Après une semaine de réunions « bilatérales », l'Assurance-maladie a dévoilé ce mercredi matin ses nouvelles propositions pour l'avenant n°9 à la convention, lors d'une séance en visio avec les six syndicats représentatifs des médecins libéraux (CSMF, MG France, UFML-S, Avenir Spé-Le BLOC, SML et FMF).
Accord fin juillet ?
Ce round conventionnel doit concrétiser des avancées sur six chantiers : les visites à domicile pour favoriser l'autonomie des personnes âgées ; la revalorisation ciblée de plusieurs spécialités cliniques au bas de l'échelle des revenus ; la téléconsultation et la télé expertise ; le Ségur du numérique ; les consultations handicap et dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance ; et les soins non programmés.
Souhaitant finaliser un accord avant fin juillet, la CNAM a affiné sa copie qu'elle juge aujourd'hui « ambitieuse », sans donner à ce stade « un montant global consolidé en raison des paramètres du service d'accès aux soins », explique Thomas Fatôme, directeur général de la CNAM.
120 millions pour étendre les visites à 70 euros
Pour renforcer le maintien à domicile, le nouveau projet propose d'étendre la visite longue et complexe (VL) de 70 euros (dont 10 euros de majoration de déplacement) à tous les patients de plus de 80 ans en ALD, dans la limite de trois fois par an et par patient. Aujourd'hui, cet acte majoré est réservé aux patients atteints de maladies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson, SEP, etc.) et en soins palliatifs (avec un maximum de 3 par an) et aux nouveaux patients « médecin traitant » en ALD ou âgés de plus de 80 ans vus à domicile. Cette mesure est évaluée à 120 millions d'euros.
Ce scénario est préféré « collectivement » à d'autres options consistant à revaloriser le tarif de la visite à 50 euros (dont 10 euros de MD) pour divers profils de patients : soit les patients de plus de 75 ans (dans la limite de sept fois par an), soit pour ceux de plus de 80 ans en ALD (sans limite annuelle) ou pour ceux de plus de 80 ans (dans la limite de 12 visites par an).
Un avis d'expert gonflé de 4 euros
Pour renforcer l'accès aux spécialistes dans le cadre du parcours de soins, la CNAM accepte, toujours selon ce projet, de revaloriser de quatre euros l'avis ponctuel de consultant (APC) portant cet acte à 54 euros.
Avantage : cette mesure valorisant l'expertise toucherait quasiment toutes les spécialités libérales, avec un impact variable. Le bénéfice moyen annuel atteint 3 888 euros pour un hématologue, 3 657 euros pour un gastro-entérologue, 2 986 euros pour un ORL ou encore 2558 euros pour un dermato.

De surcroît, cinq spécialités bénéficieraient de mesures spécifiques : pédiatres, psychiatres, gynécologues, endocrinologues (une nouveauté) et gériatres.
Pour les pédiatres, le nouveau forfait pédiatrique (NFP, moins de 2 ans) passerait à 9 euros (+4 euros) portant cette consultation à 36 euros. De nouvelles consultations très complexes pour les TND et DYS (dépistage des troubles du neuro-développement et troubles cognitifs spécifiques) sont instaurées. Toutes revalorisations cumulées (y compris la hausse de l'APC), un pédiatre verrait sa rémunération progresser de 7 094 euros en moyenne et par an, précise la caisse.
Concernant les psychiatres et neurologues, l'acte de base CNPSY (11,5 millions de consultations par an) passerait de 39 euros à 42,50 euros (+3,50 euros). La consultation en urgence serait cotée 2CNPSY. Sur ces bases, un psychiatre verrait sa rémunération progresser de 8 075 euros par an en moyenne (toutes mesures confondues).
Les gynécologues médicaux héritent d'une majoration spécifique de deux euros et l'ensemble des gynécos pourront associer colposcopie et consultation. Le bonus annuel atteindrait 2 774 euros dans cette spécialité (et même 5 516 euros pour les gynécologues médicaux).
La majoration spécifique des endocrinologues (MCE) augmenterait de 16 à 22 euros. La CNAM évalue l'effet moyen annuel à 6 045 euros.
Les gériatres seraient concernés directement par l'extension de la visite longue à 70 euros (pour un effet moyen estimé à 11 850 euros par an).
Au total, la revalorisation des spécialistes coûterait 140 millions d'euros au régime obligatoire.

