusée mi-mars, les CNR territoriaux vont être pérennisés dans tous les départements. C’est aussi le sens d’une partie de la proposition de loi Valletoux qui sera examinée à l’Assemblée la semaine du 12 juin et qui, comme l’a redit François Braun ce mercredi, a le soutien du gouvernement.
L’article 1 de la PPL propose ainsi de faire des territoires de santé « l’échelon de référence de l’organisation locale de la politique de santé », avec le conseil territorial de santé (CTS) comme organe de gouvernance.
Le prolongement de ces sept premiers mois du CNR doit continuer à faire vivre la « boîte à outils », car sur la centaine de projets qui ont émergé des réunions, tous n’ont pas les mêmes niveaux de maturité, allant de l’idée à accompagner à des dispositifs déjà bien huilés.
Le ministre de la Santé a d’ailleurs annoncé que les 30 millions d’euros consacrés cette année aux initiatives du CNR dans le cadre du Fonds d’intervention régional (FIR) seraient pérennisés.

Quatre thèmes étaient au menu du CNR : l’accès à un médecin traitant, l’organisation de la permanence des soins, l’attractivité des métiers de la santé et la prévention. Et sur tous ces sujets, les ministres n’ont pas fait de grandes annonces ce mercredi 3 mai, car les solutions qui vont être mises en place ont déjà été égrenées ces derniers mois. Dans tous les domaines le ministère va donc multiplier les missions et les plans, certains déjà annoncés, d’autres à venir.
Des missions à tout va
Sur l’exercice coordonné, un tour de France des CPTS doit ainsi permettre de couvrir le territoire à 100 % d’ici la fin de l’année.
Pour atteindre l’objectif de 4 000 MSP d’ici 2027, Agnès Firmin Le Bodo a annoncé un plan d’ici l’été pour créer les conditions de ce développement. « Quelle est la MSP idéale de demain ? Elle doit prévoir le bureau pour l’assistant, mais aussi pour le stagiaire, mais également avoir une conception aux normes de transition écologique, réfléchir aux MSP à un médecin, aux MSP comme structures de lieux de stages, aux MSP spécialisées… », a-t-elle avancé, prévoyant un grand plan d’évolution et de construction des MSP.
Pour les centres de santé également, la mission confiée à l’Igas doit permettre de regarder et « d’assainir » le modèle.
Concernant l’accès aux soins, les groupes de travail du CNR ont fait émerger encore davantage la nécessité de développer le « aller vers ». Agnès Firmin Le Bodo a donc fait part de son intention de présenter fin mai un plan pour developper « le dernier kilomètre jusqu’au patient » avec par exemple les médicobus.
Une mission a aussi été confiée au Dr Philippe Denormandie, Alexandre Berkesse et à Émilie Henry chargés de faire des propositions pour le déploiement plus massif de ces nouvelles formes d’« aller vers » et pour la consolidation des activités de médiation en santé.
Un plan d'actions d'ici juin sur les assistants
De son côté, François Braun a remis en avant le dispositif lancé avec l’Assurance maladie pour trouver un médecin traitant pour tous les patients en ALD.
« Et ça marche ! J’étais en déplacement l’autre jour dans le 93 et là-bas, ils ont pris un peu d’avance et en trois mois 25 % des patients ont déjà trouvé un médecin traitant », a-t-il mis en avant.
Permettre l’accès aux soins se fera aussi en libérant du temps médical aux professionnels, à travers l’engagement du « zéro papier » dans les relations entre l’Assurance maladie et les professionnels libéraux par exemple, mais aussi avec le développement des assistants médicaux.
Agnès Firmin Le Bodo a donc annoncé que d’ici fin juin, un plan d’actions serait présenté avec l’Assurance maladie sur ce sujet.
« Un des problèmes est notamment que les médecins ne sont pas formés pour recruter. Nous proposerons d’être facilitateur sur ce sujet et pourquoi pas réfléchir à des groupements d’employeurs », a-t-elle expliqué.
La coercition c'est toujours non
Côté installation des futurs professionnels de santé, François Braun lancera dans le courant du mois une mission avec des élus pour « identifier les conditions de succès du déploiement des guichets uniques partout en France ».
Le ministre de la santé en a profité pour redire son sentiment sur les mesures de coercition. Conscient que le sujet reviendra inévitablement dans les débats à l’Assemblée il a souligné que « cette coercition n’est pas ce qui est remonté de nos échanges sur les territoires ».
« Je le dis donc avec respect, attention aux Pyrrhus de la santé, qui tout occupés à leur victoire politique, risquent de détériorer plus encore la médecine générale, cette médecine de proximité, cette première ligne de la mêlée, ce pilier que nous voulons renforcer. »
Coopération et délégation de tâches, selon la ministre déléguée aux professions de santé, c’est le sujet sur lequel « les usagers nous ont demandé d’aller plus vite ». « 20 mesures de partages de compétences existent déjà », a-t-elle rappelé.
Pouvoir se faire vacciner par un infirmier, un pharmacien ou une sage-femme, pouvoir renouveler son ordonnance auprès d’un pharmacien, faire établir un certificat de décès par une infirmière etc. pour François Braun ce sont autant de mesures qui « changent le quotidien » des Français.
Éviter les dérives sur les soins non programmés
Le sujet des soins non programmés était aussi un gros morceau du CNR santé. Au-delà des mesures dérogatoires mises en places l’été dernier, dont certaines ont été pérennisées notamment dans le règlement arbitral, François Braun avait déjà annoncé la semaine dernière une mission pour accélérer la généralisation du service d’accès aux soins (SAS).
Il a aussi dit vouloir « engager une réflexion sur le modèle à promouvoir des centres de soins non programmés, pour éviter les dérives ».
Dans les autres sujets, la prévention fera l’objet d’un premier comité de pilotage national dans les prochaines semaines pour tirer un bilan des avancées et les prochaines réformes importantes à venir.
La nouvelle feuille de route du numérique en santé 2023-2027 sera aussi présentée le 17 mai.
Une mission a aussi été lancée sur les organisations innovantes et territoriales autour de la santé des femmes et des nouveau-nés.
La commission nationale de la psychiatrie devra de son côté travailler aux solutions pour renforcer la psychiatrie et pédopsychiatrie.
Un groupe de travail spécifique pour la santé des étudiants
Côté rémunération des professionnels de santé, François Braun a fait savoir qu’il serait « attentif à ce que les partenaires conventionnels puissent, dans les prochaines semaines, échanger sur les modalités, le calendrier et les axes pour une possible reprise des négociations ». Selon lui, la rémunération des files actives et un financement par capitation devront être au menu de l’agenda des discussions.
Enfin, alors qu’Agnès Firmin Le Bodo a lancé le 30 mars son chantier sur la santé des soignants, elle a fait savoir que l’enquête avait déjà reçu plus de 50 000 réponses.
« Ce qui veut vraiment dire qu’il y a quelque chose à faire », a-t-elle souligné.
Par ailleurs, après avoir échangé avec les étudiants, elle a annoncé que la santé des jeunes médecins ferait l’objet d’un groupe de travail spécifique.
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