Une grande salle, une infirmière, et un voire deux assistants, la nuit. Et deux tableaux. C'est la plateforme nationale de répartition des greffons (PNRG), sise au cœur des l'ABM, en activité 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, avec un pic de 17 heures jusqu'à 4 heures du matin.
À droite, le tableau des donneurs, anonymisés sous leur numéro cristal - du nom du logiciel créé par l'Agence de la biomédecine (ABM) pour la greffe, avec les heures de passage au bloc et de clampage, le lieu du prélèvement. Puis, les organes prélevables, dans l'ordre de l'urgence vitale : d'abord, le cœur (le prélèvement doit être fait dans les 4 heures), les poumons (entre 4 et 6 heures), le foie (6 à 8 heures), le pancréas (jusqu'à 8 heures) - organes pour lesquels la coordination hospitalière de prélèvement se déplace, et les reins (36 heures). Systématiquement, un rein est attribué au niveau de l'hôpital de prélèvement. L'autre est redistribué sur toute la France, parfois en séjournant quelques heures à l'ABM.
À gauche, le tableau des receveurs en « super-urgence ». Si le logiciel cristal sort automatiquement la liste des receveurs prioritaires, il ne mentionne pas les critères très précis parfois apportés par les équipes. Sur 10 ce matin-là, 7 super-urgences étaient des enfants. Les autres sont des receveurs dont la vie est menacée à très court terme, ou des receveurs aux caractéristiques morphologiques ou immunologiques particulières.
Jonglant de l'un à l'autre, un œil sur l'ordinateur, l'oreille accrochée au téléphone, l'infirmière de l'Agence de biomédecine s'emploie à appareiller les greffons à des receveurs potentiels. En milieu de matinée, se dessine l'organisation du voyage des greffons. En attendant les résultats du « cross match », essentiels ne serait-ce que pour libérer le deuxième patient appelé en réserve. À l'autre bout du fil, dans les hôpitaux, les équipes qui ont fait la demande d'un greffon ont 20 minutes pour répondre. Elles se déterminent sur le dossier du donneur. Au 1er octobre, elles pourront même voir les images pour les organes thoraciques (PET Scan).
Si un greffon ne trouve pas de receveur, l'ABM le propose à l'étranger, via le logiciel Foedus Eoeo. Ainsi, un cœur Français a été greffé à Vilnius, la semaine dernière.
Dans les pièces attenantes à la plateforme de répartition des greffons, on trouve un petit studio (pour les nuits blanches), un bureau recelant les dossiers papiers des patients en attente de greffe d'organes et de cornées - classés dans des dossiers de couleurs et le registre national des refus.
Tous donneurs. Sauf si refus exprimé.
Destiné à recueillir le choix de ceux qui ne souhaitent en aucun cas que leurs organes soient prélevés après leur décès, le registre a connu « un boom depuis mars 2015 et les débats autour de l'amendement Jean-Louis Touraine », constate Géraldine Malaquin, responsable d'unité opérationnelle. « D'habitude, nous recevons 10 courriers par jour. Là, c'était 900 ! ». Résultat : à la mi juin, le registre des refus compte 139 337 signatures contre moins de 85 000 inscriptions enregistrées entre 1998 et mars 2015. « Les gens ont pris peur, ces débats ont mis en lumière la méconnaissance de la loi », explique la responsable.
Pour la journée 2016 de réflexion sur le don d'organes et la greffe, l'Agence de la biomédecine a voulu faire simple et pédagogique, avec un message : « Don d'organes. Tous concernés ». Son explicitation : « Vous êtes donneurs. Sauf si vous dites que vous ne voulez pas être donneur » - en informant ses proches ou en s'inscrivant sur le registre national des refus. Et un site interactif rénové : dondorganes.fr.
La loi Santé du 26 janvier 2016 réaffirme le principe du consentement présumé - en vigueur depuis la loi Caillavet de 1976 mais très peu appliqué. Au plus tard au 1er janvier 2017, selon les nouvelles modalités définies par la loi, « le médecin informe les proches du défunt, préalablement au prélèvement envisagé, de sa nature et de sa finalité ...). Ce prélèvement peut être pratiqué sur une personne majeure dès lors qu'elle n'a pas fait connaître, de son vivant, son refus d'un tel prélèvement, principalement par l'inscription sur un registre national automatisé prévu à cet effet. Ce refus est révocable à tout moment. »
Un décret précisant les autres modalités de refus que le registre national et un arrêté proposé par l'agence de la biomédecine concernant les bonnes pratiques relatives à l'abord des proches sont attendus très prochainement.
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