Selon le ministre de la Santé, « la crise sanitaire a servi de crash test à l’organisation de la réponse européenne ». À l’occasion du colloque des doyens des facultés de médecine, consacré à l’Europe de la santé, Olivier Véran a vanté, ce jeudi matin, la gestion européenne de la pandémie. Une opinion qu’il se serait forgée dès les premiers jours de la crise. Devant un parterre de doyens, d’étudiants et de directeurs d’hôpitaux, le ministre de la Santé est ainsi revenu, dans le détail, sur les échanges qu'il a eus avec ses homologues européens aux prémices de la pandémie.
Fin février, quelques jours après sa nomination et alors que la Lombardie décide de premières mesures de confinement, « l’Europe regarde hébétée l’Italie, nous étions tous surpris ». Rapidement, différents ministres de la Santé européens se rassemblent et passent un accord. « Nous nous étions engagés à ne pas prendre de grande décision unilatérale, comme la fermeture des frontières, sans en avoir informé nos collègues », se souvient Olivier Véran.
Vingt-quatre heures plus tard, l’Espagne se confine, l’Allemagne interdit les grands rassemblements, « la coordination européenne n’avait pas fait long feu », regrette le ministre, qui se dit « marqué ». « L’Europe a mis du temps à appréhender la menace épidémique et encore plus à harmoniser ses moyens d’agir. Mais nous avons fini par le faire », se félicite le neurologue, qui raconte que petit à petit les différents ministères de la Santé ont fini par échanger leurs données, développer des indicateurs de suivi, et se réunir toutes les semaines « en visio ». Et de donner naissance « au projet de coordination européenne le plus abouti : la vaccination », avance encore le ministre, citant les contrats européens passés avec les laboratoires producteurs de vaccins. « On nous a critiqués sur le retard de la vaccination en France, mais c’est cette logique européenne qui nous permit de protéger la population », martèle-t-il. « Nous sommes plus malins et plus efficaces quand nous négocions à 27 », a abondé la députée européenne LREM Véronique Trillet-Lenoir.
Coordonner la recherche
Alors que la France prendra la présidence de l’Union européenne en janvier prochain, le gouvernement entend bien capitaliser sur la gestion européenne de la santé. Une logique qui passera notamment par la création de l’agence HERA, copie de la Barda étasunienne, qui permettra à l’Europe de répondre dans l'urgence aux impératifs enjeux sanitaires : financer des médicaments innovants, coordonner les stocks et accélérer l’autorisation de certains vaccins.
Dans la même veine, l’Europe devrait construire un pilotage coordonné des innovations en santé, « pour mettre au pot commun les innovations, illustre Olivier Véran. Sur le sujet prioritaire des cancers pédiatriques par exemple, il serait illusoire et contre-productif de considérer que la France peut entamer seule des programmes de recherche sans tenir compte de ce qui se passe ailleurs en Europe ».
Des programmes de recherches européens - associant universités, laboratoires et entreprises privées – font désormais l’objet de financement via le projet « Horizon Europe ». « C’est le plus grand plan de financement de la recherche dans le monde, ça fait du bien de temps en temps de se rappeler qu’aucun autre continent n’a consacré autant de budget à la recherche », avance Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en ouverture du colloque. 95 milliards d’euros y seront alloués, jusqu’en 2027.
« Le réveil du siècle des lumières »
Devant les doyens des facultés de médecine, la ministre de l’Enseignement supérieur s'est aussi réjouie de la mobilité des étudiants européens, via notamment le programme Erasmus. Pour l’heure, seuls les étudiants de 1er cycle des études de médecine peuvent prétendre à un Erasmus. « Mais je souhaite que ce soit aussi possible pour les étudiants de 2e cycle, a poursuivit la ministre. C’est très important de construire une Europe des professionnels de santé, qui conjuguent et mêlent leurs différentes pratiques »
Si la crise a tiré les leçons d’une coordination européenne, toujours selon les deux ministres, elle devra aussi digérer les conséquences « de la libre circulation de l’information sur les réseaux sociaux », parfois « débridée », poursuit Olivier Véran. « Nous sommes victimes de la société des algorithmes, développés par les plateformes numériques, qui vous empêche de voir ce que vous ne seriez pas censé voir. Il faut une régulation des états et une coordination à l’échelle européenne sur ce sujet », ajoute le ministre.
Sur les sujets des « fake news », Frédérique Vidal va même plus loin, évoquant carrément « le réveil du siècle des lumières, à l’ère du numérique ». Et de célébrer « la voix de la vérité scientifique, de la rigueur… Le monde de la santé, de la recherche doivent être "la voix du vrai" ».
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier