Le nouveau ministre de la Santé peut-il sauver les urgences avec ses 41 mesures ? Les services d’urgences connaissaient déjà la crise la plus grave depuis plus de 10 ans en 2019 avec 25 000 000 de passages par an. Il n’était pas rare de rester 12 heures sur un brancard avant d’être pris en charge. Désertés par les malades paniqués par la Covid pendant la pandémie, ils connaissent un nouvel afflux alors que 20 % des lits sont fermés faute de personnels. François Braun, ancien Président de Samu-Urgences de France n'a jamais été ni élu, ni militant politique. Il va donc agir en technicien, sauf si on l'empêche, avec une mauvaise feuille de route.
L'été a été à hauts risques avec les pénuries de personnels. Au moins 120 services étaient en détresse. Le personnel manque et fatigue. Ce qui impose des fermetures. Le bilan de l'été pour l'instant est mitigé car l'on ne sait pas encore quels appels au SAMU n'ont pas abouti et s'il y a eu des morts par retard de prise en charge…
Mais la liste est longue des hôpitaux en difficulté : Aux urgences du CHU de Bordeaux, les patients étaient accueillis par deux bénévoles de la Protection civile. Le service des urgences d’Arles, fonctionne avec 40 % d’intérimaires pour combler les postes de médecins vacants. Dans le Puy-de-Dôme, le Rhône, la Sarthe, la Corse, la Mayenne, la Vendée, les services d’urgence s’organisent en conséquence entre fermetures complètes du service ou uniquement la nuit. À Laval, la situation est aussi effrayante.,
Élisabeth Borne avait retenu « toutes les 41 propositions » de la mission qui avait été confiée au futur ministre pour sauver les urgences. Elle a souligné, « trois axes forts » ciblés pour une durée de trois mois. Elles feront l'objet d'une évaluation fin septembre pour envisager leur devenir dans le temps, avait précisé Matignon.
Le SAS est une erreur
La pénurie de soignants est un drame. La réorganisation des urgences, une priorité. Et sans changer de fond en comble l’organisation hospitalière, rien ne sera possible. Mais le SAS (Service d'accès aux soins), lancé dans le cadre du Pacte pour la refondation des urgences et réaffirmé lors du Ségur de la santé est une lourde erreur. Son objectif ? Répondre à la demande de soins vitaux, urgents et non programmés de la population partout et à toute heure, grâce à une chaîne de soins lisible et coordonnée entre les acteurs de santé de l’hôpital et de la ville d’un même territoire. En fait, sur les 22 sites pilotes désignés par le ministère de la Santé, nombreux sont ceux qui rencontrent des difficultés organisationnelles ainsi qu’un manque cruel d'effectifs. Faute de personnels formés en nombre suffisant, c'est une totale utopie. De nouveaux drames au SAMU ne vont pas manquer de sortir en Automne après un été très difficile.
Le Bed Manager et la revalorisation des gardes faisaient partie des idées pour éviter l’attente sur un brancard : il fait au quotidien l’inventaire des lits, renseigne les services sur la disponibilité en lits des établissements du territoire, et anticipe les besoins pour le week-end ou les jours fériés.
À l'hôpital, une revalorisation de 50 % de la rémunération des gardes de nuit des médecins va être expérimentée sur trois mois. Les majorations de nuits pour les autres soignants seront doublées.
En région, l’appel à la mobilisation générale des URPS et de tous les professionnels de santé a été lancé cet été avec une incitation tarifaire. Majoration de 15 € pour encourager les médecins généralistes libéraux à accueillir des soins non programmés mais avec un plafond. Les maisons médicales de garde pourront également être ouvertes le samedi matin, avec des consultations majorées de 15 euros. La régulation médicale par les médecins libéraux a été revalorisée à 100 euros de l'heure cet été et les praticiens bénéficieront d'une couverture assurantielle garantie par les établissements de santé.
En ville, la question des déserts médicaux s'est imposée lors de la campagne présidentielle avec des arbitrages délicats réclamés sur la liberté d'installation et le conventionnement sélectif.
Des études de médecine trop longues
La nouvelle ministre, Agnès Firmin-Le Bodo a « toujours été contre » la contrainte à l'installation. S'agissant de sa méthode, la pharmacienne promet d'associer les représentants des élus locaux, les URPS, les professionnels de santé, les associations de patients et les agences régionales de santé (ARS) mais aussi de travailler avec sa collègue, Caroline Cayeux, chargée des Collectivités territoriales.
Les solutions sont pourtant simples. Il faudrait revenir à un internat régional pour éviter des mesures coercitives qui seraient contre productives. Rien ne pourra donc se faire sans réformer les études de médecine et l’internat. Les études de médecine sont trop longues et trop théoriques. L’Internat de médecine générale est trop tardif et pas assez formateur. Le prolonger d’un an pour envoyer les internes dans les déserts est une fausse bonne idée. Il faut au contraire le rendre accessible dès la 5e année. On aurait ainsi plus de médecins mieux formés sur le marché, probablement plus de 10 000 en trois ans.
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Exergue : Prolonger d’un an l'internat de médecine générale est une fausse bonne idée
Il est parfois utile de prendre de la hauteur avant de parler des médecins généralistes
La coûteuse organisation de la santé paralyse les soins
Régulation de l’installation : une fausse bonne idée
Aptitude physique