Le Droit & Vous

Peut-on imaginer un organisme public qui hébergerait les dossiers informatisés des médecins ?

Publié le 15/01/2020

Besoin d’une aide juridique dans le cadre de votre activité médicale ? Les lecteurs du « Quotidien » ont soumis leurs questions aux avocats du cabinet Auché, partenaire du journal.

Dr Canet
Bonjour.
Je me permets de revenir sur un sujet maintes fois exposé ici... le devenir du dossier médical informatisé à la fermeture d'un cabinet sans successeur, ce qui est maintenant trivial. Toutes les réponses faites, sans aucun doute en adéquation avec une législation très en retard sur la transformation numérique des cabinets, laissent néanmoins « le ou les partants » dans un total désarroi juridique. Comment demander, pour un cabinet de spécialistes sur un bassin de plusieurs dizaines de milliers de patients, leur choix futur de praticien dans la spécialité ? Tous les comptes rendus de consultation du spécialiste (c'est notre cas...) sont, conformément aux textes, adressés au médecin demandeur et au médecin traitant, s'il existe... : faut-il néanmoins en garder copie ?
Dans ce cas, pour reprendre les interrogations de précédents intervenants, comment assurer la survie de ces données informatisées sur le long terme ? Il ne s'agit pas de compétences techniques, mais législatives et juridiques. Un serveur informatique, pour diverses raisons, n'a pas une durée de vie supérieure à 5 ou 6 ans. Rien ne permet d'assurer que des données conservées sur un disque dur externe puissent être réexploitées (et par qui ?, comment?) 10 ou 15 plus tard, avec l'évolution des logiciels et des incompatibilités, quoi qu'on pense des "standards" et des « normes » informatiques.
Ne pourrait-on imaginer qu'un praticien puisse confier à un organisme public, dépositaire du droit d'hébergement des données de santé, un support informatique gravé selon des normes reconnues et standardisées, lequel sera en mesure de retrouver un dossier demandé, à l'aide d'un outil informatique « valide », faisant l'objet d'une maintenance constante ? Ce serait infiniment plus sécurisé et performant que de demander à chaque praticien retraité placé dans cette situation, de garder un serveur chez lui, dont l'utilisation n'est plus concevable sans support technique (hot line).
Merci de votre avis sur ce texte, en forme d'interrogation au législateur et au Conseil de l'Ordre des médecins.
Cher Docteur,
Je partage votre avis, car en effet l’envoi de courriers aux patients pour solliciter le nom des successeurs éventuels s’avère difficilement, voire nullement, réalisable en pratique.
Au demeurant, et contrairement à ce qui est prévu pour les hôpitaux (art. R.112-7 du Code de santé publique), les médecins libéraux ne se voient pas imposer de délai impératif de conservation des dossiers médicaux.
La durée de 20 ans est seulement conseillée par le Règlement général sur la protection des données (RGPD) du 25 mai 2018, et par le Conseil de l’Ordre, aux fins de conservation de preuves dans le cas d’un litige; le délai pour agir étant de 10 ans à compter de la consolidation du dommage.
S’il ne s’agit que d’un délai « conseillé », il est néanmoins préférable de le respecter. 
Les modalités de conservation des dossiers sont précisées dans le « Guide pratique des données personnelles » en date du 20 juin 2018, rédigé conjointement par l'Ordre national des médecins et la CNIL.
Les dossier informatisés et conservés sur disques durs seront à mon sens encore lisibles.
Néanmoins, pour l’avenir, le dossier médical partagé devrait résoudre et simplifier le problème de conservation des données.
 
Très bien à vous,

Source : lequotidiendumedecin.fr