Pour les établissements comme en médecine de ville, la mission Aubert plaide en faveur d'un modèle de paiement « combiné » mobilisant plusieurs leviers à un horizon de cinq ans. Retour les différentes « briques » de financement de la santé.
• Paiement à la qualité et à la pertinence
La qualité doit devenir un « compartiment » de financement à part entière.
Déjà budgété dans la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2019 à hauteur de 300 millions d'euros pour les établissements (contre 60 millions d'euros en 2018), le paiement à la qualité s'inscrit dans la logique du programme IFAQ à l'hôpital – resté confidentiel. Cette dotation qualité ne sera valable en 2019 que sur les activités hospitalières en médecine chirurgie et obstétrique (MCO), SSR et à domicile (HAD). Mais elle devrait ensuite être étendue aux soins de ville, aux EHPAD et à la psychiatrie d'ici à 2022. S'il n'a pas vocation à remplacer la T2A, le paiement à la qualité devra représenter entre 2 et 3 % des recettes d'assurance-maladie des établissements en 2022, soit deux milliards d'euros. Le modèle pourrait intégrer un malus à partir de 2020.
En médecine de ville, ce système a pris la forme du CAPI dans un premier temps, devenu la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) en 2012 pour les généralistes et certains spécialistes. En ville, l'extension de la ROSP à de nouvelles spécialités est « à considérer, avec des modalités adaptées », juge le rapport Aubert qui souligne la nécessité de s'en tenir à quelques thématiques prioritaires.
• Des forfaits pour le suivi des pathologies chroniques
Le principe d'un forfait pour les pathologies chroniques est déjà concrétisé pour les hôpitaux en 2019 (via le budget de la Sécu) pour la prise en charge du diabète et de l'insuffisance rénale chronique. Le principe est que le forfait diabète se substitue à la facturation des consultations, hôpitaux de jour et hospitalisation de courte durée.
Mais « très rapidement » de tels types de forfaitisation pourront être instaurés pour la médecine libérale de premier recours « par voie conventionnelle », recommande la mission. La première étape proposée est un forfait diabète pour le médecin généraliste, « qui pourrait se substituer aux consultations actuellement réalisées », lit-on. Le montant de ce forfait de prise en charge globale des patients diabétiques pourrait être modulé selon plusieurs critères : atteinte de résultats cliniques, état général du patient mais aussi réalisation d'un nombre minimal de consultations.
Le paiement forfaitaire au suivi est envisagé ensuite pour d'autres pathologies chroniques ou population (personnes âgées, BPCO, maladie coronarienne, AVC, obésité morbide) et pourrait atteindre cinq milliards d'euros à horizon 2022.
• Le paiement groupé à la séquence de soins
L'enjeu est de rémunérer avec un montant forfaitaire global l'ensemble des acteurs hospitaliers et libéraux impliqués en pré et post-hospitalisation (séjour, consultations externes, honoraires médicaux, soins infirmiers, kinésithérapie, etc.) pour un même épisode de soins, incluant reprises et les complications éventuelles. A l'origine de cette idée, la CNAM espère inciter les professionnels à se coordonner, à améliorer leurs pratiques et à réduire les actes inutiles (voire les réhospitalisations éventuelles).
Les premières expérimentations sont attendues cette année pour l’arthroplastie de hanche, la prothèse totale de genou, la ligamentoplastie du genou et la colectomie pour cancer. Prudente, la task force milite pour un déploiement « très progressif » du paiement groupé à d'autres prises en charge. Les chirurgiens orthopédistes n'ont pas caché leur hostilité à ce type de paiement groupé à la séquence de soins.
• Le paiement à l'acte et à l'activité
Conformément au cadrage politique d'Emmanuel Macron, la mission Aubert veut plafonner à 50 % la part tarifée strictement à l’activité dans les établissements (contre 63 % aujourd'hui), soit 40 milliards d'euros d'euros en 2022.
En ville en revanche, aucun objectif chiffré de réduction du paiement à l'acte n’est fixé, la tarification à l'acte étant ultraprédominante (de 87 % à 100 % selon les spécialités). La task force ne préconise pas d’y renoncer mais de la faire évoluer pour favoriser la pertinence et l'innovation.
A cette fin, la mission réclame une « démarche de révision puis de maintenance active des nomenclatures » médicale et paramédicale, devenues illisibles, sur trois ans. Ce grand ménage vise la CCAM technique (8 500 actes médicaux en ville), la NGAP (actes cliniques médicaux et paramédicaux libéraux) mais ausi les 2 600 GHS à l'hôpital ou encore la NABM (codage des actes biologiques). En ville, le rapport constate qu'il existe des dizaines, voire des centaines d'actes, classés hors nomenclature...
A l'hôpital, la mission Aubert réclame une « mise à jour » dès 2019 des GHS médicaux, chirurgicaux et interventionnels et, en parralèle, des incitations financières au développement de la chirurgie ambulatoire, de la récupération améliorée après chirurgie (RAAC) et de la médecine de courte durée (tarifs uniques entre les séjours de très courte durée et l'hospitalisation complète).
• Le paiement à la structuration pour les équipes en ville
La task force propose d’investir davantage qu’aujourd’hui dans le numérique (échanges d’informations, télémédecine, gestion des données médicales, objets de santé connectés, etc.) et l’aide au fonctionnement des structures de soins coordonnés.
Cette stratégie fait écho aux arbitrages du gouvernement, qui souhaite voir naître sur le territoire, d’ici à 2022, 1 000 communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et 2 000 structures d’exercice coordonné (maisons de santé, centres de santé, équipes de soins primaires). Ouvertes le 16 janvier par la CNAM, les négociations sur le financement des CPTS, qui se terminent mi-mars, permettront d'y voir plus clair sur l'enveloppe finale incitant au regroupement.
• Des dotations ad hoc pour la psychiatrie et les urgences
Les établissements psychiatriques sont aujourd'hui financés par deux modalités (dotation annuelle de financement – DAF – ou prix de journée), selon leurs statuts. Le rapport Aubert mise sur un financement combiné. Le cœur de la réforme serait la mise en place d'une nouvelle « dotation populationnelle » versée aux ARS (8,7 milliards d'euros), ajustée à la précarité de la population couverte et à la part de mineurs. Ce vecteur principal d'allocation des ressources serait complété par cinq briques de financement pour les établissements, correspondant aux incitations à la qualité, à la « réactivité », au codage, au développement de nouvelles activités inter-régionales et à la recherche.
Aux urgences enfin, la part forfaitaire devra être « consolidée » et ne plus être corrélée au nombre de passages, un travers qui pousse les hôpitaux à la suractivité. L'objectif est double : inciter les professionnels hospitaliers à adresser les situations les plus légères vers la ville (grâce à une coordination plus étroite avec les CPTS) et permettre le maintien des services d'urgences dans les territoires en ne conditionnant pas leur existence à leur niveau d'activité.
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