Aucun pays au monde n’a voté une loi comparable à celle du 4 mars 2002. Elle répond à la survenue de deux crises majeures, le Sida et le sang contaminé, et plus tard celle des infections nosocomiales. La France, après ces évènements, les protestations sociales et la tenue des États généraux décide de faire une loi. Outre les droits, elle installe un mécanisme de représentation des usagers dans les instances hospitalières et de santé publique. Alors qu’elle permet aux usagers de siéger, elle restreint ce droit aux associations agréées. Il faut répondre à cinq critères fixés par un décret en termes de représentativité, de financements, d’autorité de décision. D’où un nombre limité d’associations qui respectent ces critères. Les différentes lois qui se sont succédé n’ont cessé d’approfondir le sillon de la démocratie sanitaire, en proclamant de nouveaux droits comme le droit à l’oubli lors de la contraction d’assurances.
Puis s’est ouvert en 2014 un nouveau débat, notamment lorsque Marisol Touraine a demandé à Claire Compagnon un rapport sur la démocratie en santé, intitulé Pour un An II. Il y avait beaucoup de fruits dans la corbeille des droits, dans celle de la représentation. Mais ils étaient peu nombreux dans celle de la participation. Pendant que nous mettions en œuvre notre démocratie sanitaire à la française, d’autres pays ont avancé sur la mise en place d’une culture de la participation. Les pays anglo-saxons ont l’habitude d’appréhender les questions de santé au travers de communautés territoriales ou de groupes spécifiques en les impliquant dans la construction des solutions à mettre en place. Ce type de pratiques a également largement progressé en Afrique, en Amérique latine sous l’impulsion de la lutte contre le Sida qui avait inscrit au cœur de ses principes la participation des personnes concernées. Ce mouvement s’est implanté avec plus de difficultés en France.
Participation
Ce qui s’impose avec le rapport de Claire Compagnon, c’est l’idée de participation. Qui a eu du mal à trouver sa place dans la loi Touraine car il s’agit surtout d’influer sur les pratiques pour qu’elles soient plus participatives, plus partenariales. C’est de cette perspective dont la Haute Autorité de santé (HAS) s’est saisie en publiant récemment une recommandation sur l’engagement des usagers en santé. Ce terme d’engagement est le plus souvent utilisé dans la littérature internationale pour couvrir les modalités de participation, implication, empowerment. Notons que les sciences de l’éducation se sont emparées du sujet, bien davantage que les sciences de la santé. Avantage majeur, le terme engagement ne nécessite pas d’être traduit en français à la différence du concept d’empowerment, traduit au Québec par empouvoirement. Dans notre recommandation, on cite quelques formes qui se développent aujourd’hui comme les patients-experts, les pairs-partenaires… Mais nous en sommes encore restés aux principes et aux valeurs du partenariat participatif en santé. Il nous faut désormais mettre les mains dans le moteur. L’idée est de ne pas opposer la représentation à la participation. Mais de les combiner : la représentation pour certains, mais la participation pour tous.
Éducation thérapeutique
À la différence d’un mécanisme de représentation qui se satisfait d’une publication au Journal officiel une fois pour toutes, la participation nécessite de dire la messe régulièrement, si possible tous les jours. L’éducation thérapeutique est le seul domaine où la loi HPST a imposé la participation des usagers dans l’élaboration des programmes d’éducation thérapeutique.
Pour tout le reste, la participation qui doit tendre vers le partenariat est plutôt cadrée par des recommandations de bonne pratique. À la vérité, la recherche est surtout sous l’influence nord-américaine et plus particulièrement du Québec avec son modèle de Montréal. Très global, il n’a pas encore été expérimenté en France. Il postule une alliance entre la recherche, les opérateurs, les patients et groupes de patients et non les associations de patients, phénomène davantage présent en France. L’un des architectes de ce modèle est Vincent Dumez, un Français, aujourd’hui à la tête du Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP). Il faut se méfier pour autant du copier-coller. Ce qui est possible à Montréal ne peut être appliqué tel quel en France où l’on compte 66 millions d’habitants. Ce processus est inéluctable. En 2002, il y avait une urgence calendaire à dire le droit du fait du long déni de la voix des personnes dans le VIH-Sida. En revanche aujourd’hui, nous pouvons prendre notre temps pour une « révolution du partenariat » qui ne saurait de toute façon être imposée.
Christian Saout, président de la commission en charge du social et du médico-social de la Haute Autorité de santé
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