L’EVENEMENT - L’enquête annuelle de l’Ordre sur la permanence des soins

La PDS victime de la maîtrise comptable, déclin du volontariat

Publié le 14/02/2013
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Crédit photo : S TOUBON

PDS. Pour la 10e année consécutive, l’Ordre publie un état des lieux détaillé de la permanence des soins ambulatoire. L’édition 2013 souligne l’érosion du volontariat, la réduction significative du nombre de territoires de garde, le désengagement libéral progressif de la nuit profonde et la hausse du nombre de points fixes de garde. Surtout, l’Ordre regrette qu’une approche économique pèse sur l’organisation.

PERMANENCE DES SOINS organisée sur des territoires plus larges et moins nombreux, établissements de santé qui prennent le relais pendant la nuit profonde, nouveaux schémas (grands effecteurs mobiles sillonnant le département après minuit), déclin du volontariat...: l’enquête annuelle de l’Ordre livre un état des lieux précieux de la PDS en médecine générale en 2013. Le verdict général est préoccupant. « Cette enquête génère plus d’inquiétudes que d’optimisme sur la pérennité du dispositif actuel », conclut l’Ordre.

Il appelle l’État et les ARS à « sortir d’une vision administrative et comptable, et à déployer les moyens financiers à la hauteur des objectifs affichés ».

• Des cahiers des charges (enfin!) publiés

Prévus par la loi HPST qui a confié aux ARS l’organisation de la permanence des soins (PDS), les cahiers des charges régionaux sont presque tous publiés, sauf en Midi-Pyrénées, en PACA, en Corse et en Guadeloupe. Ils mettent en avant la nécessité de renforcer la régulation médicale pendant les horaires de la PDS, de privilégier l’accès aux points fixes de garde et de diminuer ou supprimer la présence d’effecteurs en nuit profonde.

• Des secteurs moins nombreux et plus vastes

« Désormais, la permanence des soins est organisée sur des territoires plus larges et par définition moins nombreux », explique le Dr François Simon, en charge de cette enquête à l’Ordre des médecins.

La notion de secteur de garde disparaît au profit de celle de territoire. Au-delà de cette révolution sémantique, leur nombre a considérablement décru en un an, passant de 2 267 en janvier 2012 à 1 910 un an après. « Cette baisse, de l’ordre de 16 %, est la plus importante depuis 2003 », note l’Ordre.

Certaines régions sont particulièrement concernées par cette tendance, comme la Picardie, la Bretagne ou la Lorraine. Les ARS justifient ces réductions par la faible activité constatée, ou la recherche d’économies dans le versement des astreintes. Conséquence de ces secteurs élargis, l’institution prévient que « la capacité des médecins à se déplacer sur de grands territoires fait l’objet de beaucoup d’interrogations pour la période 20H-24H mais également pour la nuit profonde ».

L’Ordre juge sévèrement l’action de pilotage des ARS en la matière. « La resectorisation est un travail permanent d’adaptation aux situations locales, note-t-il. Les ARS ne peuvent s’exonérer de ce travail de terrain en tirant des traits sur des cartes d’état-major ».

• La nuit profonde en perte de vitesse

Dans 55 % des territoires, la PDS libérale s’arrête désormais à minuit. Sept départements ont été gagnés par ce processus en 2012 (Ardennes, Loir-et-Cher, Haute-Marne, Nord, Pas-de-Calais, Sarthe, Martinique), ce qui porte à 19 ceux qui n’assurent plus la PDS à ces heures.

Les cahiers des charges de ces départements justifient l’arrêt à minuit par le faible nombre d’actes constatés. Ils soulignent la nécessité de renforcer la régulation médicale libérale à ces mêmes horaires, et d’assurer le relais avec les établissements de santé. Mais l’Ordre s’inquiète du manque de régulateurs et des incertitudes quant au financement du transport des patients vers les établissements quand ceux-ci ne sont pas en mesure de se déplacer.

Dans ces départements, certaines ARS ont mis en place une effection mobile la nuit sur des grands territoires. Avant 2012, cette forme d’organisation existait déjà, notamment en Haute-Vienne ou dans les Pays de la Loire. Depuis, elle s’est étendue aux Côtes d’Armor, à la Creuse, à l’Ille-et-Vilaine, au Morbihan, à la Vendée, et au Territoire de Belfort.

• La lente érosion du volontariat

42 % des départements connaissent une baisse du volontariat et seulement 13 % d’entre eux signalent une hausse, précise l’Ordre qui calcule qu’« en moyenne, le volontariat diminue de 3 % ». Ce lent désengagement provient à la fois « d’une démographie médicale déclinante, et de l’absence de réponse (des ARS) aux attentes en matière d’organisation et de financement ».

• Le joug comptable

L’institution juge « inquiétante la maîtrise comptable de l’enveloppe dédiée à la permanence des soins par l’État qui ne paraît pas prendre la mesure de la situation ».

Si la loi permet aux médecins remplaçants ou salariés de participer à la PDS, l’assurance-maladie n’en a tiré les conséquences que récemment. « Ces praticiens commencent à peine à disposer de feuilles de soins, regrette le rapport, et l’on ne rencontre qu’exceptionnellement des médecins salariés en PDS ambulatoire ».

• Effecteurs : des rémunérations contrastées

L’Ordre rappelle que « la loi permet aux ARS de moduler les rémunérations en fonction des contraintes géographiques et des différentes modalités d’exercice de la permanence des soins ».

• Hausse des départements qui réquisitionnent

Après la décrue des années précédentes, l’Ordre relève « une augmentation inhabituelle » du nombre de départements ayant procédé à des réquisitions (26 au lieu de 19) et parle de « lassitude des médecins débordés ». L’institution précise que « là où les carences du tableau sont les plus criantes, les Préfets n’ont pas ou peu réquisitionné, laissant en l’état des tableaux incomplets ». C’est donc sur les trous...ponctuels des tableaux de garde que les préfets ont concentré leurs tirs.

• Des sites fixes à la pelle mais...

Le nombre de points fixes de garde (maisons médicales de garde) est en augmentation de 9 % avec 369 sites dédiés. Ils couvrent 25 % des territoires de PDS, note l’Ordre qui parle d’« évolution favorable ». L’institution se déclare cependant « inquiète de la fragilité du financement de ces sites » dont « la pérennité constitue une attente forte ».

• Vent en poupe pour la régulation médicale

Le volontariat est, sur ce poste, en hausse de 6 %par rapport à l’année précédente. 2 652 médecins libéraux participent à cette régulation, effective dans 97 % des départements. « Dans 86 départements, la régulation médicale donne satisfaction aux médecins de garde », se réjouit le rapport. Leur rémunération horaire s’échelonne de 70 à 120 euros de l’heure selon la région et l’horaire.

 HENRI DE SAINT ROMAN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9218