C'est une réforme qui pourrait changer un peu la donne dans la gouvernance du système de santé. La Première ministre a annoncé vendredi, lors d'un déplacement dans l'Aveyron avec les deux ministres chargés de la santé, Agnès Firmin Le Bodo et François Braun, vouloir donner plus de liberté d'action et d'autonomie aux territoires.
Propos à peine tenu, déjà appliqué ? Le lendemain, est paru au « Journal officiel » un décret en ce sens sur le droit de dérogation aux normes pour les directeurs généraux d'agence régionale de santé (ARS), « pour un motif d'intérêt général ». Le texte autorise ainsi le patron d'ARS à prendre des décisions dérogeant à la réglementation nationale en vigueur (mais pas à la loi) sous certaines conditions et si des circonstances locales le justifient.
Installation d'IRM, maintien de service
Lors de sa visite chahutée du CH de Rodez – sur fond de manifestations contre la réforme des retraites – après celle de maison de santé rurale de Salles-Curan, Élisabeth Borne a confirmé que le gouvernement souhaitait donner plus de marges de manœuvre aux ARS pour adapter les règles à la réalité des territoires ». Il pourra s'agir, par exemple, « d’installer plus de scanners ou d’IRM dans un territoire même si ce n’est pas les règles nationales car le territoire en a besoin » ou encore de « maintenir un service de chirurgie ambulatoire (...) parce que cela répond aux besoins du territoire », a illustré la cheffe du gouvernement.
De fait, le décret qui instaure ce « droit de dérogation » du directeur général définit un champ d'intervention large allant de la veille sanitaire à l'évaluation des formations des professionnels de santé, en passant par les autorisations en matière de création et d'activités des établissements de santé ou installations ou encore la « mise en œuvre d'un service unique d'aide à l'installation des professionnels de santé ».
Seul impératif, ces dérogations devront être justifiées par « un motif d'intérêt général et l'existence de circonstances locales » et avoir pour effet « d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques et notamment aux financements accordés par l'ARS ». La conférence régionale de la santé et de l'autonomie sera informée chaque semestre des décisions prises et un bilan national sera réalisé au moins une fois par an.
Labelliser plus vite les hôpitaux de proximité
Ce mercredi, le ministère de la Santé a expliqué le contexte et les enjeux de cette réforme. Sur le modèle du droit de dérogation déjà accordé aux préfets depuis 2020, des expérimentations ont été conduites depuis cinq ans sur la possibilité de conférer aux DG des ARS ce droit identique (sur un nombre limité de sujets). « Ces expérimentations ayant donné satisfaction, le gouvernement a décidé de généraliser le droit de dérogation pour les ARS, sur un périmètre large de leurs compétences », explique Ségur, qui revendique une évolution forte dans la dynamique du Conseil national de la refondation (CNR). Ce droit de dérogation sera ainsi activé « au cas par cas, en réponse à un besoin particulier et à des circonstances locales », pour débloquer une situation, accélérer une procédure, simplifier une démarche, et lorsque l’intérêt général le justifie.
Par exemple, les DG des ARS pourront simplifier les cahiers des charges imposés dans certaines procédures comme la labellisation des hôpitaux de proximité, l'organisation de la permanence des soins (PDS) ou l’appel à projets dans le secteur médico-social. Ils pourront aussi accélérer l'application de solutions identifiées dans les concertations conduites localement dans le cadre du CNR santé. « Une dérogation accordée en réponse à une circonstance particulière devra ainsi être accordée à d’autres situations présentant des circonstances similaires », ajoute le ministère qui fera un bilan régulier des dérogations accordées. L'objectif affiché est d'identifier les rigidités, les sources de complexité et les normes mal adaptées afin de « donner des marges de manœuvre aux acteurs de terrain ». Du grain à moudre pour les ARS…
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