Il n'y a quasiment plus un hôpital public en France qui ne soit confronté à des difficultés sérieuses de recrutement de personnels. C'est pourquoi la Fédération hospitalière de France (FHF) a appelé ce mercredi à un « plan de bataille pour les ressources humaines » afin de combler au plus vite les 15 000 postes de praticiens hospitaliers (PH) et autant d'infirmières (IDE) vacants. « Améliorer le recrutement, c'est la mère de toutes les batailles », a lancé son président Arnaud Robinet en conférence de presse.
Pour y parvenir, la fédération ne manque pas d'idées, qu'elle a depuis longtemps transmises aux pouvoirs publics, à commencer par la hausse des capacités de formation (+ 20 % pour les médecins et + 25 % pour les paramédicaux) mais aussi – encore et toujours – l'amélioration de l'attractivité des carrières. « Recrutement, rémunérations, qualité de vie et évolution des carrières : tout ce qui compose l'attractivité des métiers de santé à l'hôpital fait système, estime le président de la FHF. On ne peut pas améliorer les conditions de travail sans accroître les recrutements et pourvoir les postes vacants. Et en même temps, améliorer les conditions de travail est une condition pour être davantage attractif et arriver à recruter. »
Fierté et stress généralisé
Pour étayer ces arguments, la FHF a rendu publics les résultats de l'enquête « prendre soin des professionnels de santé », réalisée sous la houlette de son comité d'éthique. Le questionnaire a été rempli, au mois de juin, par plus de 10 000 professionnels (de 13 professions et 14 régions) dont les deux tiers avaient au moins dix années d'expérience. « Le nombre de réponses atteste du besoin d'expression des personnels soignants, note le Pr Bertrand Guidet, président du comité d'éthique. Et d'une certaine façon, ce questionnaire constitue en soi un acte de management. »
Que disent les hospitaliers de leur vie professionnelle ? Ils en sont fiers pour 80 % d'entre eux et, de surcroît, ont un sentiment d'utilité pour 91 %. En même temps, ce travail génère du stress pour 89 % d'entre eux : pour 67 % des répondants par « manque de moyens humains et matériels » et pour 63 % en raison de sursollicitations et de ruptures de tâches. Au point que 36 % des soignants déclarent des symptômes associés (troubles du sommeil, digestifs, articulaires) et 28 % des symptômes psychiques (nervosité, anxiété, dépression).
Métiers du soin : sortir des idées reçues
Ainsi, la moitié des répondants seulement conseillerait leur métier et encore moins (46 %) considère exercer un métier qui correspond à l'idée qu'ils s'en étaient fait. Comme remédier à cette situation ? Des revalorisations salariales pour 64 % du panel, de l'encouragement et de la considération pour 48 %, une amélioration du cadre de vie pour 46 % et un accès à la formation continue pour 42 %. « Je suis très favorable aux formations-actions avec une application immédiate des contenus », a commenté le Pr Guidet.
Par ailleurs, selon le pôle « ressources humaines » de la FHF, 99 % des hôpitaux connaissent des difficultés de recrutements, avec des disparités selon les établissements et les territoires. « Nous pensons que les métiers du soin sont mal connus et nous préconisons une grande campagne de communication à destination à la fois des étudiants et des demandeurs d'emploi, un peu à l'image des campagnes du ministère de la Défense, a avancé Sophie Marchandet, responsable du pôle RH. Cela permettrait de sortir des idées reçues et des fausses informations. Le Ségur de la santé a eu un effet profond sur les niveaux de rémunérations, il faudrait communiquer dessus. »
Usure professionnelle
Au sujet des rémunérations, justement, la FHF soutient sans ambiguïté les revendications des syndicats sur la revalorisation prioritaire de la permanence des soins. En outre, pour mieux valoriser l'engagement individuel et collectif, « il faudrait refondre le régime indemnitaire devenu illisible – il existe une centaine de primes – autour de critères de technicité du poste, de management, de contraintes d'exercice et d'investissement individuel », énumère Quentin Henaff, adjoint au pôle RH.
Enfin, pour prévenir l'usure professionnelle des hospitaliers, la FHF veut profiter de deux réformes en cours ou en projet. Celle des retraites d'abord, qui prévoit un fonds de prévention dédié dont l'hôpital public espère pouvoir bénéficier largement pour ses personnels. Et la réforme de la protection sociale complémentaire (PSC), qui est censée entrer en vigueur au 1er janvier 2026, pour laquelle la FHF souhaite une accélération du calendrier et donner du contenu. Il s'agit, en effet, de la mise en place obligatoire de contrats collectifs de couverture santé et prévoyance avec participation de l'employeur.
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