Pressés par l'entrée massive dans la dépendance des générations du baby-boom (les plus de 60 ans seront 20 millions en 2030), bousculés par le scandale Orpea, conduits à diversifier l'offre d'accompagnement sur les territoires, les établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) cherchent à réinventer leur modèle, comme l'ont montré leurs récentes assises nationales.
« Le profil des futurs résidents change aussi, analyse Jérôme Guedj, cofondateur du think tank Matières Grises sur le vieillissement. La génération qui arrive a accompagné la société de consommation et quand elle paie, elle veut en avoir pour son argent, elle a connu la conquête de l'autonomie, la liberté de choix. »
Le « chez soi » en établissement
Au moment de la conception (ou de la rénovation) d'un établissement, l'architecte devra donc permettre « le chez soi ». « Une chambre de 20 m2 n'est pas évidente à aménager, en plus des problématiques multiples des résidents : l'architecture peut tout aussi bien être handicapante, comme faciliter l'autonomie, explique Emmanuelle Ladet, de l'agence d'architectes Soho Atlas In Fine. Il faut faire en sorte d'effacer les murs, amener vers une fenêtre où il y a quelque chose à voir, proposer des espaces bien organisés, comme un dressing. » Permettre aux résidents de cheminer dans les espaces publics est un autre enjeu majeur, ajoute la maître d’œuvre, citant les exemples de Cité des aînés à Saint-Étienne, Valence et Montpellier ou le village Alzheimer de Dax (Landes), des Ehpad ouverts sur la ville qui misent sur le lien social et le bien-être de la personne âgée.
Alors que le Ségur de la santé a débloqué « 1,5 milliard d'euros » pour moderniser les Ehpad, les groupes tentent d'intégrer au mieux les aspirations des résidents et des soignants, assure le Dr François Deparis, directeur médical d'Arpavie (privé associatif). Après les années Covid, les établissements repensent leurs appels à projet et se tournent vers la création d'unités spécifiques (fin de vie, Parkinson) pour adapter les prises en charge. « Le but est aussi de prendre en compte le ressenti des collaborateurs », insiste le gériatre, citant l'exemple des infirmières qui marchent en moyenne 15 km par jour et préféreront une infirmerie centrale. « De la même façon, un résident qui déambule dans un couloir tout blanc aura du mal à se repérer, il faut créer une atmosphère adaptée », souligne le Dr Deparis. « Les meilleurs projets sont ceux conçus avec les résidents, les familles et les soignants », abonde Emmanuelle Ladet.
Établissements ressources
Au-delà de sa conception, l'Ehpad du futur intégrera davantage de robotique et de digital – 600 millions ont été fléchés dans le Ségur pour accélérer la transformation numérique du secteur de la dépendance. « Dans un groupe où tous les dossiers sont informatisés, le partage d'information est facilité, mais aussi la communication entre le résident et sa famille, explicite Julien Prim, consultant, auparavant chez LNA Santé. Il faut faire évoluer les outils numériques, développer un vrai usage chez les soignants et améliorer la couverture haut débit. » « Le secteur médico-social n'a pas à rougir, il a pris à bras-le-corps ce sujet », estime de son côté le Dr Jean-Pierre Aquino, président suppléant de l'Agence du numérique en santé et délégué général de la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG).
Demain surtout, les établissements pourront jouer le rôle de « plateformes » en s'ouvrant aux habitants de leur territoire. La loi de financement de la Sécu 2022 a élargi en ce sens le rôle des Ehpad « à la fourniture de ressources » sur un bassin de vie. Appelé « hors les murs », ce modèle d'Ehpad vient casser « la dichotomie Ehpad/domicile », explique Anna Kuhn-Lafont, déléguée générale de Matières Grises. « C'est par exemple l'ouverture du restaurant à des personnes extérieures, ou à l'inverse le portage de repas au domicile de personnes âgées non-résidentes », illustre cette experte. Ainsi, la création de véritables pôles ressources gérontologiques locaux devrait monter en puissance.
Dédramatiser l'Ehpad
Le groupe SOS Séniors (privé non lucratif) s'est emparé de ce concept dès 2016 dans son établissement d'Onville (Meurthe-et-Moselle). Les personnels peuvent accompagner temporairement – sur deux mois – des patients à domicile après une maladie ou une hospitalisation. « Cela soulage les aidants et permet de soutenir les familles dans leurs choix, en dédramatisant l'Ehpad, raconte la Dr Emmanuelle Deschamps, directrice médicale. Non seulement l'entrée en établissement est ensuite mieux vécue mais les retours des soignants sont très positifs, ils voient ces moments comme une bouffée d'oxygène et leur qualité de vie au travail s'en trouve améliorée. »
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