Il y a quelques jours de cela j’ai consulté, avec un jeune externe, un patient qui présentait une douleur au niveau de l’hypochondre droit. Compte tenu de cette anomalie clinique, je me suis empressé de demander à l’étudiant quels diagnostics il devait évoquer devant ce tableau. Ce dernier a été assez prolixe et a pu me donner les principales étiologies pouvant être responsables de cette douleur : cholécystite, pancréatite, lithiase rénale, et pathologie colique.
Outre la demande d’examens biologiques qu’il est nécessaire de réaliser dans ce contexte, je l’ai questionné sur les autres examens paracliniques utiles pour mieux appréhender cette situation. Il m’a expliqué que les recommandations préconisaient en premier lieu de prescrire une échographie abdominale (examen non invasif). C’est alors que j’ai esquissé un sourire quelque peu moqueur pour lui faire comprendre que sa réponse n’était pas adaptée. Je lui ai expliqué que l’examen de choix était en premier lieu le scanner abdominal.
Les recommandations des sociétés savantes doivent être adaptées aux réalités du terrain
Entre parole dogmatique et réalité
Ma réponse l’a quelque peu surpris car cette exploration complémentaire est assez invasive, et doit être effectuée en 2e temps selon cet étudiant. En fait je lui ai rétorqué que son raisonnement était parfait, mais qu’entre les paroles dogmatiques des maîtres, et la réalité, il y avait une grande différence. En effet actuellement dans mon secteur (je pense qu’il en est de même pour de nombreux secteurs ruraux), il est impossible d’obtenir un rendez-vous d’échographie abdominale avant deux mois. Par contre, dans la même semaine il est possible d’obtenir une place pour effectuer un scanner abdominal.
Cette « absurdité » tient essentiellement au fait que l’échographie est un geste opérateur dépendant, et de ce fait nécessite la participation d’un radiologue, ce qui n’est pas le cas du scanner qui peut être interprété à distance par un spécialiste qui peut en regarder rapidement trois ou quatre en un laps de temps très court.
Tout cela pour dire que les recommandations des sociétés savantes doivent être adaptées aux réalités du terrain.
Le médecin généraliste de demain va devenir un spécialiste expert dans de nombreux domaines !
Bien entendu de nombreux confrères nous expliquent qu’il est possible pour un médecin généraliste de se former pour devenir un échographiste assez performant. C’est très bien, mais le généraliste va devoir également devenir un expert en dermatologie, en neurologie (exemple de spécialités où le nombre de confrères est très restreint dans notre secteur).
Je suis passionné par la dermatologie, et je réalise certains actes techniques (exérèse de carcinomes notamment) normalement effectués par les collègues de cette spécialité.
Cependant je souhaite souligner que je suis un couteau suisse, et je dois être également capable d’être performant dans d’autres spécialités comme la cardiologie, la neurologie, la pédiatrie… De ce fait je ne peux pas avoir l’outrecuidance de dire que je suis dermatologue, car je n’ai pas effectué les mêmes études. Mon expertise, même si elle est assez développée, ne vaut pas celle d’un confrère pratiquant cette spécialité, ce qui est parfois stressant.
Tout cela pour dire que le champ de compétence des généralistes s’élargit, et on demande à ce professionnel de santé d’être plus performant qu’il y a 30 ans de cela. Cette situation est d’autant plus mal vécue par certains collègues, cela d’autant plus que nos organismes de tutelle ne reconnaissent pas notre rôle qui n’est pas suffisamment valorisé au plan pécuniaire, mais aussi au plan moral.
Cette modification du champ d’activité, mais aussi l’importance de notre rôle au sein de la société, doivent être mieux compris par les pouvoirs publics. En effet, compte tenu du manque important de confrères spécialistes, le généraliste devient la pierre angulaire du système de soins avec des savoirs qui doivent être de plus en plus affûtés.
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