Après plusieurs jours de débats et malgré la pression de certains syndicats de médecins libéraux, la Carmf a tranché : elle ne touchera pas à ses réserves pour venir en aide aux praticiens dont l'activité économique a été ralentie ou interrompue par la crise sanitaire. La caisse de retraite des médecins de ville a privilégié l'attribution d'une indemnité forfaitaire de 2 000 euros, nette d'impôts et de charges et sans réduction des droits à la retraite, à chacun des médecins cotisants s'appuyant notamment sur son Fonds d'action sociale et sur le régime invalidité décès.
Réserves préservées
Le Bureau de la Carmf travaillait avec le ministère depuis le 24 avril sur les possibilités d'attribution d'une nouvelle aide pour les praticiens et a acté ce nouveau coup de pouce financier le 15 mai en Conseil d'administration. « Cette somme viendra en diminution du solde de cotisation 2020, sans réduction des droits à retraite », précise la caisse. La Carmf évalue l'ensemble des aides qu'elle a mis en place depuis le début de la crise sanitaire (indemnités journalières, report des prélèvements de cotisation, suspension du calcul des majorations de retard…) à « pratiquement 8 000 € par médecin, en aides directes ou indirectes ».
L'annonce de cette nouvelle indemnité, diffusée dimanche dernier, met fin à plusieurs jours de débats. La CSMF, par l'intermédiaire de son président le Dr Jean-Paul Ortiz, avait sommé la Carmf d'attribuer aux médecins libéraux une aide de 4 000 euros, comme l'a également promis la caisse des chirurgiens-dentistes à ses cotisants, et en puisant si nécessaire dans les réserves de la caisse. Le patron de la Carmf, le Dr Thierry Lardenois, s'y était alors fermement opposé, estimant que les réserves sont « un bien inaliénable » et « sont constituées pour payer une retraite à ceux qui en ont fait l’avance, pas pour qu'on les utilise dès qu'on a un petit ennui ». La Carmf formulait également des incertitudes sur l'avenir de ces réserves, estimées à 7 milliards d'euros avant l'épidémie, du fait de la crise économique liée du Covid-19.
Les syndicats majoritairement satisfaits
Au sein des syndicats de libéraux, l'idée d'une indemnité provenant des provisions techniques de la Carmf ne faisait pas l'unanimité. Si le président de MG France le Dr Jacques Battistoni, ne s'y est pas opposé « dans la mesure où cela ne met pas en cause la retraite des générations futures », le SML et la FMF ont rejoint la Carmf dans son raisonnement. Toutefois, l'annonce d'une aide de 2 000 euros sans toucher aux réserves constituées par les médecins a été saluée par les syndicats seniors. « Il s’agit d’une aide qui permet de mobiliser la solidarité immédiate à l’intérieur de la profession sans remettre en cause la solidarité future à travers les réserves », a réagi le SML.
La FMF soutient également l'initiative de la caisse : « En mettant en place cette nouvelle aide, la Carmf aura été à l’écoute des affiliés et de nos propositions, et aura rempli son rôle de solidarité active sans mettre en péril nos futures retraites », a commenté le délégué retraites du syndicat le Dr Olivier Petit, par ailleurs premier vice-président de la Carmf. MG France valide également l'aide de la Carmf avec cependant une nuance : « Elle ne sera pas suffisante pour les médecins les plus en difficulté pour lesquels MG France demande que le Fonds d’action sociale leur prête une attention toute particulière et au cas par cas. »
La CSMF, qui avait demandé une aide doublement supérieure à la caisse est amère. Si le syndicat du Dr Jean-Paul Ortiz « se félicite d’une avancée timide », il estime que « c'est un effort très insuffisant ». « L'argent de la Carmf est l’argent des médecins, et que ce sont les cotisations de ces mêmes médecins qui lui permettent d’exister », conclut le syndicat.
Missions, consultation et diagnostic, prescription : le projet Valletoux sur la profession infirmière inquiète (déjà) les médecins
Désert médical : une commune de l’Orne passe une annonce sur Leboncoin pour trouver un généraliste
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre