Au commencement, il y a la guerre en Ukraine, élément déclencheur d’une crise énergétique mondiale qui a eu un impact considérable sur les hôpitaux et établissements médico-sociaux, ouverts 24 heures sur 24 et très consommateurs d’énergie. C’est dans ce contexte que se sont déployés les conseillers en transition énergétique et écologique santé (CTEES). Ils étaient une poignée il y a trois ans. Ils sont 151 aujourd’hui à épauler près de 5 000 structures engagées dans une politique d’amélioration des pratiques. Une dizaine de millions d’euros est sanctuarisé chaque année pour financer les 165 postes existants. Ce début, encourageant, est loin d’être suffisant au regard des besoins. Dans un récent rapport, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) a recommandé de créer en tout 240 postes de conseillers. La Fédération hospitalière de France, elle, milite pour un contingent de 150 conseillers surspécialisés en santé environnementale, en complément de ceux œuvrant déjà pour la transition énergétique et la transition écologique.
Des experts de la réglementation
Un CTEES, c’est quoi ? À cause de la crise énergétique, les missions des conseillers sont principalement dédiées à la recherche d’économie d’énergie, en particulier via la réalisation d’un audit énergétique sur le patrimoine hospitalier dans les premiers temps. La taille du périmètre de chaque conseiller est variable mais toujours fondée sur la mutualisation de la ressource, au sein d’un groupement hospitalier de territoire (GHT) ou d’un groupement d’établissements de santé médico-sociaux. Thibault Hillairet intervient ainsi sur le GHT Littoral Atlantique 17, au nord de la Charente-Maritime. Il conseille 19 établissements, dont cinq Ehpad, l’hôpital de La Rochelle et une crèche hospitalière. Ingénieur spécialisé dans les énergies, Thomas Boursiac est quant à lui CTEES à Périgueux, dans le GHT Dordogne. Il aide dix établissements ainsi que la fondation John-Bost.
Tous deux ont-ils été bien accueillis ? Selon Thomas Boursiac, les établissements apprécient d’avoir un expert pour les renseigner sur la réglementation existante. Les responsables techniques des sites peuvent s’appuyer sur un ingénieur « qui sache structurer la démarche de transition énergétique et apporter un peu de méthodologie ». De même pour Thibault Hillairet, qui « collabore régulièrement avec plusieurs ingénieurs (maintenance, travaux, sécurité) sur site ». Selon lui, les besoins des établissements varient aussi en fonction de leur taille. Ces deux conseillers ont eu énormément de travail la première année pour auditer le volet énergétique de leur périmètre et répondre à la première échéance de l’obligation réglementaire du décret Éco énergie tertiaire*.
Des propositions souvent suivies de travaux
Les deux trentenaires sont formels : les CTEES répondent à un besoin. Alors qu’en 2022, 80 % des établissements ne connaissaient pas leur consommation énergétique, ils n’étaient plus que 50 % en mars 2023, révèle une enquête de l’Agence nationale d’appui à la performance sanitaire et médico-sociale (Anap). La prise de conscience par les hôpitaux et Ehpad est souvent suivie de faits. Une fois l’audit réalisé, les conseillers mettent en avant des mesures de réduction énergétique, dont des propositions de rénovation, très variables selon la date de construction des bâtiments.
Se faire aider par un CTEES est la garantie d’une baisse de 13 % de réduction des consommations énergétiques, indique l’Anap
C’est ce qu’a fait Thibault Hillairet au sein d’un service de pneumologie pour le poste électricité. Après un état des lieux, des compteurs ont été installés pour connaître la consommation. Des pilotes ont été définis pour faire de la sensibilisation sur les bonnes pratiques (exemple : éteindre les ordinateurs). L’ensemble des éclairages ont aussi été remplacés par des LED. Résultat : les dépenses énergétiques de l’éclairage ont baissé de 65 %. Au niveau national, les chiffres vont également dans le bon sens. Se faire aider par un CTEES est la garantie d’une baisse de 13 % de réduction des consommations énergétiques, indique l’Anap.
Un autre casse-tête des spécialistes de la transition énergétique est de parvenir à régler la climatisation au cœur de la canicule avec des utilisateurs « qui ont soit chaud, soit froid », explique Thomas Boursiac. Des échanges avec une médecin d’un service de consultation lui ont permis de savoir quelle température était acceptable pour des patients fragiles et d’adapter le système.
Un métier qui rapporte
À l’heure ou les hôpitaux rognent sur la moindre dépense, le coût de recrutement des CTEES est-il justifié ? La réponse est oui pour Thibault Hillairet : « Quatre mois après mon embauche, j’avais déjà rentabilisé mon poste sur plus d’une année », témoigne-t-il.
Prochaine étape pour le réseau national des CTEES : se faire connaître des établissements qui n’ont pas encore leur conseiller maison. Sans être leur employeur, l’Anap travaille à cette fin en collaboration avec d’autres réseaux similaires (Ademe, Action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique, Agence de mutualisation des universités et établissements d'enseignement supérieur…) pour organiser des formations et des rencontres entre conseillers de tous bords. Avec pour défi de mettre en place, en 2025, une plateforme commune pour tous.
* Ce décret de juillet 2019 impose une réduction progressive de la consommation d'énergie dans les bâtiments de 1 000 m² et plus à usage tertiaire afin de lutter contre le changement climatique
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