Édito

Le magicien dose

Publié le 22/01/2021

Crédit photo : GARO/PHANIE

La France aurait tardé à lancer la campagne de vaccination contre le Covid-19. Par peur de froisser les très influents antivax, prétendent certains experts. Peut-être. Mais si l’on se réfère aux faits, aux chiffres des derniers jours et aux professionnels sur le terrain, le pays de Pasteur vaccine peu… car il a peu de vaccins, comme l’illustre notre reportage à Clamart. La France est confrontée à une pénurie, n’en déplaise au Pr Alain Fischer, pilote de la stratégie vaccinale, qui nous a accordé un entretien et qui réfute ce terme. Elle navigue à vue en attendant les précieuses doses qu’elle n’a pas été capable de produire, comme avec les masques et le matériel de dépistage.

Il ne faut pas se faire d’illusions, le pays ne pourra pas vacciner en un claquement de doigts tous ceux qui le souhaiteraient, comme s’y est engagé le président de la République. Cela peut s’entendre. Il est en revanche plus difficilement compréhensible que le calendrier de vaccination ait été accéléré pour permettre à un plus grand nombre de personnes de recevoir l’injection alors qu’on n’en dispose pas. Résultat : il est impossible de répondre rapidement à la promesse de vacciner les quelque 6 millions de Français de plus de 75 ans ou de personnes ayant une pathologie à risque à qui la vaccination est désormais ouverte. Et qui ne parviennent que péniblement à prendre rendez-vous.

Et la justification du ministère de la Santé de conserver des centaines de milliers de doses « par sécurité », pour « anticiper des pépins sur les approvisionnements » ou sanctuariser les vaccins nécessaires à la deuxième injection peine à convaincre. Quant à la prouesse de tirer six doses d’un flacon de Pfizer-BioNTech censé en procurer cinq, elle s’apparente à un surprenant tour de passe-passe.

Quoi qu’il en soit, après avoir piqué une première colère et demandé d’accélérer la cadence, Emmanuel Macron a enjoint son ministre de la Santé de jouer la transparence sur la répartition des vaccins. Alors que la confiance dans la vaccination revient chez les Français, un nouveau couac pourrait être préjudiciable au succès de la campagne. 

Christophe Gattuso, directeur de la rédaction

Source : Le Généraliste