Les services d’urgence sont en crise depuis plusieurs années, avec un nombre croissant de patients et des problèmes de ressources humaines empêchant un accès rapide aux soins.
Pour le Dr Mathias Wargon, chef du service des urgences adultes-Smur de l’hôpital Delafontaine, à Saint-Denis, « le système doit s’adapter ». Le métier d’infirmier en pratique avancée en médecine d’urgence (IPA-MU), qui existe déjà dans de nombreux pays, a été créé en France par le Pacte de refondation des urgences en 2019. Ce qui oblige à redéfinir le rôle de chacun : celui du médecin mais, surtout, celui de l’infirmier, qui peut désormais – grâce à une formation spécifique et une nouvelle expertise – effectuer certaines tâches selon des protocoles définis, afin d’optimiser l’organisation des soins. « C’est aussi dans cet esprit qu’ont été créées les unités mobiles hospitalières paramédicalisées, qui permettent un niveau d’intervention complémentaire, pour les urgences pré-hospitalières, relevant de la compétence d’un infirmier de structure d’urgence, formé et entraîné à cet effet », fait remarquer le Dr Wargon.
Ces prises en charge sont possibles lorsque le tableau clinique et le contexte ne requièrent pas obligatoirement un médecin urgentiste, ou éventuellement dans l’attente de son intervention.
S’opposer à la délégation est d’arrière-garde !
Dr Mathias Wargon
« Par exemple, aujourd’hui, on sait que, même en cas d’intubation difficile, on peut ventiler efficacement avec d’autres techniques. De même, l’interprétation d’un ECG peut être aidée par l’intelligence artificielle, ou être transmise au médecin régulateur (c’est ce que font les pompiers de Paris). L’évolution des métiers et des compétences, couplée à celle des techniques, permet, de plus en plus, de se passer dans certains cas de la présence d’un médecin », ajoute le Dr Wargon.
Des effets positifs démontrés
Aux urgences à l’hôpital, les infirmiers en pratique avancée peuvent coordonner la prise en charge, prescrire une imagerie et pratiquer des sutures de plaies, dans le cadre de protocoles de coopération. À l’étranger, où cette pratique existe depuis longtemps, ses effets positifs ont été largement démontrés dans de nombreuses études. Les IPA apportent une plus-value dans de nombreux domaines : coût-efficacité, satisfaction des patients, gestion de la douleur, délai d’attente, qualité des soins prodigués.
Des craintes injustifiées ?
« L’arrivée d’IPA-MU entraîne parfois des craintes injustifiées. Il y a des résistances, notamment dans le monde extra-hospitalier. Certains craignent une dégradation des soins, d’autres une concurrence… De toute façon, c’est en marche et s’y opposer, c’est vraiment un combat d’arrière-garde !, considère le Dr Mathias Wargon. Il faut surtout bien définir en amont le rôle de chacun : le médecin est toujours là pour prendre en charge les situations complexes et l’IPA pour appliquer les protocoles déjà définis. » Ainsi, la logique est celle d’une collaboration/réorganisation entre médecins et IPA et non pas d’une concurrence ou d’une substitution.
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