Télé-expertise : 20 euros pour le médecin requis
Sur la téléconsultation, la CNAM propose un cadrage allégé : suppression de la consultation présentielle dans les 12 mois prédécents pour l'ensemble des spécialistes et le médecin traitant ; seuil maximal de 20 % d'activité de télémédecine ; possibilité de recourir à des téléconsultations hors du territoire en cas de besoins de soins légitimes.
Sur la télé-expertise, qui peine à trouver son rythme, toute la population y deviendrait éligible. La CNAM propose de fusionner les deux niveaux de recours pour un tarif de 20 euros pour le médecin requis. Pour le praticien requérant, le mode de rémunération serait « simplifié ». L'effort financier serait de 5 millions d'euros.
Soins non programmés : 90 euros/heure pour la régulation
Il s'agit de valoriser l'engagement des médecins qui participeront au service d'accès aux soins (SAS), l'un des dossiers prioritaires pour désengorger les urgences hospitalières en trouvant un rendez-vous rapide en ville. Dans son projet, la CNAM accepte d'aligner la rémunération des médecins régulateurs à hauteur de 90 euros brut par heure avec prise en charge des cotisations sociales (ce qui équivaut à 75 euros net).
Pour leur participation au SAS (agenda ouvert permettant la réservation en ligne ou partagé avec le régulateur, membre d'une CPTS participant au SAS, etc.), les médecins recevraient 200 points (1 400 euros) au titre du forfait structure (150 points actuels majorés de 50 points). Et pour les « effecteurs », la rémunération se ferait sur une base forfaitaire dans le cadre du forfait structure (jusqu'à 320 points par an soit 2 240 euros maximum) avec trois paliers : 10 points de 5 à 20 actes non programmés par trimestre ; 40 points de 20 à 40 actes et 80 points au-delà de 40 actes. Un calcul qui correspond à 15 euros/acte à l'entrée du palier, résume la caisse.
Ségur du numérique, du mieux
Plusieurs mesures sont programmées dans ce cadre.
Outre une subvention de 100 millions d'euros (one shot) pour accéder à une prestation complète des éditeurs en termes d'équipement (logiciel labellisé, DMP, MSS, e-prescription, INS, Pro santé connect) avec installation et maintenance, l'Assurance-maladie met 100 millions d'euros supplémentaires sur la table pour inciter les médecins aux usages concrets : remplissage initial du volet de synthèse médicale (VSM) par le médecin traitant pour les patients en ALD et incitations directes comme pour la ROSP (1 350 euros pour 50 % des VSM alimentés, 2 700 euros pour 90 % des VSM alimentés, bonus de 20 % si plus de la moitié des VSM sont structurés).
De surcroît, l'Assurance-maladie injecte 100 millions d'euros par an (en 2022 et 2023) dans le forfait structure en ajoutant introduisant deux téléservices (déclaration de grossesse et prescription de transport). Quatre indicateurs d'usage seraient ajoutés au forfait structure : alimentation du DMP pour 30 % des consultations dès 2022 ; utilisation de la messagerie sécurisée ; e-prescription et utilisation de l'appli carte Vitale (pour 5 % des feuilles de soins dématérialisées en 2023).
Selon une simulation de la CNAM, un généraliste avec 1 000 patients déclarés comme médecin traitant et 150 patients en ALD – dont 140 avec VSM alimentés et 100 structurés – pourrait toucher un forfait « VSM » de 4 040 euros à l'horizon 2023.
La CNAM a chiffré ses efforts financiers à 400 millions d'euros au titre du numérique (soit 225 millions de plus par rapport à novembre).
Handicap et aide sociale à l'enfance
Enfin, le projet valorise la prise en charge des patients vivant avec un handicap : consultation très complexe (60 euros) pour le passage d’un pédiatre traitant à un généraliste traitant pour les enfants vivant avec un handicap ; remplissage du dossier MDPH (60 euros) pour les premières demandes ; consultation « blanche » (25 euros) pour les personnes nécessitant la mise en place des consultations précitées sans examen du patient. La CNAM ouvre la possibilité de prendre la majoration de déplacement (MD) pour les médecins se déplaçant dans les structures de soins spécialisés (type Handiconsult).
Concernant les enfants qui bénéficient de l'aide sociale de l'enfance, la loi rend obligatoire le bilan de santé et de prévention pour tout mineur en entrant dans le dispositif de protection de l'enfance. Ce bilan serait rémunéré 46 euros (consultation complexe).
Quatre généralistes font vivre à tour de rôle un cabinet éphémère d’un village du Jura dépourvu de médecin
En direct du CMGF 2025
Un généraliste, c’est quoi ? Au CMGF, le nouveau référentiel métier redéfinit les contours de la profession
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur