Alors que le pic de l'épidémie est attendu mi-novembre, l'équipe médicale de l'hôpital américain de Paris (privé à but non lucratif) est prête à aller au front, à la lumière de l'expérience acquise. Elle a accueilli « Le Quotidien » dans son unité Covid et de réanimation.
Intubation, ventilation, huit pousse-seringues, scope médical qui analyse la fréquence cardiaque, taux de sédation et de curare… Voilà à quoi ressemble le dispositif lourd et complexe d'un patient Covid dans un service de réanimation. Au 3e étage de l'hôpital américain, à Neuilly-sur-Seine, le service de réa accueille ce jour-là cinq patients Covid. Habitué à prendre en charge des malades sévères et polypathologiques, l'établissement a transformé, dès le mois de mars, son service de médecine polyvalente en unité Covid de 25 lits qui jouxte celui de réanimation.
Privé incontournable
En ce vendredi 6 novembre, deux paramédicaux se préparent à intervenir dans l'une des chambres individuelles de l'unité Covid ; un autre lit des analyses debout dans le couloir. Quelques mètres plus loin, en réanimation, la lumière est tamisée, le silence règne. Le calme avant la tempête ?
Alors que la seconde vague épidémique est arrivée début novembre, l'hôpital public ne fait plus cavalier seul. Les cliniques mais aussi le secteur privé non lucratif sont devenus incontournables. L'hôpital américain a été déjà très mobilisé lors de la première vague. « Contrairement à d'autres structures du privé, nous avons participé à la prise en charge de patients dès le 20 mars. Plus d'une centaine ont été hospitalisés chez nous », souligne le Pr Robert Sigal, directeur général de l'hôpital Américain.
La « team Covid » – comme les soignants la surnomment – est composée de huit médecins (pneumologues, infectiologues, internistes et cardiologues). Au printemps, 122 patients étaient passés par l'unité, 28 par la réanimation. « Comme tous les hôpitaux, on a poussé les murs, explique le Pr Christophe Rapp, infectiologue et chef de l'unité Covid. Cette unité a été créée à la place du service de médecine polyvalente qui a été dispatché dans les autres étages. La pédiatrie est devenue un labo PCR. » Sur les 120 lits de l'établissement, 25 sont donc dédiés à l'unité Covid et 13 à la réanimation (contre 8 en temps normal). Un tiers des lits sont dévolus aux patients Covid, signe de l'importance prise par l'épidémie dans le système hospitalier.
Pas (encore) de déprogrammations
Un psychologue fait partie de l'unité. Il accompagne patients et soignants « qui ne comptent plus leurs heures », comme l'explique Christelle Pelisse, cadre de santé infirmière. « Malgré une situation intense et de la fatigue, nous travaillons à effectif constant, le personnel prend sur lui, tous sont admirables », glisse-t-elle avec fierté. Des renforts extérieurs et d'autres services sont sollicités pour ne pas épuiser les forces vives. Quelque 330 paramédicaux ont été formés depuis la première vague à la surveillance pneumologique ou cardio-respiratoire.
Même si, à ce stade, aucune déprogrammation n'a eu lieu, l'hôpital Américain s'est préparé. « Le nombre de lits est à géométrie variable », confirme le Pr Rapp. Les équipes soignantes capitalisent sur les expériences passées. « On est mieux armés. Au début de la crise, on ne voyait pas les complications brutales arriver, nous avons progressé sur ce point et nous pouvons désormais anticiper ». « On trie mieux aux urgences et il y a davantage de suivi personnalisé en ambulatoire avec Covidom ou en téléconsultation alors qu'avant nous hospitalisions davantage », complète le Pr Thierry Carmoi, interniste et chef du pôle de médecine.
Incertitude sur l'ampleur de la vague
Dans le service de réa, l'ambiance est plutôt détendue. Le personnel a reçu des chocolats offerts par des patients. Des gestes « très importants pour le moral des troupes », décrivent-ils. Personnels, nombre de lits, matériels, médicaments : tout a été protocolisé pour éviter d'avaler des poires d'angoisse comme au printemps. « On a eu des tensions lors de la première vague sur les médicaments comme le curare, les hypnotiques… Nous devions mélanger plusieurs médicaments dans les pousse-seringues pour en utiliser moins. Aujourd'hui nous sommes équipés en conséquence », raconte le Dr Benjamin Sellam, réanimateur.
Si l'équipe aborde cette seconde vague plus sereinement, la vigilance est de mise, confie le praticien. « Les connaissances médicales se sont consolidées, un plan a été défini, tous les hôpitaux sont engagés. Mais la seule incertitude est l'ampleur de la vague…»
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