Direction : Zuglantrov

# 2 Réveil

Publié le 16/10/2020

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Résumé : Un jeune médecin embarque à bord d’un vaisseau spatial où on ne le regarde pas d’un bon œil. Direction Zuglantrov, une planète placée en quarantaine qui a demandé de l’aide. Décollage !

Crédit photo : DR

— Eh !

J’ouvre un œil. J’ai un de ces mal de crâne en travers du front !

— Qu’est-ce tu fais dans ma remise, toi ?

L’éclairage est faible ici, et l’unique ampoule est cachée par une tignasse assez conséquente. La tignasse appartient à… bon, c’est sûrement un « quelqu’un » qui m’observe de derrière des lunettes de plongée.

— On a un clandestin ! gronde le quelqu’un.

Je sens les cheveux se hérisser sur ma tête.

— Non, non ! Je suis…

— Tu vas aller faire un tour dans l’espace, oui ! Saleté de vermine !

Et avant que je ne puisse ajouter quelque chose, il m’attrape par le col et se met à me traîner. Le souffle coupé, je n’arrive même pas à émettre un son.

— Parasites, marmonne-t-il. Vauriens.

— Sol !

J’ai des taches noires qui dansent devant les yeux, la voix me parvient à travers un brouillard très-très épais. Je ne sais pas qui vient de parler.

— Qu’est-ce tu nous fais avec notre invité ?

— Invité ? Ça traînait dans ma remise, ça !

— Lâche-le. Allez !

J’inspire un grand coup, l’air se fraie à nouveau un chemin dans mes poumons. J’inspire et me carapate aussi loin que possible du chevelu. Inspirer, inspirer, inspirer !

La capitaine s’approche alors de moi, me détaille, hausse les épaules.

— Bon, au moins, t’es en vie.

Puis, elle se tourne vers l’autre, là.

— Combien de fois faut que je te le dise, hein, Sol ? On jette pas nos invités hors du vaisseau.

— Il était dans la remise !

— Oui, c’est là qu’on lui a installé sa chambre. On en a parlé, il va rester là jusqu’à ce qu’on arrive à… à… tu vas où déjà ?

— Zug… Zuglantrov, je lui gargouille en réponse.

— Ouais, voilà, à Zuglantrov. Donc…

Elle se tourne vers l’autre qui me fixe maintenant d’un air très mauvais.

— Donc on est gentil et on le laisse en un seul morceau jusque-là. Après, tu pourras récupérer ta remise.

Elle revient vers moi. Et j’ai l’impression qu’elle est plus amusée qu’autre chose. Je ne sais pas trop, je n’ai pas encore récupéré de mon réveil en douceur.

— Bon et toi, petit, t’aurais pas pu lui expliquer calmement que t’étais un passager ?

— Moi ? je glapis. Il… il… il n’a rien voulu écouter ! Il m’a attrapé et… et il a dit qu’il allait me jeter dans l’espace et…

— Ça va, ça va. Sol est désolé. Hein que t’es désolé, Sol ?

Le chevelu grogne quelque chose qui ne ressemble absolument pas à un « oui ».

— Bien, chatonne la capitaine. Problème résolu.

Comme elle claudique hors de la cuisine, je me précipite à sa suite.

— Un souci, petit ?

— Un souci ? Je viens de me faire attaquer au réveil !

— Oh, c’est Sol, ça, tu sais. Il aime pas bien quand on met des gens dans sa remise.

— Et ? Vous pouviez pas le prévenir ?

— Sol est… disons qu’il est un peu oublieux.

— Oublieux ? Il a balancé combien de passagers par le sas ?

— Oh… pas beaucoup… vraiment une broutille…

— Combien ?

— Eh, dis, tu m’as l’air pâle. Première fois dans l’espace, hein ?

Il a suffi qu’elle en parle pour que la nausée revienne.

— Bien ce que je pensais, conclut-elle avec un sourire moqueur. Tu vas finir par t’y faire. On se fait à tout, il paraît. Tiens, viens voir, on approche de Zugwon.

— Zugwon ?

— C’est la première planète de l’alliance des Zug.

— Et Zuglantrov ?

— Ah, ça, on y est pas encore. C’est un peu un trou paumé, ton Zuglantrov. Tiens, regarde.

Elle s’arrête devant un hublot, je la rejoins.

— Tu vois le petit truc là ? C’est Zugwon.

Je fronce les sourcils. Je vois bien une planète qui tourne autour de son soleil. Enfin, non. Je la voyais jusqu’à ce qu’elle disparaisse d’un coup pour réapparaître un peu plus loin.

Prochain épisode dans notre édition du 23 octobre

Svetlana Kirilina, née en Russie, a quitté, très jeune, ce pays pour la France. Elle s'est alors mis en tête d'apprivoiser la langue par l'écriture. Elle a publié quelques romans, édités ou indépendants. Bref, elle n'a pas beaucoup dormi ces dernières années. Mais, elle a une bonne réserve de café !

Svetlana Kirilina