Le troisième CHU de France a tenu bon dans la tempête du Covid. Selon un rapport de la chambre régionale des comptes (CRC) consacré à l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) paru début janvier, l'établissement a joué un « rôle pivot » dans l’organisation du système de santé au niveau régional pendant la pandémie. Mais le contrôle - une procédure classique - qui s'est déroulé entre février 2019 et juillet 2022 a également mis en évidence la persistance des déficits et d'un niveau d'absentéisme toujours préoccupant.
Comme tous les hôpitaux, l'AP-HM (dont les recettes s'élevaient à 1,55 milliard d'euros en 2020) a bénéficié jusqu'à la fin de l'année dernière du dispositif de garantie de financement. « Les effets conjoncturels sur son activité ont été largement compensés par les dispositifs financiers mis en œuvre par l’État », rappelle le rapport. Toutefois, l’AP-HM est « fortement concurrencée sur sa zone d’attractivité par un secteur privé pléthorique qui capte la progression régionale de l’attractivité en médecine, chirurgie et obstétrique », ajoute-t-il.
Une dette historique colossale
D’après la CRC, « l’établissement est fortement handicapé par le poids d’une dette ancienne, frôlant le milliard d’euros », dont le remboursement se fait « au détriment des investissements et du fonctionnement courant ». Fin 2020, celle-ci était de 938 millions d’euros, en baisse de 56 millions d’euros par rapport à fin 2016. Le déficit cumulé de l’établissement atteignait, lui, 550 millions d’euros.
« L’insuffisance de capitaux propres obère fortement la capacité (de l’AP-HM) à mener un projet patrimonial de l’envergure de celui projeté », note la CRC. En octobre 2021, le projet de modernisation des différents sites de l’AP-HM était évalué à 457 millions, un montant en hausse de 36 % par rapport au chiffre avancé en janvier 2020.
« Il ne s'agit pas d’une dérive mais du chiffrage réaliste d’un projet immobilier actualisé, tirant les enseignements de la crise sanitaire du covid et intégrant les contraintes environnementales, urbanistiques et liées au phasage des travaux », a répondu l'AP-HM dans un communiqué. Selon l’établissement, le projet est revalorisé à 480 millions d’euros et son financement « est à ce jour couvert par les aides à hauteur de 77 %, le reste étant financé par l’emprunt ».
Un niveau très élevé d'absentéisme
La CRC relève par ailleurs « un niveau très élevé d'absentéisme de son personnel soignant », qui constitue « un handicap majeur » pour l’établissement, premier employeur public de la région (16 600 équivalents temps plein rémunérés). « L’AP-HM se classe à la dernière place des CHU pour le taux d'absentéisme, le pourcentage d’agents absents et la durée moyenne d’absence », souligne le rapport. « Ce problème structurel est ancien et les différentes tentatives pour le résorber ont été inefficaces », ajoute-t-il.
Dans les services de soin, le taux d’absentéisme était de 11,2 % en 2018. Ce niveau élevé « oblige l’établissement à mobiliser des dispositifs coûteux comme l’intérim ou le recours aux heures supplémentaires », poursuit la chambre. En 2018, l’AP-HM a dépensé 1,3 million d’euros en intérim pour le personnel paramédical. « Depuis 2020, les efforts demandés aux personnels hospitaliers pendant la pandémie de covid ont accru l’absentéisme à l’AP-HM dans les mêmes proportions que dans les autres établissements de santé français », rétorque François Crémieux, directeur général de l’AP-HM dans sa réponse au rapport.
Le rapport relève également « des cumuls irréguliers d’activité d’agents de l’AP-HM dans des établissements de santé privés ». Une pratique qui ne concerne que 0,28 % des effectifs, relative le directeur.
Un nouveau projet d’établissement de l'AP-HM est en cours d’élaboration à échéance été 2023.
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