La vulgarisation scientifique de qualité et la pédagogie sont sans doute les deux éléments qui nous ont le plus fait défaut depuis le début de la pandémie.
Expliquer que le SARS-CoV2 est un virus aéroporté, et donc qu’il faut focaliser son attention sur le fait d’aérer les espaces clos, de porter un masque surtout dans des locaux peu ou mal ventilés par exemple. L’accent, après plus de 18 mois de pandémie, est encore et toujours mis à tort sur le lavage des mains. Il est certes important, mais même les mains les plus propres n’empêcheront pas la contamination par les gouttelettes transportées de façon invisible dans l’air que nous respirons. Des scientifiques, mais pas seulement, tentent de faire bouger l’opinion publique en apportant des preuves de la nécessité d’aération des locaux, en accumulant les arguments qui prouvent cette transmission aéroportée et les actions faciles, concrètes et peu onéreuses à mettre en place pour réduire le risque de transmission du coronavirus. Mais dans ce cas, il suffit que l’on tende le micro au co-inventeur proclamé du gel hydroalcoolique, pour qu’il déclare en mai 2021 qu’« aucune étude contrôlée ne prouve de contamination par aérosol » et que le grand public retienne que si le co-inventeur du gel dit qu’il faut se laver les mains avec, c’est que tout « passe par les mains » selon la formule consacrée d’un grand professeur marseillais.
Ce grand professeur, élite autoproclamée, qui n’a eu de cesse que d’être la boussole qui indique le sud, a bénéficié d’une telle couverture médiatique que sa parole a souvent fait office de parole d’évangile auprès de ses disciples locaux ou nationaux. Comment penser, quand on n’est pas soi-même scientifique ou personnel soignant, qu’un si grand professeur, et que l’on voit si souvent à la télévision, puisse avoir tort ? Et même, puisque personne ne lui apporte, sauf cas rarissime, la contradiction, c’est sans doute que cette contradiction n’existe pas et que ce grand homme qui aime se caresser la barbe blanche en parlant doit être un grand esprit de sagesse. Les vrais scientifiques emplis d’humilité et ne cherchant qu’à réduire le risque qu’encourent nos concitoyens, se retrouvent après chaque déclaration à refaire ce sempiternel travail de réfutation des allégations infondées et trop souvent dangereuses. Jusqu’à la prochaine déclaration du mage.
Certains scientifiques ou vulgarisateurs passent même un temps incalculable sur les réseaux sociaux à tenter d’expliquer la réalité des faits, de l’aérosolisation ou même de la vaccination où tant d’idées reçues ou de fausses rumeurs circulent. Les comptes sur lesdits réseaux sont parfois suspendus à la faveur d’un algorithme zélé insensible aux métaphores ou au second degré, là où les comptes de désinformateurs peuvent continuer à répandre fiel et contre-vérités jusqu’à plus soif, sans être le moins du monde inquiétés.
Don Quichotte judiciaires
Des avocats sans vergogne usent et abusent du système pour faire miroiter des recours judiciaires et des impossibles victoires contre les mesures sanitaires. Ceux qui les écoutent et les croient ont alors le sentiment qu’ils vont mener ce combat avec une promesse illusoire d’une victoire de l’égoïsme et de l’égocentrisme « je fais ce que je veux et tant pis si d’autres en meurent ». Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent… et versent quelques euros au passage aux Don Quichotte judiciaires qui sauront les utiliser comme bon leur semblera. Pour dix pédagogues judiciaires qui tenteront de démonter ces fausses idées et ces grossières erreurs, il y aura toujours au moins un média qui tendra un micro à l’un de ces personnages nés avant la honte, leur offrant une exposition médiatique sans pareille. Comme le dit Terry Pratchett, grâce à eux, les contre-vérités auront déjà fait trois fois le tour de la terre quand la vérité aura fini de lacer ses chaussures…
Et depuis 18 mois, cette situation se rejoue encore et encore. Tels autant de Sisyphes tentant de mener à bien cette tâche impossible, les partisans d’une vérité et d’une rigueur scientifique tenteront d’apporter des arguments dans un seul et même but : essayer de réduire au maximum les risques de contagion grâce à des actions cohérentes et pertinentes et pouvoir revivre le plus normalement possible grâce à ces mêmes actions entreprises.
Mais, comme Sisyphe était prisonnier de sa montagne et de son rocher qui ne restera jamais sur la cime, nous restons à la merci des faiseurs de rois médiatiques toujours plus nombreux, sans personne pour siffler la fin de cette partie déloyale.
Exergue : nous restons à la merci des faiseurs de rois médiatiques toujours plus nombreux
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