Depuis sa mise en place le 1er juillet 2021 par la Haute Autorité de santé (HAS), le dispositif d'autorisation d'accès précoce (AAP) a permis de mettre 79 thérapies présumées innovantes à disposition des patients. Sous le régime précédent des autorisations temporaires d’utilisation (ATU), seule une vingtaine de molécules étaient approuvées chaque année.
Dressant un premier bilan « positif » du dispositif, la HAS rappelle que les AAP s’appuient sur des données partielles affichant une « présomption d’efficacité » pour des besoins médicaux insuffisamment couverts. « L’enjeu est de repérer les innovations décisives pour les patients, alors que seulement un peu plus de la moitié des produits accédant rapidement au marché démontrent in fine leur efficacité dans les études de phase 3 s’inscrivant dans un temps plus long », est-il souligné.
Au total, 177 dossiers ont été déposés par des industriels auprès de la Commission de la transparence (CT) de la HAS. Parmi les dossiers traités, 80 % ont été acceptés (79/98) avec un délai moyen d’évaluation de 68 jours, « soit bien plus rapides que les 3 mois réglementaires », précise la HAS. Le délai est même réduit à « 40 jours s’il y a eu un pré-dépôt ». La plupart des dossiers concernent l’oncologie, avec 37 autorisations accordées pour 43 dossiers déposés.
Surtout, quatre accès précoces autorisés sur cinq ont ensuite bénéficié d’une « reconnaissance de progrès démontré lors de leur évaluation en vue du remboursement de droit commun ». Ces résultats sont jugés « très encourageants », alors que l’enjeu reste que les traitements avec AAP confirment les preuves de leur efficacité.
Une intégration sous condition de données moins robustes
À côté de ce levier important pour la mise à disposition des thérapies innovantes, la HAS fait évoluer sa doctrine d’évaluation des médicaments en vue de leur remboursement. Sa nouvelle approche, qui cherche l’équilibre entre accès rapide aux innovations et meilleur niveau de preuves d’efficacité, est détaillée dans un article publié dans « British Medical Journal Evidence-Based Medicine ». La Haute Autorité y reconnaît la possibilité d’intégrer des données moins robustes dans des conditions exceptionnelles.
Si l’essai contrôlé randomisé reste le gold standard, la doctrine introduit la possibilité de s’appuyer sur « des données de comparaison indirecte de bonne qualité méthodologique ou encore (sur) celles issues de groupe contrôle, à condition qu’elles soient expliquées et justifiées en amont par l’industriel », résume la HAS.
Aucune liste définitive n’établit les conditions rendant « déraisonnable » la conduite d'un essai randomisé. Quelques situations sont néanmoins envisagées, notamment la réponse urgente à une maladie émergente. Mais, même dans ce cas, la randomisation est considérée comme « éthiquement appropriée depuis des décennies, car elle conduit à la génération de preuves la plus rapide avec la plus grande certitude de résultats », est-il rappelé.
Plusieurs « points d’attention méthodologiques » sont énoncés. Ils seront pris en compte dans les évaluations de ces données moins consolidées. « Quelle que soit la source des données, la qualité de la conception de l'étude est la pierre angulaire de la certitude des résultats », insistent les auteurs. Et d’ajouter : « Pour combler rapidement les lacunes en matière de preuves, des études appropriées doivent donc être anticipées et non limitées à des conceptions non contrôlées. »
Cette doctrine devrait permettre une intégration des données issues de « méthodes émergentes », comme l'intelligence artificielle, les essais in silico et la modélisation des maladies. Ces approches pourraient « devenir une voie complémentaire pour optimiser le développement clinique, comme l'illustre le CRESim [European Child-Rare-Euro-Simulation, une stratégie d’analyse d’ensembles de données combinant la modélisation et la simulation, NDLR] en aidant à choisir le meilleur design dans les maladies rares ».
Focus sur la pédiatrie et l’antibiorésistance
La doctrine se penche également sur les spécificités liées aux traitements pédiatriques, alors que les prescriptions se font « encore trop souvent dans le cadre d’un usage hors autorisation de mise sur le marché (AMM) de médicaments étudiés uniquement chez l’adulte ou des médicaments avec une AMM pédiatrique mais de formulation inadaptée à certaines tranches d’âge ». Là encore, la HAS appelle à des données de qualité, issues de travaux à la « méthodologie rigoureuse ».
Un deuxième focus est consacré aux antibiotiques dits de « dernier recours » contre les bactéries multirésistantes. Leur développement doit s’inscrire dans les recommandations de l’Agence européenne des médicaments (EMA). Plusieurs données sur l’apport thérapeutique sont « fortement attendues », et notamment « au moins un essai clinique randomisé ciblant une pathologie d’organe pertinente au regard du couple bactérie/infection versus un comparateur de référence » ou « au moins un essai clinique randomisé "pathogène-centré" versus la meilleure option thérapeutique ».
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