LE QUOTIDIEN : Que pensez-vous du plan Ma santé 2022 ?
Dr YANN BOURGUEIL : C'est un projet de très grande ampleur qui a le mérite de jouer sur la simultanéité. Il s'agit en réalité d'une réforme à trois niveaux : l'organisation du système de santé ; les études en santé et le financement. Cette façon transversale d'aborder la transformation de la santé est la bonne, car tous les éléments sont liés. La France amorce un très grand virage si le plan se concrétise.
Cette réforme s'inscrit-elle dans la continuité ou en opposition des précédentes ?
C'est l'aboutissement d'un processus enclenché par la grande conférence de santé piloté début 2016 par Manuel Valls. La logique de transformation globale et structurelle est sensiblement la même.
En revanche, cette feuille de route est novatrice voire perturbante car elle fonde toute sa philosophie sur la demande de soins à l'horizon de 15 ou 20 ans. Elle défend l'idée très forte de la création d'une première ligne de soins de proximité conçue par intégration horizontale entre la ville et l'hôpital. Or, c'est une logique verticale portée par les groupements hospitaliers de territoire qui animait la loi Touraine.
Avez-vous identifié des freins à sa mise en œuvre ?
La recherche ne peut plus se limiter au champ biomédical. Il faut investir dans la production d'études sur l'organisation du système de santé. Sur le terrain, les porteurs de changements doivent être correctement outillés. Les résultats constatés doivent être évalués au fur et à mesure. Une réforme administrative – ARS, CPAM – est donc nécessaire pour accompagner les compétences et les ressources au niveau local.
Les grands gagnants des précédentes réformes, les CHU, doivent aussi s'intéresser au redéploiement de la recherche, à la création d'équipes territoriales. Leur implication est primordiale. Et pour que ça marche, les libéraux doivent également accepter le principe de responsabilité sociale et professionnelle !
Le temps est le dernier risque. On vise une modification des pratiques à court terme alors que le temps de formation médicale est bien plus long. La politique exige des annonces régulières quand le plan de départ cible une transformation du système de santé qui va bien au-delà du quinquennat. L'impulsion de cette réforme doit être très forte si le gouvernement veut parvenir à ses fins.
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